Quand la gynécologie brise les frontières : rencontre avec GSF

Nous connaissons toutes et tous « Médecins sans frontières » mais sommes peut-être moins nombreu(ses)(x) à appréhender le travail de « Gynécologie sans frontières ». Cette ONG, forte de 350 adhérent(es)(s) et qui vient de fêter ses 20 ans d’existence en 2015, se spécialise dans les missions d’urgences gynécologiques et dans l’aide au développement sanitaire à l’étranger. En France, elle intervient également à la prise en charge des femmes ayant subi des violences et à la formation de volontaires-bénévoles à la gynéco‐obstétrique humanitaire. Avec un champ d’action de plus en plus varié et élargi depuis sa création, « les problèmes abordés concernent ainsi la périnatalité, les souffrances médicales, les violences conjugales ou sexuelles, les discriminations de toutes sortes ou encore le statut de la femme au sein de la société » nous rappelle son vice-président, Richard Matis.

En octobre dernier, une proche connaissance qui nous avait alertés sur le mouvement social mené par les Sages-Femmes en 2014 ►à lire ici◄ nous informait qu’une nouvelle session se tenait justement à la clinique de la Sagesse, à Cleunay. L’occasion pour nous de rencontrer et dialoguer avec Jean Vialard, membre actif de l’ONG qui revenait de sa dernière mission au Togo.

©Copie écran – http://gynsf.org/

Même si cela n’est pas un hasard que de choisir la gynécologie-obstétrique comme profession ou une clinique mutualiste pour l’exercer, Jean Vialard ne se décrit pas uniquement comme féministe mais bien comme un humaniste. « Avoir un peu d’humanisme dans son cœur est important, surtout aujourd’hui dans un monde où la violence s’aggrave et devient insupportable. »  Depuis plus de deux ans déjà, ce-dernier a donc choisi de donner de son temps à l’association. 

Jean Vialard : « L’association défend toutes les femmes dans toutes leurs dimensions. En France comme à l’étranger, leurs droits restent fragiles. Cette égalité Homme/Femme est importante mais j’irais même plus loin, l’égalité Nord/Sud l’est tout autant. Je me suis investi dans cette association car ses actions humanitaires sont très axées sur l’écoute. Cela peut se traduire un peu comme du compagnonnage… »

Loin de l’image de MSF avec leurs des tentes, leurs personnels et leurs matériels, GSF n’est pas là pour se substituer mais bien pour accompagner et former les personnels des pays bénéficiaires. De Calais au Togo, de Zaatari en Syrie(1) à Madagascar en passant par Haiti, GSF intervient dans des pays où les infrastructures sont insuffisantes, voire inaccessibles. Par contre, elle n’agit jamais de son propre chef. Elle répond à des demande issues du monde hospitalier, parfois politique et uniquement après un réel travail en amont pour valider la mission, son périmètre et le programme. GSF intervient soit en fonds propre, soit en partenariat avec d’autres ONGs généralistes : chaque mission est ainsi votée par le conseil d’administration et réévaluée chaque année. Une grande difficulté récurrente est selon Jean Vialard de pouvoir s’appuyer sur des gens de confiance sur place et de passer outre une corruption qui gangrène parfois certains pays étrangers : « Il faut vraiment cadrer les choses pour ne pas se faire avoir. Certains médecins font appel à nous et, une fois formés par nos équipes, s’en vont trouver un travail ailleurs mieux rémunérés. Il ne faut pas être dupe… »

© Copie écran francetvinfo.fr

Mortalité maternelle (830 femmes environ meurent chaque jour de causes évitables liées à la grossesse et à l’accouchement, selon l’OMS), mutilations sexuelles féminines et pratiques traditionnelles néfastes (100 à 140 millions de filles et femmes ont subi des mutilations sexuelles dans le monde selon une étude rendue publique par l’Ined), mariages forcés, fœticides et infanticides basés sur le sexe féminin, la liste est trop longue pour être exhaustive et on prend conscience de l’ampleur de la tache. Pour réaliser ses missions avec l’aide de bénévoles, deux fois par an, GSF organise une formation de cinq jours à destination des gynécologues obstétriciens, sages-femmes, internes, médecins désireu(ses)(x) de s’investir dans des projets humanitaires concernant la santé des femmes dans le monde. La dernière s’est donc tenue en octobre dernier à Rennes.

Jean Vialard « Les gens s’imaginent un certain nombre de choses. On tente alors durant 5 jours de leur faire comprendre la logique humanitaire et de leur expliquer la réalité du terrain en n’éludant aucun aspect. Les bénévoles risquent de se voir confronter à des drames, il faut les préparer notamment sur certaines prises en charge chirurgicale très peu connues ici, en occident, comme la fistule obstétricale. Généralement, je ne conseille pas aux jeunes de partir tout de suite. Moi-même, j’ai vu des choses très difficiles, d’une grande violence que ce soit à l’international ou même à Calais. Nous faisons donc appel à plusieurs intervenants, à plusieurs associations afin que chacune et chacun puisse apporter leurs témoignages, leurs propres expériences. Un manque de préparation en amont peut engendrer des erreurs sur place et un retour difficile… »

Une vingtaine de participant(e)(s) vont donc repartir avec un solide bagage et de nouveaux outils à la suite de cette semaine de formation. Quand certain(e)(s) préféreront attendre encore avant de faire le grand saut, d’autres ont déjà des projets en tête pour cette nouvelle année 2017. L’Humanitaire se vit aussi de manière personnelle.

***

(1) Du 26 août 2012 au 8 septembre 2013, GSF a organisé 19 missions composées d’équipes de 7 à 9 personnes soit plus de 100 médecins, sages-femmes et pompiers.

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 PLUS D’1FOS : 

http://gynsf.org/

Migrantes : le cri d’alarme de Gynécologie sans frontières – France Info

Bilan de Gynécologie Sans Frontières à Calais … – France 3 Régions

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