Totorro en interview

Totorro

On suit le quatuor de Totorro depuis un bon moment et on se prend une dérouillée monumentale à chaque fois. Leur math-pop est un modèle du genre, exigeant et accessible à la fois, avec ce qu’il faut de chausse-trappes déroutants mais aussi de lignes mélodiques souriantes. Les quatre musiciens ont joué en début d’après-midi lors de ce dernier jour du Label Charrues et du festival, mais devant un très large auditoire : il faut dire que l’indispensable Home Alone rencontre un succès critique amplement mérité, tant cet album est un concentré de titres brillants et réjouissants. On avait hâte de rencontrer (enfin) les responsables de l’usure avancée de notre platine depuis quelques semaines. Rencontre avec Bertrand (batterie) et Xavier (basse).

Alter1fo : Si vous deviez présenter Totorro en 2 ou 3 mots, que diriez-vous ?

Bertrand : Copains

Xavier : Décibels

Bertrand : Poules

Pour éviter la question classique des influences, si vous deviez citer chacun trois albums sans lequel vous ne pourriez pas vivre ?

Bertrand : In Rainbows de Radiohead. Je suis un papillon, je n’ai pas trop d’albums phares : je vais beaucoup kiffer un album, l’écouter en boucle, puis ne plus l’aimer. Ah si, j’ai appris à faire de la batterie sur Superunknown de Soundgarden.

Xavier : Houdini des Melvins, Old Wounds de Young Widows, et le dernier Swans.

Quand on a près de 150 dates au compteur, dont une planquée à l’étranger, ça fait quand même quelque chose de jouer ici ?

Bertrand : Ca nous permet surtout de mieux l’appréhender. On a eu l’occasion de faire quelques plateaux similaires depuis la sortie de l’album. On a déjà joué sur des grosses scènes même si c’était des festivals où l’on jouait à 18h devant peu de monde. Ca fait moins peur, mais c’est toujours impressionnant !

Totorro

Vous venez des Côtes d’Armor, mais vous faites partie de la scène rennaise actuelle. Comment s’est passée la formation du groupe ?

Xavier :  A la base il y avait Jonathan et Christophe aux guitares qui jouaient ensemble au lycée. A la fin du lycée, je suis arrivé à la basse, et Bertrand nous a rejoint à la batterie au début de nos études à Rennes, il y a 4 – 5 ans.

Maintenant vous vivez tous ensemble dans un presbytère : justement Germain Cagnac et Loïc Nys ont réalisé le clip déjanté de Chevalier Bulltoe dans votre maison, et on sent que vous vous y plaisez bien ! Qui a eu toutes ces idées ?

Bertrand : En gros, il y avait deux semaines consacrées au clip, et on a passé une semaine à ne pas trop savoir comment commencer, tout en buvant des bières (rires).

Xavier : Et la veille de tourner, on a pris une feuille A4 et on a écrit cinq ou six idées. Et on a tout filmé sans vraiment s’arrêter : on ne regardait même pas ce que ça donnait après !

Bertrand : On a fait tout en deux jours et on est content du résultat. L’exercice du clip est toujours très casse-gueule, surtout dans notre style musical : il y a beaucoup de groupes où tu vois des mecs en train de faire semblant de jouer dans un hangar. Je ne trouve pas ça très intéressant. On a plutôt essayé de faire quelque chose qui nous représente.

La transition est bien trouvée avec le shaker au bar.

Xavier : Au shaker, c’est un ami, le cinquième mec qui vit avec nous : on lui a tout simplement proposé de tourner dans le clip !

Vous aviez un beau succès avec vos premiers EPs, mais il y a un gros engouement (mérité) sur l’excellent Home Alone : comment s’est passé le virage entre post-rock et math-rock, voire math-pop ? 

Xavier : On a rencontré d’autres personnes, comme nos amis de Mermonte, et comme beaucoup de musiciens, on se nourrit des autres. On a écouté des choses différentes, et naturellement, on a commencé à jouer des choses un peu plus légères qu’avant.

Bertrand : Je pense aussi que ça va avec notre époque : il n’y a plus beaucoup de groupes de post-rock pur qui font des morceaux de quinze minutes avec des montées de petites lignes d’aigus. Je pense qu’on en a fait le tour.

Xavier : Et puis il ne faut pas oublier qu’on est jeune : quand on a une vingtaine d’années, on découvre encore beaucoup de choses.

