Depuis ce début d’année 2018, les scènes musicales rennaises nous offrent un déluge ne semblant pas vouloir tarir de très bons disques. Nous allons essayer de jeter quelques petits coups de projecteur sur ceux qui nous ont le plus enchanté les tympans. On vous invite aujourd’hui à vous laisser envouter par le charme sombre du premier quatre titres de Février.
Après l’EP de Da Maybes et avant bien d’autres on espère, voici donc un disque que nous attendions avec la plus grande des impatiences.
Le trio rennais Février fait en effet partie des formations locales que l’on suit avec la plus grande attention, et pas seulement parce que son patronyme nous évoque un des plus beaux morceaux de Dominique A. Le groupe est composé d’Emilie au chant et de Don Lurie à la guitare (animateur régulier de l’émission kérozène sur canal B et pilier de l’association Kfuel) et enfin de Mat Cotton (qui bat également au cœur de You’ll Brynner et Formica) à la batterie minimaliste. Alors duo, ils avaient sorti en novembre 2013 une excellente Démo deux titres sur bandcamp où ils déployaient un slowcore atmosphérique et à vif, proche des immenses Slint ou du duo canadien Mecca Normal. Sur scène, nous apprécions tout particulièrement leur interprétation fiévreuse et habitée. Surtout que l’ajout d’un batteur a encore accentué l’impact émotif de leur prestation. Nous attendions donc avec une certaine fébrilité leur premier maxi vinyle enregistré au studio Kerwax avec Christophe Chavanon.
Enregistré avant l’arrivée du batteur, nous retrouvons sur ces quatre titres l’épure émouvante et les contrastes qui nous avaient tant séduits lors de leur premiers concerts. Pris dans sa continuité, le disque se révèle très cohérent avec un duel/duo permanent entre le jeu de guitare contrasté du Don et la voix sensible et écorchée d’Emilie. La finesse et la force émotionnelles des titres évitent cependant tout sentiment de redites. L’inaugural et imprécateur Rosa Céleste est un remarquable ascenseur émotionnel, alors que plane ensuite une euphorie mélancolique sur Les Interdits avec ses touches de mellotron jouées par Michel Le Faou (The Enchanted Wood). On change alors de face et on se prend plein fouet l’urgence fiévreuse d’Everything But Jesus, encore accentuée par quelques notes fantomatiques sur un piano avant qu’Hate ne boucle la boucle en revenant dans un crescendo qui fout les poils aux psalmodies swamp rock initiales.
Un disque cohérent donc dans sa forme comme dans son ambiance qui donne même presque l’impression d’un grand voyage en quatre étapes, toutes aussi puissamment évocatrices les unes que les autres. Avec son vinyle rouge écarlate et le chouette jeu d’ombre et de lumière de l’orfèvre du genre Renan Péron, le disque se paye en plus le luxe d’avoir une sacrée belle gueule qui achève de le rendre totalement hautement recommandé.
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