Austra, Paon et Diana @ l’Antipode, revival pop dans le vent ou eighties electro pop

Austra @ Antipode MJC - Novembre 2013 - Alter1fo  1 On va souvent à l’Antipode. Et des soirs comme ce vendredi soir, on est étonné de voir qu’une nouvelle fois, le public qui est là est en grande partie différent des autres soirs. Il est frappant de voir qu’une salle parvient à faire venir des publics aussi différents (on pense au public de Savages qui n’a rien à voir avec celui de ce soir,  ou même avec celui d’Actress, de Sexy Sushi, et encore moins avec celui de Casey ou des Thee Oh Sees, totalement différents eux aussi l’an dernier). On aimerait que parfois ces publics se réunissent, mais il nous semble que seule une poignée d’irréductibles mêle les genres et les styles avec un plaisir et une curiosité égale. En cette époque, qui semble moins sclérosée en apparence, où tout le monde explique écouter « de tout », on se demande quand même où sont ceux qui vont en concert « de tout » , les limites financières ne nous semblant pas tout expliquer…

Ce soir, c’est donc plus la curiosité que l’adhésion sans limite qui nous a fait venir. Aussi, à la différence d’une sacrée tripotée de fans d’Austra qui va ce soir vivre le moment avec une délectation qui fait plaisir à voir, nos impressions seront plus mitigées. En résumé, les fans auront adoré. Les autres…

Diana @ Antipode MJC - Novembre 2013 - Alter1fo 1Auteur du lp Perpetual Surrender sorti sur Jagjaguwar en août dernier, Diana est composé de Paul Mathew (Hidden Camera) barbu longiligne à la guitare ou à la basse sur la gauche de la scène, Joseph Shabason aux claviers et au saxophone à son opposé, Kieran Adams et sa chemise fleurie aux percussions souvent électroniques caché dans le noir en arrière fond et de Carmen Elle, devant lui, t-shirt noir, collier de grosses perles et tatouages colorés au chant et parfois à la guitare.

Percussions électroniques très typées eigthies, synthés venus tout droit de la même époque, voix éthérée, mâtinée parfois de soli au saxophone, Diana joue une sorte de soft electro pop aux accents parfois baléariques ou chillwave. Si l’on reconnaît à l’ensemble un certain talent pour la composition et un réel soin porté aux arrangements, ainsi qu’une exécution sans faute, on peine pour notre part à accrocher. On n’a jamais aimé la soupe, fût elle épicée d’intéressantes textures. A l’inverse, autour de nous , le public venu en nombre ce soir pour Austra semble pleinement apprécier.

Diana @ Antipode MJC - Novembre 2013 - Alter1fo 7

Mais si l’electro pop du quatuor de Toronto, pleine de dégoulinades eighties peine à nous convaincre, leur simplicité dans leur rapport avec le public, l’humour dont ils ponctuent leurs interventions entre les morceaux sont particulièrement appréciés.

Ils font ainsi rire tout le monde en avouant ne pas avoir de cds en vente à la fin du concert… Parce qu’ils les ont oubliés sur la date précédente, à Bordeaux. Et ce qui est encore plus ballot, c’est qu’ils ont également oublié… leur ampli basse (qui a déjà transporté un ampli basse sait que de par son poids et son volume, l’engin est difficilement oubliable !)

Au final, l’humilité et la gentillesse dont le quatuor fait montre sur scène font plaisir à voir et nous font malgré tout passer un moment agréable. Le public quant à lui, est en partie conquis.

Paon @ Antipode MJC - Novembre 2013 - Alter1fo  12Changement de style avec Paon, quatuor tout aussi adorable qui arrive sur scène. Autrement dit quatre joyeux lurons amoureux en diable des mélodies venus tout droit de Belgique.

Fondé par Ben Baillieux-Beynon (The Tellers) à la guitare -et un peu à la basse- à gauche de la scène et Aurelio Mattern (Lucy Lucy) aux claviers (avec aussi un peu d’harmonica et de guitare sèche) à droite, Paon sur scène est accompagné par Leo (qui a aussi son grand-père dans la salle) à la batterie  et Jérémy à la basse (ou à la guitare) au centre. Mais aussi par un paon métallique, figurine scotchée sur les claviers qui étincelle dans les lumières !