Vous avez déjà joué des titres de l’album en live (je pense au YY fest au Jardin Moderne). Quand on a déjà joué les titres en live, comment fait-on pour les poser en enregistrement ?

Xavier : C’est plus facile, parce qu’on les avait composés pour les jouer en live, et on les avait déjà bien en mains.

Bertrand : Il y a eu quelques guitares jouées deux fois, mais c’est tout. Quand tu composes des morceaux en studio, tu peux avoir tendance à t’emballer, « je vais rajouter une sixième guitare ». On sait qu’on est limité par ce qu’on peut faire en live. On prend aussi pas mal de temps à composer : quand on a composé un nouveau titre, il y a toujours un vieux morceau qu’on se traine depuis très longtemps et qu’on a envie de jarter ! Il y a un roulement naturel qui se fait.

Totorro

Justement, Chevalier Bulltoe est un titre qui a beaucoup changé en live ?

Bertrand : Oui, on ne la jouait pas pareil au YY Fest : on a rajouté la fin tropicale.

Xavier : La première fois qu’on a fait cette nouvelle fin, on s’est regardé : « oula, est-ce qu’on finit comme ça ?» mais au final, c’est drôle (rires)

Bertrand : En tout cas, c’est le titre le plus accrocheur, le plus accessible de l’album.

Et d’ailleurs, comment composez vous ? A plusieurs ou bien c’est l’idée de l’un de vous ?

Xavier : On compose tous les quatre. On part d’une idée, souvent un riff de guitare.

Bertrand : On s’enferme ensuite dans une pièce tous les quatre et on décide des structures. On a une salle de répèt dans la maison.

On trouve dans Home Alone des titres très accessibles comme Motte-Rock, d’autres qui sont blindés de tiroirs comme Home Alone et Festivalbini. Comment avez vous choisi les titres figurant sur l’album ? Un ordre précis ?

Xavier : On n’avait que ceux là, et on les a tous mis ! Avec deux morceaux de plus, on faisait un album plus long (rires)

Le dernier titre, Tigers and Gorillas, est le seul enregistré en studio sans être passé par le live, non ?

Bertrand : Oui, on ne la fait pas en concert parce qu’il manque un petit quelque chose. Il y a deux accords qui montent sans arrêt, il y a de plus en plus de grattes, avec des distos. Et on ne peut pas le faire en live. Il faudrait quatre autres guitaristes : on le fera peut-être un jour avec des copains.

Vous venez de sortir l’album mais avez-vous déjà de nouveaux titres dans vos tiroirs ?

Bertrand : On a réussi à en faire un depuis la sortie de l’album !

Xavier : On a d’autres idées. On a même un deuxième nouveau morceau, Ghislain Fracapane (ndlr : compositeur de Mermonte) !

Bertrand : Si vous réussissez à choper la version japonaise de notre album, il y a deux titres en exclu dessus. On a fait un morceau acoustique, en s’aventurant dans des choses qu’on ne connaissait pas forcément.

Xavier : Et on a appelé ce titre Ghislain Fracapane : il compose des morceaux en pensant à ses amis, mais il n’aurait jamais fait un morceau avec son nom !

Totorro

La question inévitable : comment faites vous pour concilier tous les projets musicaux ? Pour Mha, c’est peut-être plus simple, mais il y a aussi The Missing Season, Alive Kill, Fago Sepia, Eshol Pamtais…

Bertrand : Et ils ont aussi tous les trois un projet de théâtre.

Xavier : On accompagne une troupe de théâtre : au départ, on devait uniquement faire la musique, et au final, on fait aussi du théâtre ! C’est encore en création.

Bertrand : On ne fait que ça, donc on a largement le temps de caser tous nos projets. On est tous potes, donc on arrive à concilier tout ça facilement.

Et dernière petite question : vous n’utilisez que des Crust Pedals ? (ndlr : pédales d’effets fabriquées par Xavier et customisées par Claude, à retrouver ici)

Xavier : Presque ! Il y a quand même des trucs numériques, mais on essaye d’utiliser les pédales maison.

Merci beaucoup !

Merci à vous !

Bandcamp de Totorro

Le site du Label Charrues / Vieilles Charrues

_________________________________________________

Retrouvez tous nos articles sur le Label Charrues aux Vieilles Charrues 2014 

Photos : Solène

Laisser un commentaire

* Champs obligatoires