Alea jacta est : la formule de Jules César pourrait aussi s’appliquer à l’élection présidentielle, dont la campagne a pris fin vendredi soir à minuit. Après des mois de débats, de tractations, d’annonces, de contre annonces, de petites phrases assassines, nous sauront finalement dimanche soir qui seront les deux candidats présents au second tour.
Cette campagne est en partie marquée par un renouvellement générationnel, puisque les candidats des deux partis principaux se présentent pour la première fois. La France est alors à un tournant de son histoire et doit choisir un nouveau projet de société, dans une période bien trouble notamment sur le plan économique et social. De nombreux chantiers attendront le prochain Président : le chômage, le pouvoir d’achat, la croissance, les délocalisations, l’école, la justice, l’environnement… Les 5 prochaines années risquent de ne pas être de trop. Aussi nous vous proposons un bref état des lieux et un retour sur les derniers épisodes de ce feuilleton, qui passionne tellement de Français.
Comme l’a présenté Olivier Besancenot lors de son meeting de lundi à Rennes, la fin de la campagne a été marquée par une nouvelle dualité avec 2 oppositions, d’un côté UMP/FN et de l’autre PS/UDF. Nicolas Sarkozy a, en effet, choisi de terminer sa campagne du côté de la droite dure. Le président de l’UMP pense que le scrutin se jouera sur les électeurs du Front National, c’est pourquoi il a multiplié les appels du pied à leur égard. Après le Ministère de l’immigration et de l’identité nationale, il a repris cette semaine la formule La France tu l’aimes ou tu la quittes
, en explicitant les devoirs des immigrés. De son côté, J-Marie Le Pen s’en est pris aux origines étrangères du candidat de l’UMP, se déclarant lui même comme un candidat du terroir. Il n’a cessé de martelé son message parlant également des origines juives de M. Sarkozy, qui auraient tendance à le favoriser.
D’un autre côté, un dialogue a été amorcé entre l’UDF et le PS, dû à la fois au positionnement de François Bayrou et à l’inconnu du score de Ségolène Royal. Des personnalités de gauche comme Michel Rocard ou Bernard Kouchner se sont ainsi prononcées pour une alliance entre les 2 partis avant le premier tour. Cela n’a pas été du goût du PS qui a présenté l’UDF comme un parti de droite pendant toute la campagne. Il est vrai que historiquement l’UDF a toujours été dans le giron de la droite, formant des alliances au gouvernement et pour les législatives. Mais depuis la formation de l’UMP, le parti centriste a pris de plus en plus ses distances, au point de voter la motion de censure suite à l’affaire Clearstream.
M. Bayrou s’est depuis positionné en rassembleur de la gauche et de la droite, même si la rupture semble consommée avec cette dernière. Dominique Strauss Kahn, souvent vu comme le premier ministre potentiel du chef de l’UDF, a par ailleurs tenu à rappeler cette semaine qu’il n’était pas disposé à collaborer avec M. Bayrou. Tout devrait se décider en fonction des résultats du premier tour, après lequel une alliance historique PS/UDF n’est pas impossible, bien que peu probable en raison de positionnements différents chez les élus de terrain.
Enfin, la campagne aura été peu profitable aux candidats d’extrême gauche. Le nombre important de candidats n’a pas favorisé les choses, chacun devant exister avec sa spécificité. L’échec de la candidature unitaire a mis un frein au début de campagne, les candidats devant rebondir par la suite. Arlette Laguiller, en annonçant qu’il s’agirait de sa dernière campagne présidentielle, a plombé sa tournée. De son côté, José Bové a longtemps tergiversé avant d’annoncer sa candidature. Il a ensuite fallu courir après les parrainages, ce qui a donné une longueur de retard au paysan syndicaliste dès le départ. Il se présentait alors sous la bannière de la gauche populaire et antilibérale tout comme Marie Georges Buffet.
Cette dernière a ainsi mis de côté son étiquette de candidate du Parti Communiste, qui traîne derrière lui une image vieillotte. Un nouveau mauvais score à la présidentielle pourrait accélérer son déclin, amorcé depuis une dizaine d’années. Le seul à avoir su tirer son épingle du jeu est Olivier Besancenot. Il s’agissait de la 2ème campagne du facteur qui a pris de l’assurance et espère pouvoir véritablement peser à la gauche du Parti socialiste. Tout dépendra là aussi de son score, la LCR ayant à ce jour un nombre très restreint d’élus, elle n’apparaît qu’au cours des grandes élections. Enfin, reste l’énigme Gérard Schivardi, le candidat de maire, qui était encore inconnu avant l’élection et a annoncé la création d’un nouveau parti à gauche.
Tous les scénarios restent possibles quant aux résultats du premier tour. La règle est en effet le plus souvent la surprise, comme cela a put être le cas avec les défections de Lionel Jospin, Edouard Balladur et Raymond Barre au cours des 3 dernières élections. Le vote utile en faveur de Ségolène Royal sera-t-il suffisant ? François Bayrou ou J-M Le Pen passeront ils le 1er tour ? Nicolas Sarkozy ne s’est il pas mis en danger ces dernières semaines ? Réponse dimanche soir vers 20h…