Focus sur la scène Rennaise – YOU VICIOUS ! en interview

Alter1fo vous propose de (re)découvrir la scène musicale rennaise à travers une chronique, hebdomadaire le plus souvent. Des talents émergent, d’autres confirment sur la scène locale. Certains les soutiennent, sortent leurs disques, d’autres leur proposent des lieux de concert, de répétition… Alter1fo donne un coup de projecteur à ces artistes, labels, lieux ou assos qui œuvrent d’arrache-pied pour que la scène locale existe. Permettre aux acteurs et aux publics de se rencontrer, donner la parole à ceux qui font la vie rennaise, tels sont nos buts avoués. 

Au premier abord, nous aurions pu croire à un hommage déguisé au célèbre toxico bassiste des Sex Pistols, mais non. Sous le nom à l’imaginaire torturé de You, vicious! se dissimule le nouveau groupe de Max Balquier (chant, guitare, basse, synths) et Bren Costaire (batterie), musiciens rennais rescapés de FRIGO, trio quimpérois ayant eu son heure de gloire dans les années 2000.  Initialement pensé comme un projet solo et sans promesse de « rendez-vous dans dix ans », Max est pourtant rejoint par Bren à la batterie. L’alchimie fonctionne comme s’ils s’étaient quittés la veille. You, Vicious! est né. A partir de là, le groupe ne va pas chômer puisqu’après la sortie d’un EP en février 2018, leur premier album composé de 10 titres (+ un bonus) est déjà disponible depuis la rentrée sur le label parisien Manic Depression.
Mélodies accrocheuses, rythmes soutenus, ambiance spleen dark-noise, arrangements soignés, le groupe s’affranchit des frontières musicales et affiche déjà une très grande maturité. Rencontre épistolaire avec Max.

  • ALTER1FO : Peux-tu nous rappeler le contexte de la fin du groupe FRIGO ?

Max : FRIGO, ça a duré 10 ans, de 2000 à 2010 avec la sortie de 3 Eps, 2 albums et en ayant joué entre 100 et 200 concerts. C’était une super aventure. Ce groupe nous a permis de rencontrer beaucoup de monde, de jouer en support de groupes qu’on adore toujours (Lali Puna, Interpol, Chokebore, …), dans des rades paumés ou sur des plus grosses scènes (Art Rock, Printemps de Bourges, Vieilles Charrues, Nouveau Casino, etc…) Mais au bout de 10 ans, quand tu as un environnement fragile à reconstruire à chaque sortie d’album, c’est à dire retrouver idéalement un label, une structure de booking/tour, faire un peu de promo pour que ton disque ne sorte pas dans l’anonymat, etc….et que tu commences à te substituer à tout ça un peu par défaut, et bien tu t’essouffles. On a toujours aimé l’esprit DIY mais quand faire de la musique représente 20 % du temps que tu passes sur ton groupe, à un moment, ça devient assez dur à gérer. On avait fait le tour d’un truc et l’équation à 3 mecs dont les aspirations musicales et personnelles devenaient différentes ne fonctionnait plus trop.

  1. Comment présenter YOU, VICIOUS! en quelques mots ou quelques notes ?

Max : On fait du rock, avec des éléments électro, synthés, pads etc… On joue une musique assez contrastée, basée sur les ruptures. On aime beaucoup poser des ambiances planantes, electronica avec des mélodies entêtantes puis, en opposition, balancer une rythmique lourde avec des grosses guitares qui envoient le boulet!

  1. Comme évoqué précédemment, YOU, VICIOUS! est composé  de deux ex-membres de FRIGO… est-ce une continuité ou un nouveau groupe ?

Max : Entre Frigo et You, Vicious ! J’ai tenté vaguement de faire autre chose musicalement. Dans Frigo, il y avait des titres instrumentaux, des titres chantés en Anglais, d’autres en Français, ça pouvait être très rock ou parfois pop, mélancolique ou virer électro. Assez vaste et « varié » on va dire, même si je n’aime pas trop ce mot. Donc, qu’on prenne telle ou telle direction, de toutes façons,….c’est certainement un de mes défauts : je pourrai former un groupe rock, avoir un autre projet avec des machines, etc….ce serait beaucoup plus facile à identifier et à mettre dans des cases. Au lieu de ça, je fais tout ce qui me plait au sein d’un même groupe.

