Thalia Zedek à L’Avant Scène : Les légendes discrètes sont les plus belles

Après la savoureuse branlée infligée par l’impeccable triplette Ruby Red Gun, Shub et STNNNG, la très belle soirée mitonnée par Trench Piss et Magneto et en attendant les monstrueux assauts successifs de Baxter Stockman, Silent Front, Hawks et Blacklisters, l’association Kfuel a eu la chic idée de nous ménager au milieu de toute cette splendide fureur, un oasis sonore, allégé certes en décibel, mais surement pas en émotions.

Thalia ZedeckNous sommes bien contents de retourner boulevard de la Tour d’Auvergne au bar-resto l’Avant Scène. Le délicieux souvenir d’une superbe soirée en compagnie d’Angil & The Hidden Tracks, nous remet immédiatement le sourire à chaque évocation de l’endroit. Nous l’avons d’autant plus que mercredi 19 mars, on pourra y écouter une de ces légendes discrètes mais chéries, des marges de la musique américaine. Originaire de Washington, Thalia Zedek s’est d’abord fait connaître dans les années 80 comme la furieuse frontwoman d’Uzi ou Live Skull. Elle quitte ce dernier groupe en 1990 empêtrée dans de terribles conflits personnels envenimés par une sévère addiction à l’héroïne. Aidée par ses amis, elle parvient tout de même à se sortir de sa dépendance. En compagnie de Chris Brokaw, batteur de Codeine, elle fonde dans la foulée le groupe qui va valoir une place toute particulière dans le cœur de tous ceux qui ont croisé sa musique à l’époque : Come. Entre 1992 et 1998, ils sortiront quatre albums chez Matador Records, tous plus splendides les uns que les autres. Zedek et ses acolytes y développent un blues-noisy, abrasif, furibard et d’une sublime noirceur. Le duo de guitares Zedek/Brokaw apporte une tension saisissante à ces longs morceaux envoûtants. Surtout que plane sur cette musique déjà remarquable, la voix de Thalia Zedek. Une voix âpre et éraillée, où chaque aspérité comme chez le regretté Vic Chessnutt, porte la marque d’une vie tourmentée. Une voix de quelqu’un qui a vu le fond du trou et qui en est remonté. Une voix qui vous dévoile autant qu’elle ne se dévoile elle même.

La dame poursuivra à partir des années 2000 une carrière solo, d’abord sous son propre nom puis sous celui de Thalia Zedek Band, une fois la formation l’accompagnant stabilisée. Son inspiration s’est faite plus inégale malgré des fulgurances toujours aussi splendides. Sa musique s’est également apaisée et ses disques récents naviguent plus vers des terres folk ou classic rock. Pourtant, cette grande dame n’a rien perdu de sa remarquable intensité même quand elle chante des ballades plus classiques. En témoigne son très beau dernier mini album, sorti tout récemment chez Thrill Jockey et sobrement intitulé 6. Au fil de ces six morceaux entre américana et country, on pourrait presque penser que cette éternelle écorchée vive semble apercevoir à l’horizon, le bout d’une propre reconstruction qu’elle a tenté de bâtir note après note, tout au long de sa carrière.
En tout cas, les occasions de croiser le chemin d’une artiste aussi singulière qu’intense ne sont pas légions. Louper celle-ci serait donc rien de moins qu’impardonnable.

Surtout que les deux formations complétant la soirée font partie de celles que l’on apprécie tout particulièrement dans notre foisonnante scène locale. Il y aura donc le duo Chatterbox composé de Camille et Jérémie (jouant également dans les excellents Formica). Nous avions beaucoup aimé le lancinant The Walk gravé sur la compilation Embebbed de la chic bande In My Bed. Nous avions aussi trouvé bien trop court leur set de la soirée de lancement au Jardin Moderne. Ils avaient joué face à face, elle au clavier, lui à la guitare et la voix rauque et râpeuse de la demoiselle s’alliait joliment aux accents nasillards du monsieur. Leurs morceaux brefs et directs faisaient délicieusement écho à l’indy pop épurée des Young Marble Giant ou celle plus abrasives des Vaselines. Voici donc l’occasion de voir où en est ce joli projet.

Retrouvez par ici le duo interviewé par nos soins.

Autre duo que l’on aime beaucoup, Février est composé d’Emilie au chant et de Don Lurie à la guitare (animateur régulier de l’émission kérozène sur canal B et pilier de l’association Kfuel). Le duo a sorti sur bandcamp une excellente Démo deux titres où il déploie un slowcore atmosphérique et à vif, proche des immenses Slint ou du duo canadien Mecca Normal. Sur scène, nous apprécions tout particulièrement leur interprétation fiévreuse et habitée. Si le contraste entre la frêle silhouette de la chanteuse et la carrure imposante du guitariste fait son petit effet, c’est surtout l’uniformité de l’intensité de leur jeu de scène qui frappe. Que ce soient les coups de butoir tout en déséquilibre du Don ou la voix au bord de la déchirure de la chanteuse, l’ensemble fait preuve d’une grande cohérence émotionnelle. Ils font donc logiquement partie des groupes que nous suivons de près et nous ne louperons donc pas l’opportunité de voir comment leur toute récente tournée dans le sud de la France (en compagnie de My Sleeping Doll) a fait évoluer le projet.

Mercredi 19 mars 2014 – L’Avant-Scène, 69 boulevard de la Tour d’Auvergne, Rennes – 21h – 6€

6 commentaires sur “Thalia Zedek à L’Avant Scène : Les légendes discrètes sont les plus belles

  1. Fix

    On ne demande pas, on ne dit pas.

  2. Mr.B.

    Tu as mes mercis à vie pour m’avoir un jour prêter ce disque.

  3. Fix

    à demain ?

  4. David

    On ne dit pas « à demain ? » mais à demain !!!… La ponctuation est importante 🙂
    Et puis ce « prêter » m’écorche les yeux mon cher Mr.B ! Pauvres enfants… (désolé pour la private joke).

  5. chatterboy

    l’horaire c’est 20h30 pour chatterbox

  6. Mr.B.

    C’est un peu radio Londres nos échanges quand même. A ce soir en tout cas et je serai à l’heure pour Chatterbox.

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