Squat du DAL rue de Fougères, l’Etat et la mairie au banc des accusés


Squat rue de Fougères 1Vendredi 25 février, les militants de Droit Au Logement 35 ont investi les anciens locaux de la Direction départementale de l’agriculture et de la forêt,  280 rue de Fougères à Rennes. Une action pour loger 80 personnes, dont des enfants. Mais aussi pour alerter l’Etat et la municipalité sur l’urgence de la situation des demandeurs d’asile et des réfugiés politiques.

Un vaste bâtiment, rue de Fougères, avec un panneau accroché sur la grille d’entrée : « A Vendre ». Fermé depuis des mois, les lieux ont récemment été rendus à la vie. Vendredi dernier, le DAL y a installé des demandeurs d’asile et des réfugiés politiques. La plupart étaient ballottés de foyers d’hébergement en foyers d’hébergement, certains se trouvaient même à la rue. Depuis vendredi près de 80 personnes (parmi elles des familles et 9 enfants) se sont installées rue de Fougères. Les conditions ne sont pas idéales : l’électricité et le chauffage manquent cruellement mais les nouveaux habitants se disent heureux de la situation. « Parfois, nous leur disons que certaines pièces ne sont pas habitables mais eux, nous répondent que ça leur convient très bien, reconnaît Yannick Cotin, le président du DAL 35. Les gens qui vivent dans le grand bâtiment ne sont plus totalement anonymes : « Ici, on est plus un repère, il y a de la solidarité et de la sécurité. » Et ce n’est pas rien tant la situation du logement des sans-papiers se détériore en France depuis plusieurs années.

Des moyens diminuentSquat rue de Fougères 3

Le nombre des demandeurs d’asile augmente et les moyens alloués par l’Etat diminuent. Et les deux mouvements semblent inéluctables. « Les plateformes d’accueil de trois départements bretons sur quatre ont fermé, seule celle de Rennes fonctionne encore mais il n’y a plus de place », explique Armelle Bounya, militante du DAL et de Réseau Education Sans Frontières (RESF). En théorie, les Plateformes d’Accueil des Demandeurs d’Asile (PADA) s’occupent de l’enregistrement des demandeurs d’asile et de leur orientation. Là, selon la loi, l’Etat doit les loger puisqu’il leur est interdit de travailler. Mais en pratique, les Centre d’Accueil des Demandeurs d’Asile (CADA) où doivent être hébergés et suivis les demandeurs d’asile sont saturés : « On estime que 100 personnes arrivent chaque mois et que seules 3 ou 4 en sortent, continue Armelle Bounya. La plupart de ceux qui sont ici sont en attente d’une place en CADA que, dans le meilleur des cas, ils obtiendront dans six mois ».

Squat rue de Fougères 4Ouvrir un squat est aussi pour le DAL une opération destinée à interpeler les pouvoirs publics qui sont dans l’obligation légale d’offrir un toit aux plus démunis. Et que ça soit la préfecture, et donc le gouvernement de droite, ou la mairie de Rennes et sa majorité de gauche, le DAL dénonce la non-assistance à personne en danger. Ce côté politique de l’engagement est complètement assumé par les militants. « Au DAL, nous avons une image d’extra-légalistes, de gauchistes mais nous ne sommes pas financés par l’Etat ou les collectivités publiques, nous sommes libres d’engager de telles actions, ce que ne peuvent pas faire les autres associations », confirme Yannick Cotin.

Une procédure d’expulsion engagée

Et l’ouverture « illégale » de ces bâtiments inhabités fonctionne. En 2010, le DAL 35 a mis à disposition trois autres squats pour des demandeurs d’asiles. Lors d’une conférence de presse, devant micros et caméras, Daniel Delaveau, le maire de Rennes prenant soudainement en considération la gravité de la situation, avait alors demandé à la Préfecture de « loger dignement » les demandeurs d’asile du squat rue Louis-Postel. A la fin du mois de décembre, les 80 squatteurs de la rue Louis-Postel qui vivaient dans des conditions terribles, avaient été relogés. Depuis, les deux autres squats ont, eux, obtenus six mois de délai. Le président du DAL 35espère que cela fonctionnera ainsi pour le nouveau Squat rue de Fougères 5squat rue de Fougères.

Mardi, dans la journée, la Préfecture a néanmoins confirmé qu’une procédure d’expulsion a été engagée. Mais aucune notification par huissier n’avait été reçue au squat de la rue de Fougères. Les militants du DAL et les habitants semblaient sereins : face au drame que vivent les familles des demandeurs d’asiles, il paraitrait tout à fait inhumain de les rejeter à leur errance précaire. « Il y a des enfants parmi les habitants, la Préfecture et la ville ne seraient pas légitimes à déloger ces gens alors que les 48 heures où le flagrant délit est encore possible sont dépassées, note Yannick Cotin. Mais on n’est jamais tout à fait à l’abri. » Et de fait, un huissier est venu constater l’occupation dans la journée, et dès mercredi une ordonnance d’expulsion a été prise par le Tribunal de Grande Instance.  Il semble que la jurisprudence se soit durcie, comme si la loi Loppsi 2 avait déjà été votée. En son article 32 ter A relatif aux «procédures d’évacuation forcée des campement illicites», la Préfecture a-t-elle trouvé le modèle de l’évacuation des squats d’urgence mis en place par le DAL? A suivre.

