L’année 2013 à Rennes commence sur les chapeaux de roue avec l’immanquable et atypique YY fest. Samedi 19 janvier, de 10H30 à 2h du matin, entre le Lecoq Gadby et le Jardin Moderne, vous pourrez assister à une conférence sur le développement durable, réfléchir collectivement pour aider des initiatives sociales, participer à des ateliers allant de la réparation de vélo à la conception de votre propre studio d’enregistrement, visiter les expositions de talentueux graphistes et même assister à pas moins d’une douzaine de concerts !
On l’avoue bien volontiers, c’est la présence de quelques uns de nos groupes fétiches parmi le foisonnement de la pléthorique programmation de cette journée qui a d’abord attiré notre attention sur l’événement. Il a été d’autant plus agréable de découvrir qu’elle ne se limitait pas à aligner les groupes excitants mais aussi à promouvoir les initiatives locales de développement durable et de réappropriation sociale et citoyenne de l’entrepreneuriat.
Dans un bel esprit collectif, All That Glitters, Size Does Mordor, MakeSense, Lecoq Gadby et le Jardin Moderne se sont unis pour monter cette première édition du YY fest. Pour ceux qui se demanderaient d’où provient l’étrange nom du festival, sachez que Mohammad Yunus (prix Nobel de la paix 2006 et inventeur du microcrédit), ponctuait ses interventions en interpelant la génération Y (personnes nées entre 1980 et 1995) par de tonitruants YY (Waïe Waïe ou Why Why en anglais). Le lien avec la musique se fait par l’esprit D.I.Y. (Di Aïe Waïe à l’anglaise). Cette abréviation de Do It Yourself (Fais le Toi Même) résumait une éthique de la débrouille et d’une indépendance farouche, issue du mouvement punk et brandie par les groupes hardcore américains des 90’s.
L’idée est donc de rassembler des personnes ayant en commun une certaine idée du collectif mais aussi la conviction qu’une autre façon de vivre, de créer, de s’associer ou d’entreprendre est possible.
Pour faire tenir tout ça, le festival se déroulera en trois temps. Cela démarrera dès 10 heures dans un lieu de prime abord surprenant : Lecoq Gadby. Quel rapport entre le D.I.Y. et un luxueux hôtel restaurant gastronomique rennais ? D’abord parce que les organisateurs veulent y voir la preuve de la largesse d’esprit de la manifestation, mais aussi parce que le patron de l’établissement est très impliqué dans le développement durable, que son hôtel a été le premier établissement français à obtenir l’éco-label européen et qu’il a lui même proposé d’accueillir le festival.
Cette première partie, s’adresse plus particulièrement à vos méninges. Vous pourrez ainsi assister à une table ronde ayant pour thème: « Développement Durable et responsabilité citoyenne, quelle place pour l’initiative sociale en France?« , suivre des ateliers avec MakeSense pour essayer de trouver des solutions aux problèmes d’entrepreneurs sociaux du coin. Mais les oreilles seront également servies puisque cela se conclura vers 15h par la folk vaporeuse de Ladylike Lily en concert privé.
10h30 à 15h – Lecoq Gadby, 156 Rue d’Antrain 35700 Rennes – gratuit mais nombre de places limité
Accès: bus ligne 5 arrêt Jules Ferry
Réservations plus que conseillées au http://yyfest.eventbrite.fr/
Pour la suite de la soirée, il faudra se rendre dans la zone commerciale de Lorient, direction : le Jardin Moderne. Dès 17h, vous pourrez venir découvrir de nombreuses initiatives locales en participant aux ateliers les plus divers. Vous pourrez découvrir Unishared, un site collaboratif où l’on propose aux étudiants de mettre leurs notes de cours en ligne ou la Start-up brestoise Zéros Gâchis qui viendra vous expliquer comment lutter contre l’effroyable gaspillage des grandes surfaces. Plus pratiquement, vous aurez la possibilité d’apprendre à personnaliser avec style vos pédales d’effets avec Crust Pedals, fabriquer pour moins de 100 euros votre propre studio d’enregistrements avec le fameux Studio la Senelle de Laval (où ont enregistré entre autre Comity, As we draw et Birds in Row). L’association La Petite Rennes vous montrera comment bricoler votre vélo. Il sera même possible de déguster une Disco-soupe cuisinée à partir de légumes «hors-norme» et donc invendables dans le circuit classique.
Les arts graphiques ne seront pas oubliés puisque deux expositions seront visibles sur le lieu. Le duo parisien Arrache toi un œil gère un label, organise des concerts, mais conçoit également de superbes sérigraphies que vous pourrez admirer sur place. Autre exposition, celle de Claude Autret webdesigner et responsable des visuels des concerts All That Glitter en général, et du splendide Rembrandt pliable de l’affiche de ce YY fest en particulier.
Pour dignement conclure cette soirée, les gars n’ont pas fait dans la demi-mesure. Pas moins de 11 groupes, jouant dans les styles les plus variés mais ayant en commun un esprit furieusement bricolo et franc-tireur, joueront sur place à partir de 19h30.
Parmi ce voluptueux florilège, on trouvera notamment la fine fleur de la scène math-rock hexagonale. Les amateurs de rythmes complexes, d’arpèges noisy et de contre-braquages de riffs seront aux anges. Notamment avec l’ébouriffant duo tourangeaux Pneu, soit JB et son jeu de batterie ahurissant et le volcanique Jey à la guitare. On adore les deux formidables albums des deux zigues, mais c’est tout de même sur scène que l’on apprécie le plus l’incroyable énergie dégagée par leurs compos tarabiscotées mais toujours fulgurantes.
