Gaétan Naël (programmateur de l’Antipode) nous racontait que la première prestation de Yuksek avait eu lieu dans le hall d’entrée de l’Antipode en 2006 pour Cultures Electroni[k]. Depuis, le musicien est devenu l’un des artistes les plus reconnus de la french touch 2.0. Il reviendra à l’Antipode mercredi 9 novembre, comme tête d’affiche cette fois, avec les iconoclastes Mc Luvin mais surtout Civil Civic qu’on n’a aucune, mais alors aucune envie de manquer.
Yuksek, efficacité et virage pop
Il fut un temps où les chapelles musicales ne se mélangeaient pas. Où les rockers haïssaient la techno et les métalleux l’indie pop. Les fans d’indie rock détestaient tous ceux qui écoutaient des artistes français (Dominique A, rappelez-vous, était l’un des rares tolérés) et les popeux méprisaient l’imagerie hard-rock. Bien sûr, ça n’empêchait personne d’écouter ce qu’il voulait secrètement. Mais on était rarement ouvertement fan de Neil Young et de Sylvester (icône gay disco). Rappelons d’ailleurs que les rockers en colère se retrouvèrent dans un stade de Chicago en 79 pour un autodafé de galettes disco. On se souvient d’un temps où les rockers « purs et durs » regardaient la techno dédaigneux, l’air mauvais. Bref, aujourd’hui, tout est différent et beaucoup affichent ouvertement leurs goûts métissés. On ne s’étonne pas que nombre artistes entremêlent les genres, et le « grand » public les suit.
On imagine Yuksek sortant ses deux albums à peine une ou deux décennies avant. Les fans d’électro lui auraient reproché son amour des refrains pop, les indie popeux ses instrumentations synthétiques. Pourtant lors de la sortie d’Away from the sea (2009), porté par un single qui fait le buzz (Tonight) et précédé par un multitude de remixes qui l’ont fait plus que remarquer, Yuksek remporte un succès énorme. Considéré comme l’un des plus dignes héritiers des Daft Punk et Vitalic, le Rémois est à l’origine d’une des plus importantes réussites de la french touch 2.0. avec les Justice.
La recette tient en quelques mots : de l’électro, du rock, de la pop, le tout passé au shaker et boosté par un réel sens de l’efficacité. On ne s’étonne donc pas de la confiance de musiciens d’horizons différents qui viennent régulièrement frapper à la porte de l’artiste trentenaire, qui pour des remixes (M83, Peaches ou Boys Noize avec son pote Brodinski, Lady Gaga, Moby par exemple), qui pour la production d’un album (Birdy Nam Nam avec Manual for successful rioting en 2009).
Avec la sortie de son second album, Living on the edge of time en juin dernier, Yuksek change en partie de direction. Le disque se fait moins électro 2.0 et flirte bien davantage avec l’électro-pop. Des chansons, des mélodies avant tout. D’autant que sur ce nouvel album, Yuksek passe vraiment derrière le micro et assure le chant avec les copains de Reims pour les chœurs (laissant de côté les featurings qu’on retrouvait sur son premier album). Confirmant ce changement de cap, Yuksek ne viendra pas présenter un dj set sur la scène de l’Antipode ce mercredi, mais bien un live, accompagné de « vrais » musiciens. Pour autant, rehaussée par une production plus ample que celle d’une pop plus classique, la musique de Yuksek ne perd rien de son efficacité d’antan et flirte tout autant avec les charts et les bras en l’air sur le dancefloor.
Mc Luvin : entre iconoclasme et synthé électro-pop
Autres amateurs des crossovers musicaux, les deux Mc Luvin ouvriront la soirée pour Yuksek. Le duo de producteurs vient en effet du hip hop (Drixxxé est l’un des producteurs de Triptik et Gystère du groupe de rap Frer200) mais concocte une électro-pop bien vitaminée qui n’a pas peur de l’autotune (mais aujourd’hui, plus personne n’en a peur) et qui devrait se révéler efficace en live. La sortie de leur premier album est prévue pour février 2012 mais le single Animal est déjà disponible. « Animal le tube de l’été et en face B Song For a Friend le slow de l’hiver » , c’est ainsi que le présente le duo iconoclaste avec humour. Car le groupe n’hésite pas à jouer avec le second degré : pour preuve, ces synthés qui dégoulinent sur le slow de l’hiver et flirtent avec une pop eighties du pire acabit. On attend donc avec curiosité de découvrir le duo en live.
Civil Civic : à ne pas manquer !
Mais avouons-le, c’est l’autre groupe présenté en ouverture du live de Yuksek que nous attendrons avec le plus d’impatience, entendez Civil Civic. Duo composé de deux Australiens qui ne s’étaient jamais rencontrés dans leur pays d’origine, à Melbourne, les Civil Civic ont finalement pris contact une fois émigrés en Europe. Pourtant l’un des deux étaient à Barcelone, l’autre à Londres. Qu’importe, la révolution numérique leur a permis de composer essentiellement à distance des tubes addictifs mêlant tout à la fois noise et synth-rock.
Dès la première écoute, leur premier album, Rules (novembre 2011) devient totalement obsédant. On ne sait ce qui est le plus addictif : ces trois notes au synthé qui nous rappellent Robert Smith sur Airspray, le morceau d’ouverture, ces murs shoegaze à la My Bloody qui déboulent à la sortie d’une ligne droite à la guitare claire à la Cure et d’une basse nerveuse et mélodique à la Joy Division sur Street tap. On est tout autant complètement emporté par ces guitares noisy à la Sonic Youth qui débutent Run overdrive que par l’énergie post-punk d’un Grey nurse. Civil Civic, en fait, c’est un peu comme si toutes nos amours d’adolescence étaient réunies en un seul groupe : la cold wave de Cure, la pop des Smiths, les guitares noisy de Sonic Youth, les sons crades de My bloody et l’évidence mélodique des Pixies. A chaque écoute de Civil Civic, c’est un peu comme si on avait encore 17 ans. Et comme une cure de jeunesse, ça ne se refuse pas, direction l’Antipode ce mercredi !
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L’Antipode MJC (2 rue André Trasbot, Rennes) présente Yuksek, Mc Luvin et Civil Civic mercredi 9 novembre 2011 à 20h30.
Tarifs – Sortir ! : 4€ / Membres : 13€ / Location : 15€ / Sur place : 17€
Plus d’infos : http://www.antipode-mjc.com/evenements-antipode-mjc/concerts/yuksek-et-mc-luvin/