[Dossier] Panorama de la musique islandaise (1/3)

On appelle ça une transition capillotractée. Ou un prétexte : notre dernier article faisait état de l’unité de lieu entre une pochette de CD de Tiny Feet, un clip de PNL et un autre de Justin Bieber. Or ce lieu se trouve être Sólheimasandur, en Islande, pays qui musicalement parlant est bien plus qu’un décor pour clip de chanteur à pré-adolescentes. Ce qui nous amène tout naturellement, ou presque, au thème de ce dossier : la production locale méritant largement un petit tour d’horizon, voici donc un panorama de la musique islandaise.

Björk

Même si la tête de gondole de la musique made in Iceland a déçu les bretons par son comportement pour le moins cavalier à l’égard des organisateurs et des festivaliers de La Route du Rock, Björk n’en reste pas moins une artiste à part. Après avoir sorti son premier album à 12 ans, puis officié dans quelques groupes dont les Sugar Cubes qui commencèrent à la faire connaître hors de l’Islande, Björk se révèle en solo avec « Human Behaviour » en 1993, dont le clip pseudo-enfantin est signé d’un certain Michel Gondry (Eternal sunshine of the spotless mind…)

L’hyper-créative islandaise, qui a aussi le talent de savoir s’entourer de la crème de l’electronica du moment (Nellee Hooper, Mark Bell, Matmos, Console, Matthew Herbert…) signe ensuite « Hyperballad » et quelques autres singles figurant dans son second album « Post ». L’album « Homogenic », à la qualité plus… homogène, enfonce le clou avec des titres comme « Joga », qui marient électronique et émotion à la perfection :

https://www.youtube.com/watch?v=3ahhieWx7vc

Un passage au cinéma en tant qu’actrice dans « Dancer in the dark », éprouvant pour la chanteuse (pour cause de Lars Von Trier à la direction d’acteurs), nous laisse également son unique B.O. de film, « Selma Songs », dont un duo déchirant avec Thom Yorke (Radiohead) :

Tout en conservant un univers immédiatement reconnaissable, Björk réussit le tour de force de se renouveler à chaque album: ambiance clochette et tintements avec « Vespertine », rythmiques saturées avec « Volta », harmonies vocales avec « Medulla »… Et ainsi de suite jusqu’au dernier album en date, « Vulnicura », évoquant sa rupture avec son mari, et dont la tournée associée, qui passait par la route du Rock 2015 dont elle était la tête d’affiche, fut brutalement interrompue à dix jours de sa prestation au fort de Saint-Père pour cause de « je ne veux plus chanter ces chansons ». Quand on est une diva, on ne se refait pas.

Emiliana Torrini

Emiliana Torrini est bien islandaise, comme son nom ne le laisse pas présager, mais née d’un père italien. Elle a connu un certain succès international lors de la sortie de son troisième album « Love in the Time of Science », le premier à être distribué hors de son pays. Dans un registre pop au sens large, Emiliana Torrini couvre néanmoins une palette assez large, allant d’une pop électronique / trip-hop (album « Love in the Time of Science »)…

…à des ballades acoustiques proche du folk (album « Fisherman’s woman »)…

…voire un peu de tout à la fois (album « Tookah »). Les Rennais ont pu entendre sa voix enjôleuse à l’Ubu en 2009.

Asgeir

Asgeir est un chanteur à la carrière encore courte, puisqu’il est apparu sur la scène locale en 2012, et qu’il n’a qu’un ou deux albums à son actif, selon que l’on compte le nombre d’albums de musiques originales ou celui d’albums de textes originaux. En effet, après le gros succès de son premier disque dans son pays, coécrit dans sa langue natale avec son père (célèbre poète islandais), Asgeir sort un deuxième album à l’international constitué des chansons du premier album avec des textes réécrits en anglais. Chantant principalement en voix de tête, son style musical pioche aussi bien dans le folk que dans la pop électronique, à l’instar de sa compatriote Emiliana Torrini. Un nouvel album est annoncé pour mai prochain, dont le premier single intitulé « Unbound » laisse entrevoir une tonalité assez électronique.

GusGus

Déformation du mot couscous issue d’un film de Fassbinder, GusGus est à l’origine un collectif islandais formé par des artistes rencontrés sur le tournage d’un court métrage, dont fit partie pendant un temps Emiliana Torrini. Son effectif mouvant s’est par la suite réduit à un nombre congru de musiciens. Après un premier album éponyme paru en 1995, GusGus est repéré par 4AD, label phare des années 80/90 (Pixies, Cocteau Twins, Dead Can Dance ou plus récemment Tindersticks) sur lequel il en ressort en 1997 une version remaniée intitulée « Polydistortion », qui reste certainement l’une des productions les plus intéressantes de la formation, avec des titres phares comme « Believe ».

https://www.youtube.com/watch?v=-906AoxuqTg

Le style de GusGus, entendu par les bretons à la Route du rock en 1997 puis 1999, se caractérise par une musique électronique plutôt dansante et enjouée (on pourra penser à Swayzak), misant sur des sons chauds typiquement analogiques. Si le groupe a pu pâtir un peu du départ de la chanteuse Hafnis Huld, dont la voix claire enchantait quelques titres tels que « Superhuman » issu de leur second album « This is normal », le groupe a plutôt bien conservé son esprit d’origine et continue de produire des albums régulièrement, dont certains de très bonne facture (« Arabian horse »)

Retrouvez la suite de ce dossier dans la seconde partie

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