Le festival Bain de Blues réussit sa nuit bleutée

Monkey Junk

Le blues était à l’honneur ce samedi 28 avril à Bain de Bretagne, avec l’excellente programmation du festival Bain de Blues, éclectique à souhait. Retour en images sur une édition réussie.

A 20 minutes seulement de Rennes, il existe un festival qui met à l’honneur un genre musical encore trop méconnu, le blues. Le festival Bain de Blues en est à sa sixième édition : si les premières éditions étaient beaucoup plus orientées « scène locale », l’affiche de cette année était clairement internationale.

Et quelle affiche ! Du piano blues à l’harmonica en passant par la guitare électrique, il y en avait pour tous les goûts : le blues moderne sait se renouveler en se teintant de soul, de rock, de funk, de punk, etc…

Mais l’internationalisation du festival ne s’est pas faite au détriment de la scène locale, bien au contraire. Celle-ci est toujours présente, notamment par le biais d’une nouveauté, Bars’n’Blues.

Les bretons de Shake It Too et les normands de Witch Doctors se sont succédés dans les bars de Bain l’après-midi. Belle affluence et qualité musicale au rendez-vous si l’on s’en tient aux bons échos d’un couple de festivaliers : ces habitués du festival depuis la première édition ont souligné cette initiative qu’on espère voir perdurer lors des prochaines éditions.

On n’a malheureusement pas pu assister à ces concerts, tout comme celui de l’harmoniciste Giles Robson & The Dirty Aces, qui ouvrait la nuit du blues dans la salle de Bain en début de soirée. On arrive tout juste à la fin du concert et les quelques notes entendues nous font regretter d’avoir manqué ce concert : dommage, car les quelques titres que nous avions pu écouter sur la toile annonçaient un set prometteur (et qui semble avoir tenu toutes ses promesses si l’on s’en tient aux applaudissements nourris à la fin du concert).

Lawrence Shy Gladney

Mais la frustration est de courte durée, car Lawrence Shy Gladney prend place sur scène, accompagné de l’excellent Gaspard Ossikian. Deux guitaristes donc, mais aussi une section rythmique basse-batterie qui va donner d’entrée de jeu le tempo : mélange d’un blues électrique dans la pure veine Chicago, le set lorgne de temps en temps du côté du funk et du rock avec beaucoup de réussite. Les compositions originales de Lawrence sont notamment métissées de plusieurs courants musicaux : la basse slappe, la rythmique se fait plus saccadée, ça groove sec !

Sur les reprises de quelques standards du blues, le concert prend une coloration blues-rock savoureuse : Jimi Hendrix est à l’honneur (Hey Joe, Voodoo Child), mais aussi John Lee Hooker (Boom Boom), repris en choeur par un public de connaisseurs. Sans oublier B.B. King bien sûr, pour la plus grande joie de Gaspard, inconditionnel de ce grand bluesman (il a notamment eu l’occasion d’assurer sa première partie en 1989). Les guitaristes y vont de leurs soli respectifs, mais sans esbroufe, ni compétition, accordant même leurs jeux de guitares sur un duo synchronisé face au public. Un vrai grand moment de blues comme on les aime.

CFA Band

La dernière note résonne encore lorsqu’à l’autre bout de la salle, les premières notes du CFA Band nous incitent à rejoindre la petite scène. Cette tradition de l’inter-scène est une vraie réussite, car elle permet d’assurer en permanence la présence d’un groupe, ce qui donne une véritable identité « festival » à cet événement. Fidèle à la tradition de soutien à la scène locale, le festival nous propose les rennais du CFA Band en interlude musical. A l’origine, il y a Clément Blues, rejoint depuis par Antoine Minguy (batterie) et Florian Stephan (basse). Les différents sets qu’ils proposent alternent standards du blues reinterprétés (notamment une reprise réussie de Stevie Ray Vaughan), et compos originales. Une rythmique efficace, un jeu de guitare virtuose, le tout donne un blues-rock énergique et pêchu : un trio qu’on espère revoir rapidement sur Rennes !

Kenny Blues Boss Wayne

Aucun temps mort puisque la tête d’affiche du festival prend déjà place sur la grande scène. Kenny Blues Boss Wayne est l’un des pianistes de blues les plus captivants du moment. Né à Los Angeles mais vivant actuellement au Canada, il a d’ailleurs remporté récemment le Grammy canadien du meilleur album blues de l’année, produit par Duke Robillard. On attendait la confirmation scènique de ce succès critique, et on n’a pas été déçu ! Dans un splendide tailleur rouge vif, Kenny prend place derrière son clavier et se lance dans un boogie-woogie endiablé. Ce Fats Domino des temps modernes mélange avec beaucoup de réussite boogie et blues old-school avec des petites touches de soul.