Pour You, Vicious!, je n’avais pas forcément dans l’idée de rebosser avec Bren, on ne se voyait pas souvent. Mais Bren est arrivé juste au moment où je bouclais mes démos, il m’a proposé de tester ses drums dessus et ça a collé, voilà ! Forcément, le risque était donc qu’on nous raccroche à Frigo. Mais bon, c’est assumé, cela nous est égal. Ce que je trouve intéressant par contre, c’est qu’il y a pas mal de personnes qui découvrent You, Vicious! et qui n’ont jamais entendu parler de Frigo avant.

  1. Comment qualifieriez-vous votre musique et quelles sont vos influences musicales assumées ?

Max : On essaie de mélanger des sons « classiques » guitare, basse, batterie avec des sons électroniques, synthétiques pour proposer une musique espérons-le à la fois identifiable et inclassable. Pour imager un peu, quelque chose à mi-chemin entre le noir et le brillant, entre l’énergie et la mélancolie.

En termes d’influences, c’est vaste, puisque tout ce que j’écoute peut m’influencer sans le savoir. En ce moment, j’aime beaucoup écouter Nasser, Mark Lanegan, J. Bernardt, Daniel Avery, pleins de trucs différents quoi….mais bon, si on doit nous rapprocher de groupes, ça pourrait être la scène Rock Action (Mogwai, Errors, ….), Morr Music (The Notwist, Lali Puna, …) ou des trucs comme The Rapture

  1. Justement, citez-nous 3 de vos disques incontournables ?

Max : Un disque qui est sorti quand j’avais 15 piges, et qui m’a bien marqué, c’est « Mellon Collie and infinite sadness » des Smashing Pumpkins. Mon frangin m’avait conduit à Nantes pour les voir sur cette tournée et leur concert de 3h avait été une grosse claque.  « In evening air » de Future Islands ;  « Turn on the bright lights » d’Interpol ;

Bren : Je valide le Smashing moi aussi : une pépite. « WISH » de The Cure. « Achtung Baby » U2 : ce son de gratte de The Edge… il est énorme.

  1. Pour les non anglophiles, que racontent les textes de vos chansons. Avez-vous des thèmes qui vous inspirent ou des sujets  privilégiés ?

Max : Il y a des choses que je vais chercher directement dans ma vie, mes expériences. Ou bien alors certains proches m’inspirent aussi. C’est souvent mélancolique. Il y a des textes sur des relations toxiques, sur la rupture avec son passé, avec soi-même, sur l’égocentrisme, sur le rapport avec la nature quand on se sent éloignée d’elle…beaucoup de sujets différents!

  1. Votre premier concert a eu lieu dans la très chouette salle du Galion à Lorient, comment s’est passé votre retour sur scène ?  Garde-t-on des automatismes ou faut-il tout réapprendre ?

Max : Sur le 1er concert, du stress surtout, puis une forme d’accomplissement. Certains automatismes reviennent assez vite oui, notamment au niveau du jeu de guitare. Au niveau des chants, oui, il faut réapprendre car c’est un muscle à retravailler. Mais en tout cas, c’est jouissif de refaire des concerts, j’avais oublié comment c’était cool !

Bren : De mon côté je n’ai jamais arrêté de faire de la scène depuis ces 10 dernières années. Mais là ça a un goût un peu spécial car ça fait remonter des émotions et c’est plutôt cool comme sensation.

 

  1. J’ai cru comprendre que vous n’habitez pas tous les 2 sur Rennes (nul n’est parfait…). Comment s’organisent alors les répétitions ?

Pour créer des morceaux, on se les échange beaucoup sur le net, on discute de ce qui marche ou pas, on les retravaille à distance. On enregistre tout chez nous. On répète peu, on n’a pas de lieu défini.

Bren : Le fait de ne pas être dans la même ville n’est pas un problème je trouve. J’habite à Nantes et ce n’est pas non plus le bout du monde hein. On se cale des sessions de travail bien organisée afin d’être efficace. Et ça fonctionne. Après ça demande du travail personnel comme pour tout. Et la scène c’est formateur. Bien plus que des longues répés interminables !!!

