Alter1fo vous propose de (re)découvrir la scène musicale rennaise à travers une chronique, hebdomadaire le plus souvent. Des talents émergent, d’autres confirment sur la scène locale. Certains les soutiennent, sortent leurs disques, d’autres leur proposent des lieux de concert, de répétition… Alter1fo donne un coup de projecteur à ces artistes, labels, lieux ou assos qui œuvrent d’arrache-pied pour que la scène locale existe. Permettre aux acteurs et aux publics de se rencontrer, donner la parole à ceux qui font la vie rennaise, tels sont nos buts avoués. Chaque semaine, vous retrouverez donc un ou plusieurs focus sur l’un de ces acteurs…

Et bien voilà, à l’écoute du nouvel album de Psykick Lyrikah, on a pris une grosse claque. On le savait pourtant, Psykick Lyrikah transpire le talent. Et ce nouvel uppercut sur nos platines n’est pas le premier de leur part. Chacune de leur sortie a, à chaque fois, marqué nos oreilles de leur trace.

Petit rappel des faits : en 2001, Arm rappe sur les scratchs de Dj Remo avant d’être rejoint la même année, par Mr Teddybear et ses instrumentaux.  Après une première street tape, Lyrikal Teknik en 2003, et de très belles dates, DJ Remo quitte l’aventure et c’est Robert Le Magnifique qui se charge des scratchs. Repéré par le label Idwet (retrouvez l’interview d’Idwet ici), Psykick Lyrikah sort son premier disque, Des lumières sous la pluie en 2004. Juste avant la fin de l’enregistrement, le groupe rencontre Olivier Mellano qui vient poser ses guitares sur trois titres. A la sortie, le succès auprès du public et de la critique se confirme avec des lives qui font souvent l’unanimité. Olivier Mellano a d’ailleurs rejoint le groupe pour les prestations live : la musique du combo jette des ponts entre hip hop, électro, rock et post-rock. En parallèle (on est en 2004), Arm retrouve Robert Le Magnifique pour le spectacle de théâtre multimédias Hamlet (mis en scène par David Gauchard et produit par la compagnie L’unijambiste). Il continuera d’ailleurs cette collaboration avec la compagnie L’unijambiste pour le théâtre ciné-concert Richard III (à partir de 2009).

Psykick Lyrikah travaille ensuite sur un second album, plus rap. Mais entre temps, Arm s’est produit avec Olivier Mellano dans une formule guitare-voix pour quelques dates. Encouragé par Dominique Brusson (ingé son de Dominique A, entre autres), le duo enregistre trois jours une formule studio live. Ce sont finalement les enregistrements de ces sessions qui constitueront la matière du deuxième album, Acte, sorti en 2007. L’album plus rap qui était en préparation, Vu d’ici, attend donc 2008 pour sortir. Pour la première fois, Arm a pris en main la quasi totalité des musiques de l’album, même si Olivier Mellano et Robert le Magnifique restent présents. Laetitia Sheriff, Gaël Desbois, Dominique A et Iris, le rappeur parisien, apportent également leur collaboration. Arm continuera d’ailleurs son travail avec Iris avec la sortie d’un album commun Les courants forts en novembre 2010.

Derrière moi, donc, nouvel album uppercut, est sorti le 6 avril et sera présenté au public rennais ce vendredi 22 avril à l’Ubu lors d’une soirée spéciale avec 3 concerts à suivre (Iris & Arm, Arm & Olivier Mellano et enfin Psykick Lyrikah formule trio avec Arm, Olivier Mellano et Robert le Magnifique). On a hâte d’entendre comment l’énergie et la puissance musicale de ce nouvel opus se déploieront en live. En attendant, on laissera cet album faire le chemin jusqu’à vos platines. On sait d’ores et déjà qu’il tournera encore longuement sur les nôtres.

Alter1fo : Pour les gens qui ne te connaissent pas, comment peut-on présenter le projet Psykick Lyrikah ?

Arm : Tout simplement comme un groupe de rap, même si c’est toujours un peu compliqué, puisque depuis les débuts, le projet s’est transformé plus ou moins en un projet quasi solo. Mais je reste entouré des amis habituels : Olivier Mellano et Robert le Magnifique en tête. Sinon je suis auteur, rappeur, et compositeur.

Ton nouvel album sort ce mois-ci. Quelles étaient tes envies avec ce nouveau disque ?

