La Basse-cour de Decouflé éclabousse la piscine Saint-Georges

Philippe Decouflé et toute sa belle bande de la compagnie DCA ont l’air de bien se trouver à Rennes. Ils sont venus y présenter Shazam en 1998, Solo en 2006, le coquin Cœurs croisés en 2007 et enfin la reprise des somptueux jeux d’espace et de lumière de Sombreros en 2009. Depuis 2010, Decouflé est même artiste associé au TNB et y a créé les saisissants duos d’Octopus, avant de les faire tourner dans le monde entier.
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En confiance donc, il se lance aujourd’hui, en avant goût de son Panorama d’avril-mai 2012, dans un «impromptu», improvisé en quelques semaines autour d’un lieu bien connu des rennais : la piscine Saint-Georges. L’architecture délicieusement art déco, les mosaïques d‘Odorico et l’étonnante organisation des vestiaires semblent effectivement un écrin parfait pour les prédilections burlesques et mélancoliques du monsieur. La pistoche préférée des bourgeois rennais pas trop frileux, accueille donc du 8 au 12 novembre 2011 : Swimming Poules et Flying Coqs.

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Alors que les prétendus ayant-droits du visage de Jésus sont venus réclamer des royalties à Roberto Castelluci, nous déboulons légèrement essoufflés par la petite course consécutive aux bouchons du soir. Nous avons le plaisir d’être accueillis par un élégant couple en smoking, robe du soir… et bonnets de bain à fleurs ! Les deux balcons longeant les longueurs du bassin étant déjà complets, on se faufile jusqu’aux quelques bancs installés au bord de l’eau faisant fi des risques d’éclaboussures.
On retrouve avec beaucoup de plaisir l’équipe d’Octopus au complet. Nosfell et Pierre Le Bourgeois sont bien calés au fond, de chaque côté du grand plongeoir. Ils entament par un rythme puissant sur lequel va défiler toute la troupe pour un tour de bordure de bassin sous la belle influence de Pina Bausch. On est pourtant instantanément projeté dans l’univers de Decouflé avec cette galerie de personnages foutraques, bigarrés et surtout immédiatement attachants.

Vient ensuite le délicieux entremêlement de scénettes burlesques et de saisissants numéros de danse dont les connaisseurs du monsieur sont familiers. Une fois de plus, cette délicieuse fantaisie est transcendée par un sens de l’espace et de l’image remarquables. L’accord entre l’humour décalé, la puissance de certains éclats de fureur, la sensualité douloureuse des duos, la savante et malicieuse utilisation de la vidéo, la musique jouée en direct et sublimée par la voix troublante du Janus vocal Nosfell, les références multiples passant joyeusement de la Bande Dessinée, aux comédies musicales aquatiques en passant par des feuilletons plus récents… est une magie toujours aussi savoureuse et unique. La profusion est telle que l’on se prend à ne plus savoir où porter du regard et que l’on finit par se résigner à ne plus piocher que des instantanés fulgurants alors que l’on voudrait tout embrasser de nos rétines.

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Dans le déferlement, on citera en en oubliant des milles et des cents : une savoureuse leçon de natation menée de sifflet de maître par le complice de toujours Christophe Salengro, une violation patentée des décrets anti-tabac déclenchant une alerte à Malibu, une fulgurante étreinte, un charleston à élimination et «un» magnifique sirène dont le chant créole en a fait frissonner plus d’un…

Tout ça fonctionne d’autant mieux que le lieu, malgré la chaleur et l’odeur du chlore, apporte une touche inimitable à l’ensemble. Le labyrinthe de portes, les plongeoirs et le bassin, permettent un facétieux jeu d’entrée et de sortie. L’acoustique spectaculaire du bâtiment donne une ampleur à la musique comme aux exclamations tatiesques des acteurs. L’eau offre des multiples possibilités de reflets et d’effets de lumière, mis en valeur par les vidéos mêlant abstraction, extraits de films et prise de vue en direct sur et sous l’eau. A noter que la surface limpide du bassin, renvoie en un troublant miroir négatif à la terrifiante étendue noire pétrole du Othello d’Ostermeïer.

Merci donc au festival Mettre en scène pour avoir permis cette délicieuse rencontre. On espère bien que par le futur d’autres artistes s’empareront avec la même gourmandise d’autres lieux du coin.

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Festival Mettre en Scène : programmation et renseignements

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