Adam et Eve sont venus rendre visite à Mythos cette année. Dans une version relue et corrigée… On entre donc à grands pas dans la salle de la Paillette, impatients de découvrir le Jardin d’Eden concocté par la Compagnie belge Clinic Orgasm Society.

Une scène bleutée, encombrée d’un joyeux charivari. Un écran de contrôle à gauche. Deux ordinateurs. Des machines, étranges, presque antiques. Un homme, confortablement attablé. C’est Blaise Ludik, le Créateur, avec un grand C. Ne bougez plus, vous êtes dans son atelier.

Quand Création rime avec imperfection…
Le Créateur s’agite au beau milieu d’un environnement sonore ressemblant étrangement à des bruits d’animaux… A moins que ces sons ne soient ses propres bruits, en provenance directe de sa ceinture-ampli à la Robocop. Etrange, on vous dit, cette atmosphère de Jardin d’Eden et d’atelier du Créateur. Et puis Adam et Eve, qui s’appellent en vrai Mélanie Zucconi et Ludovic Barth, apparaissent : elle, au beau milieu d’un immense plastique, lui la tête à l’envers dans une bassine de colle.

Mais dans ce Paradis là, la perfection n’existe pas et les corps sont de bric et de broc… Mélanie a des jambes de poupée de chiffon, incapable de se tenir debout. Quant à Ludovic, il porte de manière plus que voyante ses attributs masculins. Et ils évoluent, tant bien que mal, sous nos yeux, dans cette « vie paradisiaque et merveilleuse » où la banalité du quotidien se mêle intrinsèquement à la volonté du Créateur démiurge : procréer, se perpétuer. Quand les tartes aux fraises se suivent ; quand il faut copuler au Jardin D’Eden, espace réduit à une table basse recouverte de terre, ornée d’un Yucca en guise de pommier.
Et puis il y a ces voix, monocordes, dignes d’un GPS ou d’un logiciel d’apprentissage de la lecture, où chaque syllabe est découpée. Et parfois, quand les émotions se font trop fortes, les voix des comédiens réapparaissent, comme un appel au secours face à l’absurdité de la Création.

Le Créateur, ou la tyrannie de l’inventeur fou

Il a pouvoir de vie ou de mort sur ses enfants. Comme dans un jeu vidéo. Et l’écran pour diapositives installé à gauche de la scène nous plonge dans cet univers : quatre cases, pour les quatre personnages. Quatre pourcentages pour chacun qui augmentent ou diminuent et sont symboles de vie, une vie réduite aux pleurs, à la joie, à la colère et aux mouvements. Et parfois, quand le Créateur, agacé par les imperfections, entre dans une colère noire, il décide du Game over !

Adieu Mélanie Zucconi. Bonjour Mathylde Demarez ! Jolie copie des actrices des années 50, tout du moins de leur poitrine opulente et engoncée dans un soutien-gorge gainant. Cette Mathylde est aguicheuse et se fait tentatrice auprès de Ludovic. A peine née, elle n’a qu’un seul mot à la bouche : « copuler » car oui, elle est censée se multiplier, sur ordre du père. Mais le Paradis peut vite devenir un enfer, quand les sentiments apparaissent. Adam-Ludovic a perdu sa bien-aimée Eve-Mélanie. Et il n’a que faire des propositions sexuelles de Mathylde…

Imperfections, bugs de sentiment, coeur défaillant du Père… le Paradis disjoncte, comme un disque rayé. La machinerie s’agite, produit des bulles. Les corps se disloquent et les pourcentages de mouvements, joie, colère et pleurs flirtent dangereusement avec le zéro. Game over ! la partie est finie…

Une fable tragico-comique

Cette Genèse revisitée en déconcertera sûrement plus d’un. Les images religieuses sont revisitées, torturées, déformées mais avec beaucoup de subtilités. Car le mythe fondateur doit aujourd’hui concilier grandeur de l’espèce et banalité triviale de la vie (s’alimenter, se reproduire, travailler, jardiner…).
DTC (on est bien) conjugue avec bonheur trivialité et poésie, violence et amour, vie et mort au beau milieu d’une déconstruction théâtrale utilisant de façon incongrue objets et technologies…

Il vous reste encore ce soir pour découvrir ce Paradis belge déjanté…

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DTC (On est bien) par la Compagnie Clinic Orgasm Society
Théâtre de la Paillette
Jeudi 14 à 21h30
Tarifs : 15 euros (8 euros VIF)

Festival Mythos 2011
Du 12 au 17 avril
infos et programmation complète : www.festival-mythos.com