  1. Votre pochette, vos photos et vos clips sont très soignés. Pouvons-nous en déduire qu’être de bons musiciens ne suffit plus aujourd’hui et qu’il faut aussi savoir communiquer ?

Clairement oui. La diffusion de la musique passe beaucoup par l’image, par les clips. Tu peux avoir un super groupe et tout le monde passe à côté puisque tu ne fais aucun effort sur la façon dont tu diffuses ta musique.

Après, ça demande presque plus d’effort qu’écrire et enregistrer des morceaux. C’est pour cette raison qu’on essaie de bien s’entourer, avec des amis dont on adore le taf, qui ont de super idées: La Houle des Horizons sonores réalise nos clips avec beaucoup d’inventivité, d’ingéniosité, parfois avec très peu de matière, Jérôme Sevrette a bossé sur les photos et des captations vidéos très contrastées, et Anshort, une jeune tatoueuse a bossé sur nos pochettes, en proposant des graphismes simples et catchy que Ludovic Leven (du groupe Coude) a mis en page avec un logo qu’il a créé.

  • L’émergence des réseaux sociaux a-t-elle changé la donne ?

Avec Frigo, on a écumé les bars pour payer notre 1ère démo, on a ensuite fait des salles type SMAC, puis des festivals. Tout se jouait essentiellement sur scène. Il fallait envoyer ton CD à tous les programmateurs, à toutes les radios, les appeler, aller les rencontrer. Le web n’avait pas autant d’importance.

Maintenant, tu ne peux pas exister sans Facebook, tu existes difficilement si tu ne sors pas des vidéos, si tu ne communiques pas. Il y a un côté un peu pervers dans ce jeu-là, il faut quasi faire un bon score d’abonnés pour être pris au sérieux par certains. Tu sors ton disque en CD et en vinyle et tu peux le proposer plus facilement en ligne mais beaucoup se sont tournés vers le streaming, ta musique peut s’écouter partout. Tu peux atteindre beaucoup plus de monde aussi, mais en même temps, il y a tellement d’informations et de bons groupes…

  1. Sur la scène rennaise, comment vous situez vous et êtes-vous en contact avec d’autres groupes ? 

On n’est pas vraiment intégré à la scène Rennaise, ni à aucune scène d’ailleurs, on ne se sent pas rattaché géographiquement à une ville particulière. Pour autant, on connaît d’autres groupes Rennais pas très intégrés non plus, les gars de Nude par exemple, un excellent groupe à la DIIV. Eyjafjoll aussi qui fait de la musique électronique paranormale :-), Mick avec The Wall Factory qui fait son petit bout de chemin en solo ou en groupe. Les membres des assos / micro labels Ideal Crash et KDB sont des amis. ARM, Mellanoisescape, Tropique Noir, DEAD, Laetitia Sheriff, Thomas Poli, The Last Morning Soundtrack, Le Comte… je ne les connais pas personnellement mais j’aime bien ce qu’ils font.

  1. Pour conclure, quels sont vos projets ? 

Max : On vient tout juste de sortir l’album. On va donc faire des concerts maintenant. On n’est pas dans un démarchage de forcenés, on fera ce qui nous sera proposé. Il y a un brasseur artisanal de Concarneau qui sort une bière signature « YOU VICIOUS », c’est assez marrant pour le souligner. En parallèle, je bosse sur un projet (vraiment) solo, avec des textes en français, mais je ne peux pas beaucoup en parler puisque ça se met tout juste en route, aussi bien cela prendra une tournure différente dans le temps.

 

Bren : Je suis d’accord avec Max, on verra la tournure que cela prend et c’est toujours cool d’attaquer avec des dates sympas comme celles qui arrivent. Après ça dépend aussi des plannings de chacun, des envies. Pour ma part j’ai aussi différents projets avec lesquels je tourne tout au long de l’année.

  1. Le merchandising, c’est par où qu’on vous trouve ?

Max : Tout se trouve ici : https://fanlink.to/youvicious ou à nos concerts. Pour les Rennais, possible aussi de vendre nos disques à l’apéro, il faut juste nous envoyer un petit message 😉

Photos by @Jérome Sevrette

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