On arrive au Jardin Moderne par le côté cour, pour cause de travaux et on en profite pour aller jeter un coup d’oeil à l’installation d’Antoine Bellanger avant le début des concerts. Une diapositive J’y suis presque est projetée sur le mur devant une batterie : c’est effectivement un titre approprié, puisqu’il n’y a pas de batteur ! Des petites pointes viennent percuter chacun des éléments de la batterie, dans un mouvement quasi-imperceptible : et pourtant ce jeu de batterie de 7 minutes se fait clairement entendre dans la petite pièce du Jardin Moderne.
Quel rapport avec Mein Sohn William ? Antoine Bellanger a participé activement à la réalisation de l’album de Dorian, à la fois sur le mixage du disque, mais aussi en jouant du clavier sur certains titres.
Après ce petit apéritif rythmique, nous rejoignons la salle, dont les murs sont recouverts d’affiches sérigraphiées, réalisées par le collectif Pan! Beaucoup d’humour, et un travail artistique soigné, avec notamment pas mal d’affiches de concerts. Le collectif réalise aussi certaines pochettes de cd, comme la très jolie pochette de Palais des Enfants de Tom Bodlin.
Ce dernier ouvre cette Release Party, entouré de cuivres, d’une guitare et d’une batterie électronique. Le chanteur/saxophoniste de Café Flesh nous propose les titres de son nouvel album, Palais des Enfants, et il nous faut quelques minutes avant de rentrer dans son univers. Le nantais sample divers instruments, et superpose les boucles avec une énergie redoutable. On est un peu paumé au départ, mais on se laisse progressivement happer par les mélodies qui se dessinent.
Tom utilise une palette impressionnante de saxophones, avec entre autre un sax baryton, mais aussi un saxhorn alto (qui ressemble à un mini-tuba, bon c’est un peu schématique, certes…). Il joue ainsi sur des tonalités différentes auxquelles s’ajoutent des boucles jouées à la guitare électrique.
La rythmique est assuré par la batterie électrique qu’il sample en live, mais aussi par des rythmiques vocales proches du beat-box. Un savant mélange pour une musique qu’il accompagne d’un chant habité et tendu. Entre fanfare déstructurée et free jazz, un set qui nous a vraiment conquis et qui mérite largement d’y jeter ses deux oreilles sur disque.
Dans la famille des one-man band inclassables, Dorian Taburet aka Mein Sohn William prend le relais. Nous n’avions pas encore eu l’occasion de le découvrir sur scène, mais ses prestations pendant la tournée des Trans Musicales n’étaient pas passées inaperçues (il y a de chouettes live reports de cette tournée sur le site de nos amis Pop Is On Fire).
Il est seul, mais il occupe l’espace scénique avec une frénésie rare ! Guitare acoustique en bandoulière, il jongle entre batterie électronique et claviers, en rajoutant quelques sons 8-bits jubilatoires. S’il est très percussif, le set fait aussi la part belle au chant. Dorian scande aussi des phrases qu’il triture ensuite pour former des boucles surprenantes (parfois à l’envers).
Même s’il est aux frontières du rock, de la pop, du folk (voire du punk), il est définitivement inclassable, et c’est très bien ainsi ! Le tout est bourré d’humour et de clins d’oeil en direction d’une salle blindée de spectateurs.
Alors effectivement le garçon a un univers bien barré et vraiment unique : mais le set est beaucoup plus millimétré qu’il n’y paraît, et c’est ce qui fait la force de cet artiste. En effet, on le voit à plusieurs reprises compter les temps, n’hésitant pas à recommencer le titre, comme sur Until The End (en même temps, il nous avait prévenu qu’il le plantait à chaque fois !). Ce mélange d’aisance apparente et de précision rythmique donne au set une dimension surprenante.
La bonne surprise s’est prolongée avec l’écoute de son premier album, qui confirme le côté travaillé des titres, avec de chouettes collaborations (Carla Pallone sur Husband notamment). Et Dorian réussit la prouesse de conserver sur disque cette douce folie découverte sur scène. Un artiste à suivre de très très près…
Vous pouvez aussi retrouver Mein Sohn William dans l’Echo du Oan’s !
Place ensuite au duo zurichois Disco Doom, accompagné d’un batteur pour cette mini-tournée française d’une semaine. Composé de Gabriele Di Mario (guitare et chant), et Anita Rufer (guitare et basse) , ce duo nous propose les titres de leur dernier album, Trux Reverb.
Ca commence par un morceau instrumental noisy à souhait, qui n’est pas sans nous rappeler Sonic Youth. Mais la comparaison avec les groupes indé de noise des années 90 s’arrête assez rapidement, puisque le duo nous offre une palette musicale élargie : sur la base de mélodies pop, ils rajoutent des ponts plus noise, en lorgnant parfois vers le post-rock. Les titres les plus réussis sont d’ailleurs ceux qui multiplient les références musicales, notamment lorsque Gabriele commence en douceur pour finir sur des montées saturées du plus bel effet.
La voix de Gabriele est d’une surprenante légereté, ce qui contraste avec le côté orageux de certains morceaux. On regrette juste qu’Anita n’accompagne pas plus souvent Gabriele au chant, car le duo des voix ajoute un vrai plus.
Le set est hyper carré, mais ce n’est pas surprenant quand on sait que le combo sillonne les routes depuis plus de dix ans, ayant à son actif une longue tournée américaine en première partie de Built To Spill. Une jolie surprise musicale.
Pour clore cette soirée, Les Blousons font leur entrée sur scène : tatouages apparents, look rétro soigné, ça sent le rockabilly ! Eh bien pas vraiment, car le quatuor nous offre bien plus que ça : ça sonne garage crasseux, avec une bonne dose de punk, le tout étant saturé à la limite de la noise.
C’est réjouissant, c’est drôle et c’est surtout sacrément carré. Frankie maltraite sa contrebasse mais sait aussi jouer en nuance (avec un archet), au service d’une rythmique péchue (avec Ritchie à la batterie). Johnny et Jessie saturent respectivement guitare et claviers juste ce qu’il faut, et il faut aussi reconnaître à Jessie un joli timbre de voix.
Le groupe est bourré d’humour (notamment sur le titre a cappella en rappel) et réussit à faire danser le public (La Baston) malgré l’heure tardive. On saura maintenant Qui c’est les Blousons !
Belle réussite et grosse affluence pour cette Release Party au Jardin Moderne, on en redemande ! (ci-dessous un diaporama-photo de cette soirée)
Un grand merci à toute l’équipe du Jardin Moderne, et notamment à Mathias pour son accueil.