Bouillants #4 : ouverture des frontières

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Depuis samedi dernier, le festival des arts numériques nous propose de découvrir sa seconde vague d’œuvres. Le cœur du dispositif est une nouvelle fois à Vern sur Seiche, sur l’épatant site de l’ancienne laiterie dont est tiré le nom du festival. Vous pourrez y voir du 23 avril au 20 mai 2012 pas moins de 21 installations déclinant avec force, malice ou poésie le thème brûlant d’actualité des frontières.

Si vous ne connaissez pas encore cet étonnant site industriel réhabilité utilisé par les Bouillants, nous vous invitons chaudement à faire le déplacement. Situé à une dizaine de minutes à peine, au Sud de Rennes, le bâtiment caché derrière une bordée d’arbres ne paye pas de mine au premier abord. Ce ne sera que quand vous commencerez à parcourir ce joyeux labyrinthe de plus de 1200 m2, sur plusieurs niveaux, que vous réaliserez le plein potentiel de l’endroit. D’autant plus que l’équipe, forte de ces quatre années d’expériences, s’est désormais particulièrement bien approprié le lieu.
C’est donc avec une belle fluidité que vous pourrez découvrir 13 installations d’artistes internationaux (dont 4 créations) auxquelles viennent s’ajouter 8 projets menés par des étudiants chercheurs en master2 Arts et Technologies Numériques de Rennes 2.

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Ce qui est frappant cette année, c’est que la «frontière» entre les deux mondes est beaucoup plus floue que par le passé. D’abord parce que la disposition générale mélange plus les œuvres que précédemment, mais surtout parce que les travaux des étudiants font preuve d’un niveau assez impressionnant.

Dans cette belle homogénéité, nous avons particulièrement apprécié la labyrinthique BD numérique du Pays des merveilles d’Aurélia Cadiou, les flippants bubons entre numérique et argentique des photos du .jpegg de Dorothé Buffetaut, les cafards geek et goguenards de Visiteur(s) d’Alban Le Moigne et l’oppressant jeu de distorsion numérique du T.I.F. de Charlie Guérin.
Le tout est particulièrement bien intégré dans les différents espaces.

Du côté de chez les «pros», on aura aussi largement de quoi se régaler. D’une façon générale, nous remarquons que le travail d’interaction avec les œuvres s’est grandement amplifié par rapport aux éditions précédentes. La limite entre l’installation et son spectateur est de plus en plus ténue. On remarquera aussi que si l’image est omniprésente, le son de la plupart des installations est particulièrement soigné.

Dans le splendide Mi’Râj du tunisien Haythem Zakaria, un subtil jeu de miroir et de flux vaporeux projetés en temps réel et épousant les mouvements du visiteur, vous permettront de vivre une expérience visuelle intime et envoutante.

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Autre expérience visuelle mémorable, Dérive de François Quévillon vous baladera entre New York, Orléans, Lyon, Sherbrooke et Montréal. Sur l’écran, d’impressionnantes reconstitutions en trois dimensions se modifient selon vos mouvements. Elles sont également influencées en temps réel par l’heure et différentes données météo des lieux. Au-delà du questionnement suscité et de la prouesse technique déjà assez remarquable, c’est l’aspect esthétique qui nous a le plus épaté. Les fantomatiques particules colorées semblant balayées par d’étranges vents numériques forment de surprenants ballets virtuels qu’on a peine à quitter des yeux tant ils sont fascinants.

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Vous pourrez aussi manipuler et observer les hypnotiques mouvements des petits êtres perpétuellement en mouvement du Difluxe de Jesse Lucas. L’empathie générée par ces petites créatures symboliques baladées entre différents pôles est assez étonnante.

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Plus malicieux, le chinois Du Zhenjun vous invite dans Perturbation, à démultiplier jusqu’à l’absurde la réjouissante et bien ordinaire pagaille déclenchée par la simple sonnerie d’un téléphone portable.

Tout aussi facétieux, le Mirror Piece de Marnix de Nijs scrutera les caractéristiques de votre visage pour vous accoler le reflet inattendu d’une personnalité borderline ou au comportement sortant des normes établies. Devrez-vous visiter le reste de l’exposition en portant sur l’épaule la présence tutélaire de Marilyn Manson, Klaus Nomi ou Sid Vicious…?

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Pour Sans armes citoyen, le spectateur est également convié a participer à une entreprise de démolissage/réappropriation des symboles de la République de Maurice Benayoun. D’abord en amont où des internautes ont pu se filmer réinterprétant notre hymne national, la collecte de ces versions étant ici projetée sur un buste de Marianne. Ensuite sur place où dans de tricolores isoloirs les visiteurs pourront coder leur message sous formes de flashcode (les codes barres pour smartphones) que pourront arborer d’autres visiteurs.

Dans 100 frontière, votre parcours entre les différents bagages disposés par le sénégalais Aboulaye Armin Kane construira petit à petit un puzzle visuel dessinant toute la complexité des mouvements de populations et donc des passages de frontières en Afrique. Dans les sinistres débats actuels, ce témoignage semble un appel plus que salutaire à la prise de conscience de réalités honteusement éludées.

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Le plus impressionnant est pourtant Post Mortem de Jannis Kilian Kreft. L’artiste allemand vous propose, en déposant simplement votre bras sur la blancheur immaculée d’une inquiétante table, de franchir l’ultime frontière et d’expérimenter rien de moins que les 14 jours suivant votre mort.
Si cet éprouvant processus de rappel à notre condition de mortel vous remuera certainement, l’installation dégage pourtant aussi une étrange sérénité, loin de toute dramatisation.

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Parmi les autres travaux, ne manquez surtout pas le très beau 108 du coréen HeeWonn Lee. 108 boîtes à musique y égrènent, note par note, lettre par lettre, les récits douloureux d’enfants abandonnés lors de l’éclatement de leur famille. Une œuvre délicate et onirique où l’ambiance sonore vous emporte petit à petit vers l’émotion.

Horaires d’ouverture
Du lundi au vendredi, de 10h00 à 18h00.
Week-ends & jours fériés, de 14h00 à 18h00.
Accès par le métro, arrêt La Poterie puis bus n° 59, 73 et 75 en direction de Vern-sur-Seiche.
entrée libre

Avant de repartir, n’hésitez pas non plus à faire un petit détour à 2 minutes de là au Volume de Vern. Le Niform de Samuel Bianchini, vous permettra de dévoiler par vos mouvements ce qui se cache derrière l’immense fond d’écran d’un bien ordinaire bureau d’ordinateur.

Renseignements et infos pratiques sur le site des Bouillants
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