J’avais envie de casser certains codes amenés avec les albums précédents, notamment le côté « rock/guitare électrique » ou un peu plus « pop » vers lequel j’avais pu m’aventurer. Je suis très fier de tout ça, mais au moment de me pencher sur un nouveau disque, je savais qu’il fallait que je me mette un peu en danger, et surtout que je me fasse plaisir. Le fait d’avoir écouté énormément de rap américain pendant l’écriture de l’album a sans doute beaucoup joué.

Cette fois-ci tu as pris en charge l’intégralité des musiques et des paroles, à part une collaboration sur un morceau avec Iris et une autre avec Tepr. Pourquoi cette envie de tout faire tout seul cette fois-ci ?

C’était aussi le cas sur « Vu d’ici », l’album précédent en 2008, mais j’avais invité plus de monde. J’ai trop d’idées précises en tête pour déléguer des choses, donc cela simplifie la démarche. J’ai tout écrit et composé enfermé chez moi, ce n’est que lorsque tout a été enregistré que j’ai commencé à faire écouter des choses aux proches.

Sur l’un des communiqués accompagnant l’album, il est expliqué que pour ce nouveau disque tu t’es imposé un dogme à suivre : « l’absence d’instruments acoustiques ou électriques » . Tu nous expliques ? Pourquoi ce choix d’instrumentaux uniquement synthétiques ?

Ça rejoint ce que je disais à propos des envies du nouveau disque : la volonté de créer quelque chose de neuf et de changer la couleur de l’ensemble. Je n’ai pas envie de cuisiner toujours la même recette, c’est important de changer. Les instruments prennent toujours beaucoup de place, et puis de plus en plus de groupes de rap s’entourent de « vrais groupes » pour que ça sonne plus « live ». Ce truc ne m’intéresse pas. Je voulais que ce soit les machines qui parlent, uniquement.

Ce disque, c’est comme si tu prenais encore une fois un contre-pied, le mot est peut être un peu fort, disons plutôt une autre direction. « J’aime douter de mes propres appuis » . C’est ça l’idée ?

Oui, changer de couleur n’enlève rien au fait qu’on n’est jamais sûr à cent pour cent de la direction qu’on prend, mais ce doute-là est une force.

Comment est-ce tu composes les musiques ?

Très simplement, je ne veux surtout pas être esclave de la technologie, surtout que celle liée à la musique par ordinateur est chère ! Je préfère exploiter au maximum le peu que j’ai, c’est à dire un ordinateur, un logiciel qui s’appelle « Logic Pro », des instruments virtuels et un « pad », c’est à dire une interface tactile qui me permet de « taper » réellement les rythmiques, mais aussi les mélodies. Ensuite c’est au feeling, et j’écris seulement lorsqu’un son est quasiment fini.

D’où vient l’artwork de ce nouveau disque ?

C’est le graphiste et photographe Dan Ramaën, que j’ai rencontré il y a quelques temps via Olivier Mellano. Il a suivi de nombreux projets auxquels j’ai participé, notamment le « Richard III » de David Gauchard, dont il avait signé l’affiche. J’aime beaucoup sa façon de travailler, il est très efficace et aussi très franc dans sa manière de dire les choses, et c’est quelque chose que j’apprécie beaucoup.

J’aime bien que le titre, Derrière moi clôture l’album avec tous les morceaux précédents derrière lui. Pourquoi as-tu choisi d’en faire le titre de l’album ?

C’est surtout lié à l’année de l’écriture du disque, qui a été une année très difficile sur le plan personnel. « Derrière moi », c’est donc ce que je veux laisser, en tout cas ce que j’ai l’impression de laisser, et ça vaut aussi du coup pour le virage musical.

Comment as-tu choisi l’ordre des chansons sur la version finale de l’album ?

Par rapport à l’ambiance générale, au tempo, aux sonorités, mais aussi à ce que ça raconte. Je savais quel seraient les premiers et derniers titres de l’album, je les ai même écrits en fonction de ça. Et au milieu il a fallu composer un peu, mais finalement ça a été simple.

Pourquoi as-tu choisi Reptile [NTM, Assassin, Casey…] pour s’occuper du mixage ?

Parce que j’avais des disques de rap français qu’il avait mixés, et que je trouvais que ça sonnait vraiment. Donc je l’ai contacté ça s’est organisé très simplement. Tout comme Dan Ramaën, Reptile est une belle rencontre et j’espère retravailler avec lui par la suite.

