Route du Rock 2013

Cette année encore, du 14 au 17 août, le plus malouin des festivals présente sa collection été avec une programmation une nouvelle fois plus qu’intéressante. C’est parfois pointu, souvent malin et fréquemment alléchant. Il ne vous reste donc plus qu’à hésiter entre vos lunettes de soleil et vos bottes en caoutchouc (faut prévoir…), et à rejoindre les rangs des aficionados du festival.

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L’échec de 2012 : vers une programmation plus sexy ?

D’autant qu’après la douche froide de la baisse de fréquentation de l’an dernier (13 000 entrées payantes en 2012, contre 20 000 en 2011) et les pertes financières inhérentes à celle-ci, les organisateurs ont essayé de changer un peu la donne.

Car en plus d’un déficit en partie certainement dû aux effets de la crise (le contexte économique semble toucher durement tous les festivals, leurs publics devant plus ou moins resserrer leurs dépenses), les organisateurs soupçonnent une programmation sans véritable « tête d’affiche » d’avoir moins rassemblé que les années précédentes, tout comme l’absence de groupes punchy, qui permettent au public de se lâcher en fin de soirée.

De notre côté, on ne leur jettera pas la pierre, tant pour notre part, nous nous étions reconnus dans cette programmation certes plus ambitieuse, mais souvent diablement excitante. On comprendra tout aussi aisément que cette année, les programmateurs aient fait le choix d’augmenter le budget des cachets de 100 000 euros et d’opter pour une programmation plus variée, avec des têtes d’affiche et des groupes électro pour finir les soirées sur une note plus dansante.

La Route du Rock 2013 : quatre lieux, quatre ambiances :

2012-08-RDR2012-F_Floret-alter1fo-005Côté lieu, l’imperturbable et champêtre Fort Saint Père (qui a parlé de boue ?) est comme à l’accoutumée réquisitionné pour accueillir les rockeurs du monde entier, avec comme toujours, une grande scène sur laquelle se dérouleront la majorité des concerts. Au même endroit, une deuxième scène, autrefois dite « de la tour », aujourd’hui scène « des remparts » permettra de rythmer la soirée avec encore plus d’efficacité.

Cette nouvelle scène change de nom, mais aussi de taille et de place. La petite scène de la Tour, qui offrait l’avantage d’une grande proximité avec les groupes (mais aussi l’inconvénient de sa taille) est en effet désormais remplacée par un plateau plus conséquent, situé en amont des remparts, dans un espace que la direction du Festival essaie de faire vivre depuis plusieurs années sans y réussir totalement (à ce propos, voir la chouette interview de François Floret, programmateur du festival par nos amis de Pop is On Fire) [pour les habitués : cette nouvelle scène se trouvera à la place des stands des labels indé l’an dernier]. Plus grande, cette nouvelle scène permettra d’accueillir des groupes plus conséquents, et de fait, d’alterner les concerts entre grande scène et scène des Remparts, afin de rythmer davantage les soirées.

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La scène des Remparts entrera en lice dès le départ puisque les premiers concerts du Fort y auront lieu chaque soir. Avec à la clef, un moment plus convivial et pour le groupe, et pour le public : les premiers arrivés feront nombre devant la scène et éviteront, comme l’an dernier, ce moment un peu flottant où le premier groupe jouait devant un public clairsemé du fait de l’immensité de la scène et de l’heure. Le Fort ouvrira donc ses portes assez tôt chaque soir puisque les premiers concerts débuteront tous à 18h30, comme l’an dernier.

Il ne faudra pas être en retard tant ces entrées en matière s’annoncent prometteuses : le jeudi, avec le jeune Hollandais Jacco Gardner et ses pop-songs psychées à la Syd Barrett jouant d’arrangements raffinés et délicats entre Sagittarius et Zombies, rassemblées sur le bien nommé Cabinet of Curiosities (2013) ou le vendredi avec l’encore plus minot de Caroline du Nord Jackson Scott (20 ans à peine) qui, tout en n’y ayant apparemment jamais mis les pieds, signe un Melbourne autoproduit, ressorti sur Fat Possum (en septembre en France) et dont l’écoute de quelques titres glanés ça et là nous rappelle les pérégrinations lo-fi d’un Bradford Cox (Deerhunter, Atlas Sound), ce qui est loin de nous déplaire. Le samedi, c’est le duo américain Widowspeak qui ouvrira les hostilités tout en douceur ouatée : leur pop éthérée flirte avec Hope Sandoval (Mazzy Star) et s’avance, nonchalante, pour conquérir les Elysian Fields avec deux Lps pour étendards, Widowspeak (2011) et Almanach (novembre 2012).

