Jusqu’au 20 mars, l’espace d’exposition d’art contemporain 40mcube présente Espèces d’hybrides, une exposition collective regroupant des œuvres qui évoquent des formes de la nature (végétaux et minéraux) tout en employant des matériaux industriels principalement utilisés dans des usages quotidiens. S’opposent ainsi la forme et la matière des œuvres.
Nous avons demandé à Cyrille Guitard, le médiateur de 40mcube, de nous éclairer sur le contexte dans lequel s’est montée cette exposition et sur ses enjeux artistiques.
Un cycle d’exposition sur l’hybridation.
« 40mcube a rassemblé sous l’intitulé Espèces d’hybrides une série d’expositions traitant du thème de l’hybridation, très présent dans la pratique de nombreux artistes. Deux de ces expositions ont déjà eu lieu (Samir Mougas, Trout farm, du 25/04/09 au 18/07/09 et Lina Jabbour, L’enclos, du 16/10/09 au 19/12/09) et deux autres sont à venir (Emmanuelle Lainé, à l’occasion de la seconde édition de la biennale d’art contemporain de Rennes, du 30/04/10 au 18/07/10, et Stéphanie Cherpin pendant l’automne 2010). Ces expositions permettent de circonscrire la diversité de ce thème, sans toutefois prétendre le cloisonner, et donnent au public l’occasion de découvrir des œuvres vraiment surprenantes. »
Une exposition issue d’une collaboration.
« Alors que deux expositions du cycle sont passées et que deux autres sont à venir, nous présentons actuellement l’exposition collective Espèces d’hybrides qui emprunte son titre à la série d’expositions. Le thème de l’hybridation y est abordé frontalement avec des œuvres qui réunissent des formes naturelles et des matériaux issus de l’industrie.
A l’origine de cette exposition, un partenariat ponctuel s’est noué entre deux structures qui se ressemblent par beaucoup de côtés : 40mcube et Buy-Sellf Art Club, tous deux lieux de production d’œuvres et de diffusion d’art contemporain. À l’automne 2009, Buy-Sellf nous a invité à présenter une exposition dans leur espace, à Marseille. Ce fut pour nous l’occasion de montrer le travail de l’artiste rennais Samir Mougas dont nous avions déjà présenté des œuvres ici. Après cette exposition de 40mcube à Marseille, nous avons retourné l’invitation à Buy-Sellf Art Club. En résulte l’exposition Espèces d’hybrides. »
5 artistes. 5 œuvres.
« Lorsque le public pénètre dans l’espace d’exposition, il se retrouve au cœur d’un paysage dont les œuvres définissent l’environnement. Notre volonté était d’inviter à la déambulation pour favoriser la découverte de chaque pièce.
Les photographies de plantes grasses d’Aurore Valade (Sempervivum decorum, 2007) dessinent un horizon végétal tandis que le rocher brisé en deux réalisé par Guillaume Constantin nécessite d’être contourné pour révéler le graffiti qui le recouvre (don’t let the light escape, 2007). L’arbre qui pleure de Laurent Perbos, La bille de Guillaume Poulain – une parfaite imitation d’un tronc d’arbre débité en planches – et les blocs de béton vibrants de Vincent Ganivet complètent le paysage. »
Nature vs industrie ?
« Mais le paysage dont nous parlons n’est pas de ceux que l’on trouverait à la campagne. Ce serait plutôt un paysage urbain : le terrain vague. Car si les formes sont aisément identifiables, les matériaux utilisés par les artistes pour créer les œuvres ne sont pas ceux attendus. L’arbre qui pleure est fait avec des tuyaux d’arrosage, don’t let the light escape utilise des plaques de polyéthylène, La bille est en polystyrène et Concrete stones de Vincent Ganivet sont des sculptures en béton aggloméré avec de la résine. Autant de matériaux qui trônent habituellement au milieu des terrains vagues, déchets des activités humaines urbaines et industrielles.
Dans chaque œuvre, les deux pôles (naturel et artificiel) sont étroitement mêlés, d’où le titre de l’exposition qui sous-entend que les deux natures se sont totalement mélangées. Les artistes nous font osciller de l’une à l’autre. Et nous constatons finalement qu’ils ont su les réconcilier.
En sorte qu’il est possible de voir les œuvres selon deux points de vue qui finalement s’harmonisent : soit nous voyons des formes naturelles qui s’artificialisent, soit nous voyons des matériaux industriels qui se naturalisent. L’arbre qui pleure illustre bien cela. La forme est immédiatement identifiable (un arbre avec ses branches et des souches au pied de son tronc) mais les tuyaux colorés qui le composent l’éloignent irrémédiablement de son modèle. La vie est malgré tout bien présente : des gouttes s’échappent ponctuellement des branches les plus hautes et tombent dans les souches réparties autour de l’arbre. L’artificiel prend vie… Se pose alors cette question cruciale, au cœur de l’exposition : qui, de l’homme et de la nature, influence l’autre ? Et finalement, quelle est la trace laissée par l’artiste sur son environnement ? »
Espèces d’hybrides
Guillaume Constantin, Vincent Ganivet, Laurent Perbos, Guillaume Poulain, Aurore Valade.
Exposition à voir jusqu’au 20 mars à 40mcube (48 avenue Sergent Maginot – 35000 Rennes – 02 90 09 64 11 – www.40mcube.org – contact@40mcube.org).
Ouvert du mardi au samedi de 14 :00 à 18 :00
Entrée libre.
Merci à Cyrille Guitard pour son aimable collaboration
Très chouette exposition à voir sans attendre.
La vignette sur France Culture avec Guillaume Constantin traite le sujet :
http://sites.radiofrance.fr/chaines/france-culture2/emissions/vignette/fiche.php?diffusion_id=81261