Selon toi, qu’a-t-il apporté aux morceaux ?

Je crois qu’il a surtout apporté une énergie liée au son, une vraie puissance, qui manquait aux albums précédents. Comme souvent la couleur musicale était plus posée, ça ne posait pas forcément de problème, mais c’était sûr que ça n’aurait pas fonctionné avec cet album, il fallait quelque chose de beaucoup plus « patate ».

Si tu devais citer trois disques sans lesquels tu ne pourrais vivre ?

Il y en a trop, et puis j’écoute des styles très différents en fonction des jours et des humeurs… Je dirais un disque de Lhasa de Sela, un disque d’Elliott Smith, et un disque de rap US, lequel, impossible de dire !

As-tu eu l’impression d’avoir des influences musicales différentes pour cet album ?

Oui, j’ai beaucoup écouté de « Dirty South » quand je composais, même s’il était hors de question de copier à la française ce style, ça aurait été ridicule. Encore une fois, c’est plus au niveau de l’énergie générale que ça m’a influencé… Des artistes comme Crime Mob, Three 6 Mafia, Young Jeezy, UGK, T.I, etc, et puis sinon toujours des trucs un peu atypiques et plus pop, comme Sufjan Stevens, ou des trucs de rap plus old school comme Ice Cube, Nas ou Mobb Deep. C’est vraiment très éclaté.

Sur scène, en revanche, est-ce qu’ Olivier Mellano et Robert le Magnifique vont continuer à t’épauler ? Ou bien souhaites-tu aussi passer à une formule solo ?

Non, la formule solo ne m’intéresse pas. J’en teste une à Montréal début mai, et ce sera la première fois, mais pas sûr que j’ai envie de continuer dans cette voie. Pour cet album, on sera trois la plupart du temps. Sur quelques dates Olivier n’a pas pu être là, mais on s’en sort aussi très bien avec Rob.

Vendredi soir, tu es à l’Ubu pour fêter la sortie de l’album. Si j’ai tout compris, il y aura trois concerts différents… Et les trois avec toi ! Peux-tu nous en dire plus ?

Je vais donner trois concerts dans la soirée ! L’album « Les courants forts », qui est un album commun entre un rappeur parisien, Iris, et moi-même. C’est sorti l’année dernière et on ne l’a encore jamais testé sur scène. Ca sera très hip hop, un sampleur et deux micros.

Ensuite on jouera le duo « guitare/voix », avec Olivier Mellano, dont on avait fait un album « Acte » en 2007. Avec de nouvelles compositions évidemment.

Pour finir, il y aura le set live en trio de « Derrière moi » avec Olivier Mellano et Robert le Magnifique. Entre temps la sélection musicale est aussi choisie par l’équipe, donc c’est vraiment une grosse soirée « Psykick Lyrikah + Guests ».

Après cette date à l’Ubu, quels sont tes projets à venir ?

On continue les concerts un peu partout, je pars d’ailleurs à Montréal quelques heures seulement après le concert de l’Ubu ! Et puis on va commencer à se pencher sérieusement sur la suite de « Acte », avec Olivier, et sur un autre album de Psykick avec machines, déjà !

Merci !!

Retrouvez toutes nos interviews-focus sur la scène rennaise ici

(Santa Cruz, La Terre Tremble !!!, Lady Jane, Fago.Sepia, Band of Ghosts, le pôle musiques actuelles du CRIJB, Manceau, Nola’s noise, Wesson Maespro, Get Flavor Records, Idwet, les Disques Normal, Mekah, Dj Netik, La Corda, Eat your toys, Théo Gravil, Simba, Shtok, Spash Wave, Monkey & Bear, Mess Zero, Regïs Boulard, Le Bocal, We only said, Deejay Ober, Makassy, Skap’1, I&A, The Last Morning Soundtrack, Alee, Garbo, Russian Sextoys, Ladylike Lily, Missing Girl, Zaïba, Homecooking, Psykick Lyrikah…)

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Vendredi 22 avril – Ubu – 21h-03h :
Psykick Lyrikah
Arm & Mellano (duo guitare/voix)
Iris & Arm

BONUS : pour l’achat d’une place, l’un des albums de Psykick Lyrikah est offert ! Les 1ers arrivés auront bien sûr plus de choix…

Pour en savoir plus :

http://cd1d.com/fr/artist/psykick-lyrikah

http://www.myspace.com/psykicklyrikah