De la pop, un peu rock,  avec des arrangements astucieux, menée tambour battant par quatre drilles qui prennent autant de plaisir à jouer/être ensemble que de partager leurs morceaux avec un public curieux (certains semblent également venus juste pour les voir).

Il faut dire que Paon trousse ses chansons comme d’autres enfilent des perles. Avec une déconcertante facilité. De la pop sans prise de tête qui se révèle en refrains chantés à tue-tête et ponts efficaces en passant parfois par quelques sonorités rétro sixties. D’aucuns, qui les ont vus aux Trois Eléphants à Laval, nous ont d’ailleurs dit en avoir été tout retournés et attendre avec impatience de revoir le quatuor belge par ici (on a même entendu plus loin que Paon était l’une des révélations de la dernière édition du Dour Festival).

Paon @ Antipode MJC - Novembre 2013 - Alter1fo  2Auteur d’un premier ep sorti cette année, Shine over me, Paon s’est en effet déjà forgé une réputation scénique pleine de générosité. Ça ne se dément pas ce soir puisque les quatre drôles enchainent les morceaux avec une énergie aussi débordante que souriante, aidé par un batteur aux roulements et aux rebondissements malins qui nous convainc immédiatement.

Ben Bailleux-Beynon porte un t-shirt des voisins BRNS et si la musique de Paon se fait moins dissonante et aventureuse que celle des BRNS, Paon partage avec eux cette générosité et cet amour des mélodies efficaces, tel ce Keep on burning commencé à toutes burnes à la guitare sèche, qui après l’intro, se transforme en véritable bombinette fort sympathique.

On apprécie également les détours en territoire surf sur ce morceau instrumental en première partie de set, particulièrement rafraîchissant.

La salle, pourtant a priori en majorité plus emballée par les sonorités eighties, ne boude pas son plaisir et applaudit avec fougue ces quatre garçons dans le vent.

Ce qui augure d’un joli succès pour leur retour par ici. Paon reviendra en effet cet hiver à Rennes, puisqu’ils sont programmés aux Bars en Trans. Fort à parier qu’ils réchaufferont tout aussi bien les premiers jours de décembre avec leurs refrains espiègles et futés.

En conclusion, si les compositions du quatuor restent un peu trop sages à notre goût, le moment est sympathique et chaleureux.

Paon @ Antipode MJC - Novembre 2013 - Alter1fo  5

Austra @ Antipode MJC - Novembre 2013 - Alter1fo 16Le changement de plateau prend du temps. Il faut dire que les Canadiens d’Austra se déplacent avec une tripotée de lampes/ombrelles et une immense toile aux montagnes bleutées pour décorer la scène qui, une fois les instruments et micros en place, prennent un peu de temps à être installés.

Qu’importe, le public, ce soir, est venu en masse pour Austra et se moque bien d’attendre. Aussi quand le quatuor entre sur scène, accompagné par Joseph Shabason sur quelques morceaux à la flûte ou au saxophone, les applaudissements et les cris éclatent.

Il faut dire que les Canadiens d’Austra, donc, rassemblés autour de Katie Stelmanis, ont su s’attirer de positives dithyrambes dès la sortie de leur premier album. Mené par une leadeuse à la formation classique (au sens opéra, piano, chant lyrique, Puccini et on en passe), tombée plus tard dans la marmite Rrrrriott Girl (son précédent groupe, Galaxy), Austra est parvenu à se créer une réelle identité en deux albums.

Après un Feel it break (2011), caverneux et sombre, plutôt goth on the dancefloor, Austra a pris une direction un brin plus lumineuse, moins catacombe, avec Olympia (2013), non plus seulement composé par la miss Stelmanis, mais par le groupe en son ensemble (du moins avec Maya Postepski -batterie, programmation- et Dorian Wolf -basse- pour commencer).

Sur scène, on retrouve donc les trois compositeurs, Maya Postepski, en hauteur derrière ses machines et ses lunettes blanches, Dorian Wolf légèrement sur la droite à la basse et Katie Stelmanis au chant et aux claviers, mais également Ryan Wonsiak, cheveux courts peroxydés en short aux claviers et sporadiquement, donc, Joseph Shabason sur quelques morceaux à la flûte ou au saxophone.