L’ensemble donne un style musical inédit et original, servi par un backing band de luxe. Fabrice Bessouat à la batterie et Thibaut Chopin à la contrebasse proposent une rythmique délicate, aux frontières du jazz, avec une classe incomparable. Drew Davis réhausse le tout avec de chaleureuses notes de saxophone, dans des soli qui sonnent comme une évidence. Ca swingue dans tous les sens, les interludes solo au piano prouvent l’indéniable talent de Kenny Wayne, notamment lorsqu’il explore les sonorités synthétiques : aux confins de l’électro, il joue des notes qui ressemblent à une voix voïcodérisée, pour un moment surprenant, très proche du scat.

Les sourires des musiciens traduisent un bonheur sincère d’être là : comme pour remercier le public, le Boss s’offre un bain de foule, s’accompagnant d’un simple melodica. Ultime cadeau au public, il invite l’excellent guitariste Jimmy Burns à le rejoindre sur scène pour un dernier morceau 100% Chicago ! La grande classe, tout simplement…

Cigar Box Guitar

Preuve s’il en est de la richesse de ce festival, Bain de Blues invite aussi le public à (re)découvrir la Cigar Box Guitar dans un stand spécialement dédié à cet instrument hors du commun (des guitares fabriquées avec des boites de cigares qui font office de caisse de résonance). On profite de la pause pour écouter Olivier Pinson aka Tinqui8 nous expliquer l’origine de cette guitare rectangulaire à la musicalité si particulière. Il nous explique avec passion les différents types d’instruments, qui peuvent être constitués d’un nombre de cordes variables. Nous avons même le droit à quelques titres joués par Tinqui8 à la Cigar Box : son blues a des allures de punk et on a notamment le droit à une reprise torturée de Depeche Mode. Une belle découverte qu’on vous invite à découvrir sur son site jellyguitare.com pour en savoir plus sur la Cigar Box Guitar et sur cet artiste passionné.

Monkey Junk

La fin de soirée s’annoncait prometteuse avec le trio originaire d’Ottawa, les Monkey Junk, qui fait actuellement un carton au Canada. Depuis trois ans, ils raflent tous les prix des festivals de blues, et on les attendait avec impatience, afin de voir s’ils étaient à la hauteur de cette réputation flatteuse. Première surprise, pas de bassiste : R.L. Burnside et Hound Dog Taylor n’en avaient pas non plus mais c’est toujours un sacré pari. Pari réussi dès les premières notes : Steve Marinner balance des riffs rythmiques bien sentis, accompagné par le très carré Matt Sobb à la batterie. La voix de Steve est très agréable, et se marie parfaitement avec le blues métissé proposé par le trio.

Il y a, en vrac, une bonne dose de boogie, des passages parfois plus soul, parfois plus folk, mais le tout est surtout marqué par une empreinte rock très forte. Et le jeu virtuose du guitariste Tony D n’y est pas étranger : il s’avance d’ailleurs à plusieurs reprises au devant de la scène, tel un guitar hero (et il en a largement l’étoffe !). Ce groupe vient seulement de sortir son deuxième album, To Behold, mais ces musiciens expérimentés nous offrent un set impeccable et maitrisé de bout en bout. Un final en beauté pour un festival réussi.

L’affiche était, certes, alléchante, mais la réussite de ce festival est aussi liée à une organisation sans faille : l’équipe des bénévoles est composée de passionnés, et ça se sent. Mais ce qui nous a le plus surpris, c’est la qualité d’organisation des concerts : il n’y a aucun temps mort, le son est parfait, et les jeux de lumières sont à classer dans la catégorie « modèle du genre » : ces lumières mettent véritablement en valeur les artistes, pour le plus grand plaisir des spectateurs… et des photographes !
Un festival qui n’est pas réservé aux puristes du genre car il sait faire une large place aux différents courants qui constituent le blues actuel. Inutile de vous dire qu’on sera présent pour la 7ème édition !

Un grand merci à Patrick Lecacheur et à toute l’équipe de Bain de Blues pour leur accueil chaleureux.

Photos : Yann


Site de Bain de Blues

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