5 commentaires sur “Squat du DAL rue de Fougères, l’Etat et la mairie au banc des accusés

  1. Simones

    Merci de ne pas dire n’importe quoi au niveau juridique.Cet article est à ce sujet grotesque. Aucune analyse technique des procédures utilisées par les autorités pour expulser ces personnest. On reste dans le flou.Pourtant il est nécessaire de bien comprendre dans le détail les mécanismes si on veut s’en prémunir. A moins que l’on fasse profession essentielle de gémir sur l’ignominie des affreux expulseurs si méchants…

  2. Marcel

    Parlons de procédure bien que je ne sois pas un juriste émérite. Pendant que des représentants du DAL 35 étaient en réunion à la préfecture, d’autres membres ont reçu d’un huissier au 280 rue de Fougères une ordonnance du président du TGI de Rennes, Monsieur Couturier. Cette ordonnance faisant suite à une requête du préfet n’était pas accompagnée de cette requête ni de ses motifs. Cette ordonnance autorisait l’expulsion et l’utilisation de la force publique par le préfet. La feuille de papier signée par Monsieur Couturier n’était adressée à personne,a fortiori à nul individu présent, bien que le liste des occupants ait été fournie à la préfecture et l’huissier. Jusqu’à nouvel ordre, toute décision de justice doit être motivée et les possibilités de faire appel indiquées. Rien de tel ici, pas de nom donc, pas de motif, pas d’article de loi cité; et comment faire appel sans ces éléments? L’ordonnance de Monsieur Couturier est-elle un blanc-seing au préfet et donc à l’arbitraire?
    Quant aux « affreux expulseurs si méchants » de tante Simone ce sont des assassins de vouloir mettre dehors femmes,bébés, enfants et malades à la rue alors que c’est l’Etat qui devrait les loger,pas le DAL. L’iilégalité de l’Etat légitime l’action du DAL 35. Vive le DAL

  3. T.

    @ Simone : Serait-il possible d’être plus précise sur le « n’importe quoi [dit] au niveau juridique » ? Et en quoi l’article est grotesque à ce sujet ? Pour ce qui est du flou, je pense que celui-ci est en partie dissipé ici : http://dal35.blogspot.com/2011/03/iniquite-dun-jugement.html.

  4. DELSART PAOLA

    SALUTATIONS ET BON COURAGE POUR TENIR CETTE BELLE RÉQUISITION. PREUVE EST FAITE ENCORE UNE FOIS QU IL EXISTE BIEN DES SOLUTIONS DE LOGEMENTS. LA QUESTION JURIDIQUE EST IMPORTANTE PARCE QUE ELLE PEUT DONNER UNE CERTAINE Légitimité à L ACTION. MAIS LA VRAI NÉGOCIATION ET LES VRAI RÉPONSES SE TROUVENT TOUJOURS DANS LE RAPPORT DE FORCE.

  5. Corre Erwan

    Bonjour à vous,
    et bravo au DAL pour son action.
    Je m’étonnerai toujours de constater que la Mairie de Rennes et la Préfecture trouve toujours le moyen de saisir la justice prestement pour faire cesser ces troubles à l’ordre public que constituent, manifestement, le fait de squatter des immeubles vides et sans confort par ces pauvres personnes, alors que d’un autre côté, ils ne font rien quand ce sont eux qui sont pris en défaut.
    Dans mon cas, je vois que la Mairie est en partie accusée de manquement grave à la législation actuelle – vétusté, aucune norme anti-incendie respectée…- dans un des bâtiments dont elle est en partie propriétaire, en l’occurrence les locaux situés sous mon appartement, Place St Germain à Rennes. Je suis en procès depuis 1 an et demi, il y a eu 2 rapport d’expertises, accablants… remis au juge le 3 janvier 2011 et depuis rien… Ni la proprio, ni l’agence à qui je loue l’appartement, et donc encore moins le syndic et la Ville de Rennes n’ont réagit.
    J’ai écrit au Maire, qui ‘a pas daigné ma répondre… M. Boucheron et M. Hervé ont au moins eu le temps de le faire. Alors Monsieur Delaveau, qu’avez-vous à me répondre à ce sujet ? Que c’est une affaire privée, que vous ne saviez pas, que cela ne vous concerne pas ? Et dois-je, moi, continuer à payer pour un logement qui est hors-norme ? La loi, là, s’applique beaucoup moins rapidement à ce que je vois.
    Alors, de grâce, vous tous les responsable, faite le nécessaire pour que toutes ces personnes ne voient seulement en la France un pays où le droit force les gens à dormir dans la rue…

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