JB, le batteur fou, ne chômera pas puisqu’il rempilera avec son autre projet : l’épatant Papaye. En compagnie de deux guitaristes échappés respectivement de Room 204 et Kommandant Cobra, le ton se fait un peu moins «rentre-dedans» que chez Pneu mais l’énergie émise reste totalement irrésistible et, malgré les rythmiques retorses, vous risquez bien de vous retrouver avec des fourmis atomiques géantes dans les guiboles.
Moins connu dans nos contrées, on retrouvera aussi le duo picard guitare/batterie John Makay. Toujours dans un style rock trigonométrique, virtuose mais pas poseur, les deux gars la jouent plus atmosphérique que les précédents. A noter que le jeu presqu’exclusivement en tapping du guitariste risque bien de vous laisser comme deux ronds de flanc.
Les Rennais de l’étape viendront encore rajouter une couche de bonheur intense et d’excitation euphorique à la programmation de la soirée. D’abord parce qu’on y retrouvera Fago.Sepia un groupe qu’on aime d’amour. Avec ses structures mélodiques et rythmiques complexes qui vous emportent toujours un peu plus loin, Fago.Sepia trace le sillon d’une musique exigeante mais tout autant immédiatement addictive. On est plus qu’impatient d’en prendre plein les oreilles !
On ne boudera pas non plus notre plaisir avec l’excellent quatuor TotorRo qui devrait nous faire décoller avec son post-rock, post-hardcore du meilleur aloi. Auteur d’un ep en 2008 puis d’ un premier album All Glory To John Baltor en 2011 (sur lequel il n’y a pas grand chose à jeter !) TotorRo cristallise une bonne partie de nos espoirs pour cette année 2013. Leur récent Home Alone Ep (octobre 2012) nous a bien vrillé les oreilles et sert d’annonce à un nouvel album dont on attend la sortie avec une impatience qui frôle l’indécence. A bon entendeur…
Si Splash Wave surfe sur la vague, ce n’est pas sur celle des guitares math et post rock, pour leur part, mais plutôt sur celle du Krautrock. Et pourtant pas que. Le groupe breton est certes grand amateur de synthétiseurs et autres machines vintage ainsi que de cassettes et de floppy disques, mais il l’est tout autant des couleurs flashy et de jeux vidéos des eighties. Tout ça crée un mélange énergique entre son lo-fi et électro-krautrock. En deux mots : de la synth pop… ou de la dude-wave, selon leurs propres termes.
Ils ont le même label, Throatruiner. Ils ont enregistré avec le même gars, Amaury Sauvé (qui vient de sortir une compile des groupes passés entre ses pattes). A Rennes, ils seront plus ou moins à mi-chemin de leurs fiefs respectifs : Lorient pour les Direwolves, Laval pour Birds In Row. Ces noms de villes vous font rire. Vous avez tort. Ce que les deux groupes ont sorti en 2012 faisait partie des meilleurs choses que l’année a apportées. You, Me and the Violence pour les oiseaux, Me from Myself to Banish pour les loups.
Si leurs sets seront dans les moments les plus durs de la soirée, ils ne seront pas que ça : à ce niveau de talent, on est dans le beau.
Même si le rock se taillera la part du lion dans cette programmation, le hip hop sera aussi présent avec Alivekill. Groupe atypique pour le style, les 2 MCs aux influences très noise peuvent être accompagnés par une guitariste et deux batteurs. Et pas des moindres, puisque ce sont celui de TotorRo mais aussi celui de Nevrotic Explosion/Tagada Jones. Ambiance plutôt hardcore donc, avec des textes sombres et une énergie très rock qui devrait tout balayer sur son passage.
Enfin, dans le genre « hors toute catégorie», il y aura aussi Seal Of Quality. Cet étonnant projet solo nous avait plutôt épaté à la rentrée 2012 à la Bascule en première partie de Papier Tigre. Le rouennais participant également à Alaska Pipeline et Extreme Cheerokee bricole à partir d’une triplette de game-boy, d’une guitare électrifiante et d’une voix vocodérisée à loisir, une pop 8 bit grandiloquente et malicieuse. Assurément bricolo, mais idéal pour passer un moment acidulé et vivifiant.
Les comptables et les mathématiciens auront remarqué avec courroux que nous vous avions promis 11 groupes alors que cette liste n’en décrit que 10 ! Pas d’erreur de notre part, c’est juste que les malicieux organisateurs ont ajouté, en cerise hors-calibre sur le gâteau collectif, un groupe surprise à la soirée. On ne vous en dira pas plus mais sachez juste que c’est un groupe qui n’a pas joué au Jardin depuis longtemps, qu’il s’inscrira parfaitement dans la soirée et qu’il ravira les amateurs de musique furibarde. A vos pronostics.
Un festival qui ne ressemble à aucun autre, qui nourrira aussi bien votre réflexion que vos oreilles. Une occasion unique et emballante d’à la fois réfléchir à notre façon d’aborder le monde, tout en savourant une pelletée d’excellents groupes pour un prix dérisoire. La soirée n’est pas encore complète, mais les places partent vite. On ne peut donc que vous conseiller de réserver vos places pour plus de tranquillité.
A partir de 17h – Jardin Moderne, 11 rue du Manoir de Servigné Rennes, – 10€
Accès bus: Ligne 11 arrêt « Jardin Moderne »
02 99 14 04 68 / info @ jardinmoderne.org
L’excellente compilation de la soirée pour vous donner une idée du joyeux bordel que ce sera.
Annonce écrite avec les éminentes collaborations d’Isa et Fix. Merci pour le collectif.