Le festival rennais Maintenant investissait le Triangle dans le quartier du Blosne dimanche 9 octobre 2016. On y a joué avec les kaplas extraterrestres de Bloom games, vu les galactiques acrobaties de Ljós de la compagnie Fuse, mené un orchestre de robots au doigt et à la jambe, fait de la musique avec des tablettes et des films avec des morceaux de bois et enfin admiré un orchestre de bambins équipés de smartphones. Un dimanche chouettement pas comme les autres.
On avoue avoir une inclinaison toute particulière pour les propositions « de 7 à 77 ans » du festival Maintenant. Pas seulement parce que nos alter-zouzous sont d’inconditionnels fans, mais aussi parce qu’il y règne toujours une effervescence et une jubilation assez communicative. D’expérience, nous savons que pour ce genre d’événement organisé un dimanche après-midi, il vaut mieux ne pas arriver trop tard si on veut pleinement en profiter. Nous précipitons donc un peu le repas dominical pour débouler en famille dès 14h30 au centre culturel du Triangle.
Si la grisaille est dans le ciel et sur la façade un peu austère du lieu, d’éclatants kaplas roses égayent le parvis. Les habitués du festival commencent à bien connaître le gigantesque jeu de construction Bloom Games, imaginé par Alisa Andrasek et José Sanchez et mis au point par une belle brochette de designers de tous pays. Les 2 800 (?!) morceaux de plastique (recyclable) rose malabar de 40cm de long sont étalés sur un vaste praticable bleu et les plus enthousiastes des zouzous se sont déjà attaqués à l’édification de créatures bizarroïdes, fleurs psychédéliques, cabanes extraterrestres, ponts délirants… Pour notre part, on laisse nos pitchounes en profiter pour filer derechef dans la grande salle de spectacle.
Ballet céleste avec écran et baudrier
Nous y attend en effet la première représentation de la journée de Ljós (lumière en islandais) par le collectif d’artistes italiens Fuse*. L’écran de fond de scène affiche une évocatrice nuée d’étoiles accompagnée par un doux vrombissement ponctué de craquements électriques. L’obscurité se fait, les astres se mettent en mouvement et nous offrent un big bang assez spectaculaire. Elena Annovi suspendue dans les airs par un fil descend alors et s’interpose entre les projections et les spectateurs. De l’interaction entre une musique électronique riche en subtiles variations, les mouvements aériens extrêmement maîtrisés de la danseuse-acrobate et les animations vidéos très élégantes va naitre un ballet assez somptueux. Très ramassé (il ne dure qu’une vingtaine de minutes), le spectacle tire une grande force graphique de l’influence de l’humain sur les visuels. Images et corps se repoussent, s’attirent, s’agressent à grand coups de lames vectorielles, tourbillonnent ensemble… dans un très beau moment de poésie numérique. Le tout pourrait être très froid et très abstrait. Sauf que la présence très forte de cette danseuse, à la fois perdue dans l’immensité de la toile et très présente par sa virtuosité physique, rend la prestation extrêmement vivante.
Des 0, des I… et de la musique
Pendant nos galactiques émois, nos bambins ont écumés les différents ateliers proposés sur place avec une grande gourmandise. Ils se sont improvisés chef d’orchestre d’Ork1, Septuor pour corps en mouvements d’Alexandre Bertaud, Un capteur y transforme les mouvements d’une personne en une pièce de musique jouée par sept étonnantes machines. Entre cordes et percussions boisées, le rendu sonore est très apaisant et l’on prend un malin plaisir à rester écouter les différentes prestations des meneurs aux styles très variés.
Nous retrouvons ensuite avec joie l’outil Pas à Pas qui permet en toute simplicité de créer de courts films d’animation où s’ébattent des pièces de bois colorées tout droit échappées du Tétris. Fort de leurs expérience de l’an dernier, nos loulous ont gagné en patience et leurs réalisations en fluidité.
Nous restons aussi un bon moment à l’atelier Explorer le son où quatre tablettes équipées de casques vont nous permettre de tester une foule d’applications musicales. On y manipule avec délectation un orchestre de bestioles survitaminées et une chorale d’animaux danseurs. Celle qui nous tape le plus dans l’oreille nous permet de créer des dessins en manipulant des formes géométriques tout droit sorties d’un tableau de Miró en interprétant musicalement leurs évolutions avec une gamme sonore assez impressionnante. Si quelqu’un a retenu le nom de ce merveilleux bidule, on est preneur.
Orchestre symphonique tactile
Il est temps d’écouter le SmartMômes Orchestra alias une classe d’élèves de l’école Volga maniant portables ou tablettes équipées d’une appli liant mouvement à la création de son. Le projet a été accompagné par Mikel Iraola, intervenant du conservatoire au délicieux accent basque et de l’artiste Bertùf (dont on apprécie beaucoup les machines bricolées à l’aura mystérieuse). Le sérieux des deux chefs d’orchestre n’a d’égal que celui des élèves et toute la bande s’applique avec un soin particulier à produire des mélodies abstraites mais délicates. Ca manque un peu de volume et le hall bondé du Triangle est forcément un peu bruyant mais l’ensemble est riche et très plaisant.
La foule dense s’étant emparée du Triangle en ce dimanche concrétise le succès d’un après-midi numérique, ludique et poétique très réussi. Pour nous cela sonne aussi comme une épatante mise en bouche avant les réjouissances du Super Week-end ! des 15 et 16 octobre prochain au Cadran. Le rendez-vous est en tout cas d’ors et déjà dûment noté dans nos calepins.
Maintenant 2016 a lieu du 7 au 16 octobre 2016. Plus d’1fos.