Austra @ Antipode MJC - Novembre 2013 - Alter1fo 8Juchée sur ses (très hautes) semelles compensées la fluette miss Stelmanis en habit de lumière captive les regards.

Pourtant son plus qu’excellent bassiste en a également à remontrer, tout comme derrière, Maya Postepski derrière ses machines. Le concert commence plutôt midtempo, mais le public se retrouve vite catapulté sur le dancefloor avec un Painful Like (avec une vraie flûte, cher attentif lecteur) et son intro tout en groove retenu et Forgive me à la basse addictive (mais quel bassiste, ce Dorian Wolf !).

A côté de nous, une palanquée de fans chantent de concert avec Katie Stelmanis, qui monte dans les aigus avec fluidité, notamment sur The Choke qui suit. On est moins emballé par les notes plus basses, davantage criées que chantées, nous semble-t-il (cela dit, le son particulièrement fort nous empêche de savoir si c’est un effet de nos oreilles saturées ?).

Austra @ Antipode MJC - Novembre 2013 - Alter1fo 12Katie Stelmanis est, comme Carmen Elle en première partie, une chanteuse à mains. Elle les agite continuellement autour de son visage ou les lève tels des paravents mystérieux.

Elle avance ainsi fréquemment sur le devant de la scène, à peine éclairée, en mimant l’intensité de son chant, levant le visage ou le dissimulant. Si on n’est a priori pas fan de ce genre d’effets de manche, la miss Stelmanis a l’air de le faire avec suffisamment de sincérité pour que cela ne nous énerve pas outre mesure.

On hésite donc. D’un côté, on est irrité par ce côté eighties trop appuyé, pas pour le meilleur, ainsi que par cette façon de jouer un peu trop emphatique. De l’autre, on reconnaît qu’Austra est loin de proposer une simple resucée eighties et que les structures des morceaux sont souvent intéressantes (la torch song Home qui se transforme subitement au refrain en hymne house). Certains titres sont même particulièrement prenants en live (Loose it, ou Beat and the Pulse par exemple, sont de vraies réussites). Le set est aussi particulièrement en place, intelligemment équilibré, l’exécution souvent impeccable (on en remet une couche mais quel bassiste !), les effets visuels réussis (ces lampes-ombrelles changeant de couleur sont vraiment chouettes) et la Miss Stelmanis est même touchante d’une certaine manière.

Austra @ Antipode MJC - Novembre 2013 - Alter1fo 13D’autant qu’une fan soit particulièrement transie soit particulièrement éméchée, voire les deux, a décidé qu’il fallait à tout prix que Katie Stelmanis lui prenne la main. A chaque avancée de la chanteuse sur le bord de la scène, elle lui caresse donc la cuisse (!) de manière insistante (voire carrément pénible et insultante, on doit le dire), faisant aller et venir sa main sur le collant sombre de la Canadienne.

A ses voisins plus ou moins interloqués, la demoiselle avance un pari en guise d’explication pour son insistance plus qu’un brin déplacée. Certains rient. On sera pour notre part plus critique. Pari ou pas, personne ne mérite ce genre de traitement. D’autant qu’après une trentaine de tentatives infructueuses (oui, c’était à ce point) la jeune femme se décide alors à sauter pour attraper la main de l’artiste au dessus d’elle, risquant de lui faire perdre son micro. La chanteuse reste pourtant de marbre, concentrée et ne pipe mot jusqu’à une caresse de trop, complètement déplacée : entre deux paroles, elle crie out, excédée. Seuls les témoins devant auront compris à qui s’adresse ce cri excédé et plus loin, personne n’aura rien remarqué, la preuve que Katie Stelmanis est une sacrée show-woman. (Ce qui ne découragera pas la jeune femme qui bondira sur la scène avant le rappel pour suivre la musicienne dans les coulisses, avant d’être fort heureusement arrêtée par la sécurité).

Au final, on ressort donc de là bien embêté, mi-figue, mi-raisin, sans réussir à nous enflammer vraiment pour cette synth-pop un chouïa trop emphatique. Et cela a contrario de la majorité de la salle, complètement emballée par la prestation. Les fans auront adoré. Les autres restent plus dubitatifs…

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