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Photographe de métier, Catherine Rechard s’est tournée vers le film documentaire au fur et à mesure de ses travaux. Laissant son appareil photo au profit d’une caméra, elle donne dorénavant la voix à ceux que nous n’écoutons pas forcément et nous montre ce que notre regard ne voit plus.

En 2011, son film « Le déménagement » a provoqué une effervescence dans le milieu médiatico-judiciaire. Il racontait  le transfert  des détenus de la maison d’arrêt Jacques-Cartier vers celle de Vezin-le-coquet. Pourtant, sa diffusion à la télévision a été interdite. L’administration pénitentiaire voyait d’un mauvais œil le fait que les témoignages de détenus se fassent à visage découvert. Pas de floutage, pas de diffusion⁽¹⁾! Ce n’est qu’après une bataille judiciaire longue de plus d’un an et demi que le tribunal administratif de Paris tranchera en faveur de la production et autorisera finalement la diffusion du film sur France 3 et TVR.

Dès lors, la question de l’image des détenus renvoyée par les médias a poussé Catherine Rechard à tourner ce nouveau documentaire « Visages défendus »  projeté en avant-première ce dimanche 7 janvier 2016 au ciné TNB.

Catherine Rechard : « Le film ’Le déménagement’ a connu des problèmes de diffusion à cause de visages non floutés des détenus. Je me suis alors demandée pourquoi cela posait autant de difficultés ? Pourquoi était-ce si compliqué  pour un détenu de témoigner à visage découvert ? Par cette interdiction à montrer leur visage, il se construit une image un peu fantasmée des détenus qui est stigmatisante et préjudiciable à leur sortie de prison.  C’est le cœur de la réflexion du film. »

En effet, qui n’a pas zappé un jour sur ces reportages TV sur l’univers carcéral utilisant les mêmes techniques de tournage ? Ici, le visage est flouté sinon caché dans la pénombre. Là, le détenu n’est filmé que de dos ou à travers un gros plan sur ses mains, sa nuque. « Le formatage télévisuel impose un traitement court avec des images choc. »⁽²⁾

L’enjeu du film est donc bien ici de cerner l’impact  de ces usages télévisuels qui alimentent le sentiment de dangerosité. Mais pendant plus d’une heure, ce sont aussi et surtout des rencontres humaines que le film nous propose de découvrir. Rencontres de vies souvent occultées par le prisme de la violence carcérale sans voyeurisme ni fausse pudeur.

Catherine Rechard : « Les personnages du film sont des personnes qui ont été incarcérées à une époque de leur vie ou des personnes en maison d’arrêt que j’ai filmées lors de séances de cours de philosophie sur la question du visage justement. Les détenus s’interrogeaient sur leurs propres représentations dans la perspective de leur sortie. »

Courageux, le film va à contre-courant de l’ambiance actuelle, lourde et pesante du « tout-sécuritaire ». Il nous permettra assurément de se poser les bonnes questions sur nos politiques pénales et pénitentiaires. On rappelle qu’ en 2013, la France a été condamnée par la Cour européenne des droits de l’homme pour « traitements dégradants ».⁽³⁾

Catherine Rechard : « Je pense justement que c’est le moment d’élever le débat et d’exprimer d’autres propositions. Les prisons ne sont pas que remplies de terroristes. »

A l’issue de la projection, une rencontre et un échange sont organisés avec la réalisatrice Catherine Réchard. Le film sera également présenté en avant-première le 19 Janvier à 20h à la SCAM,  5 avenue  Vélasquez, Paris ainsi que le 5 février au Ciné Palace à Epinal. Il sera ensuite programmé dans les salles de Bretagne en mars 2016.

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⁽¹⁾ L’article 41 de la loi pénitentiaire de 2009 reconnaît le droit de la personne détenue à disposer de son image comme tout un chacun : « Les personnes détenues doivent consentir par écrit à la diffusion de leur image ou de leur voix lorsque cette diffusion ou cette utilisation est de nature à permettre leur identification ». (cf Légifrance)

⁽²⁾ La prison vue par les Français – Pascal Décarpes

⁽³⁾ Conditions de vie en prison : une honte française

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Site web de Catherine Rechard

Site web de CANDELA PRODUCTIONS

 

Visages Défendus : réalisé par Catherine Rechard et produit par Marie Laurence et Franck Delaunay.