Le premier round de la reprise (de volée) des concerts proposée par l’Alambik, Carnival of Sound et le Jardin Moderne avait lieu le vendredi 11 juin et on y a pris un plaisir fou. Retour sur une soirée aussi riche en soleil qu’en émotions.
Soyons précis. La « vraie » reprise des concerts au Jardin Moderne avait en fait lieu samedi 5 juin avec une soirée regroupant Nombre Z, Malaad Roy et Dj Blar et ça avait l’air bien chouette. Comme nous avons honteusement loupé ça, nous nous rattrapons goulument avec le doublé de grande classe organisé les 11 et 12 juin par l’Impeccable Triple Alliance de l’Alambik, Carnival of Sound et du Jardin Moderne.
Dès le début précoce de cette soirée de concerts du vendredi 11 juin, on sent dans l’air une atmosphère aussi singulière que réjouissante. Il y a bien sûr la joie d’un soleil éclatant et de cet espace vaste et verdoyant aménagé devant le Jardin Moderne. Il y a surtout le plaisir de recroiser les camarades qu’on n’a pas vus depuis trop longtemps et de partager enfin de nouveau le bonheur collectif et la fête sensorielle et chaleureuse que procure la musique vivante.
C’est le duo GRAND VEYMONT qui démarre le bal avec une ponctualité d’horloger. On a eu un vrai coup de cœur à la découverte de la musique de Béatrice Morel-Journel et Josselin Varengo et ce concert va largement remplir toutes ses belles promesses. Le duo du Vercors déploie sa musique en deux longues plages aussi délicates que vertigineuses. Leur broderie sonore entre spirales concrètes et pop rêveuse monte subtilement en puissance tout au long d’un set riche et sensible qui nous plonge dans une délicieuse rêverie estivale. Finesse et générosité sonore, voix envoutantes et rythmiques subtilement frondeuses, Grand Veymont confirme haut la main qu’il faudra suivre de près leurs prochaines aventures et nous offre une ouverture de très très haute volée.
Le duo nantais Humbros enchaîne ensuite avec la même impatience palpable. Simon Puiroux et Charles Dubois démarrent leur set par un joyeux puzzle rythmique bien free à souhait. Leur groove bancale et le foisonnement sonore nous ravissent d’emblée. On y retrouve avec bonheur la complexité jubilatoire et la soif d’exploration sonore du new yorkais Eli Keszler. Ce chaos chaloupé et généreux comble largement nos aventureuses oreilles. A mi-chemin, le duo prend hélas la tangente vers des territoires plus prog qui nous convainquent beaucoup moins. Flutes planantes, nappes synthétiques cosmiques, on avoue être assez peu client du trip. On redescend donc (un peu) de notre nuage un peu frustré de n’avoir pas été totalement charmé mais content de voir que le manque n’a pas totalement désarmé notre sens critique.
Il est à peine 21h20 et il est déjà temps du final de la soirée. C’est l’heure des retrouvailles avec le rennais Rouge-Gorge et, même si on a déjà pu voir Robin Poligné un paquet de fois en concert, celui-là a une saveur toute particulière. Fidèle à son humour grinçant, il démarre son set solo par un audioguide partant joyeusement en quenouille. Son côté pince-sans-rire va vite laisser la place à une émotion et une joie contagieuse. L’interprétation tout en sensibilité de son déjà bien à vif Allez-vous-en file les poils à tout le monde. Devant un public conquis entre la larme à l’œil et des fourmis dans les guiboles, même assis sur nos bancs, le volatile va nous offrir une prestation de très très haut vol. Entre Un jour plus vieux à la fébrilité communicative, Les primevères des fossés qui déclenche une mini-émeute jubilatoire ou encore une reprise malicieuse mais ultra-sensible du Désolé de Sexion d’assaut, l’oiseau nous offre un set en apesanteur qui nous fait largement oublier, l’espace du moment, l’interminable attente qui nous y a mené. Le monsieur conclut fort judicieusement ce set vivifiant à capella avec un nouveau morceau automnal et combatif.
Couvre-feu oblige, on repart bien tôt à la maison mais difficile d’avoir des regrets tant la soirée a été la preuve éclatante de toute la force de la musique vivante. Ça tombe bien, on remet le couvert le lendemain.