Un peu plus tard, sur la même scène, on retrouvera les Moon Duo le jeudi : groupe formé par le leader des Wooden Shjips, Eric Johnson qui est allé chercher sa compagne pour ce nouveau projet, Moon Duo plane entre rythmiques répétitives kraut et son psyché pénétré par les brumes de San Francisco (phénomène météorologique ou volutes thébaïques ?). Le vendredi, d’autres Californiens joueront à l’ombre des remparts : les Allah-Las, dont le premier LP a été produit par Nick Waterhouse, feront surfer les festivaliers sur une pop west coast aux guitares surf et garage aux accents rétro. On est confiant : des gars qui reprennent Alone again or de Love ne peuvent foncièrement pas être mauvais. On est encore plus curieux de découvrir la rage juvénile du rock échevelé des Parquet Courts, programmés le lendemain, tant les New Yorkais venus du Texas, imposent leurs chansons lo-fi jouées crânement à toute berzingue sur un premier véritable Lp (Light up gold, 2013) avec parfois, une nonchalance toute Malkmus-ienne.

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Pour ne pas s’endormir, la petite scène reprendra également du service en fin de soirée : le vendredi, on y retrouvera l’un de nos chouchous, le trio strasbourgeois d’Electric Electric qui nous a notamment bien mis la tête en vrac avec la sortie de son second album, le bien nommé Discipline (2012) et une prestation assénée avec une classe folle à l’Antipode au printemps dernier. En onze titres haletants, toute batterie dehors et frappe percussive le mors aux dents, le trio Strasbourgeois nous a collé une raclée dont nos oreilles bourdonnent encore. Ces gars sont des affamés. Qui avec une boulimie gargantuesque digèrent ensemble déflagration noise, rigueur math-rock, puissance tribale, mais aussi structure répétitive de la musique minimaliste ou transe électronique sur un dancefloor plein de sueur. Immanquables.

 

2012-08-10-Route_du_rock-vendredi-ALTER1FO-009Le lendemain, on aura le plaisir d’autres retrouvailles : Etienne Jaumet nous avait en effet régalé d’un excellent set à la Route du Rock en solo il y a deux ans. Il revient cette année avec son second projet, mené de concert avec Cosmic Neman (également batteur d’Herman Düne), le respecté Zombie Zombie. Mêlant batterie métronomique à la sauce Kraut, sautillements barrés et asphalte déroulée à la Kraftwerk à des dégoulinades à la John Carpenter, le duo électro pop devrait tout également nous faire nous déhancher en oubliant les premiers signes de fatigue. Autre retour, le samedi : celui des Montrélais de Suuns, qui après un Zeroes Qc (2010) et deux passages malouins remarqués, reviennent défendre leurs Images du Futur (2013) tendues de noirceur electro pop, sombres et tétanisées.

Eux aussi au Fort, les djs des Magnetic Friends auront une nouvelle fois en charge de réchauffer l’ambiance entre les concerts.

Les plages de St Malo (les après-midis du jeudi au samedi), le Théâtre Chateaubriand (le vendredi après-midi) mais aussi La Nouvelle Vague (le mercredi soir, en apéritif) seront également réquisitionnés, histoire de profiter des embruns salés de la cité corsaire de nuit comme de jour.

Des après-midis les doigts de pieds en éventail

Si vous êtes plutôt lève-tôt (et oui, 14h30, c’est plutôt tôt en langage festivalier), vous pourrez commencer la journée par une petite découverte musicale sur la plage Bon-Secours avec des dj sets mettant en avant trois labels français indépendants dès 14h30, puis dès 16h, poursuivre avec le live d’un artiste issu de leur catalogue. Le jeudi, c’est Clapping Music qui ouvrira le festival, suivi par Hands in the Dark le vendredi et Desire le samedi. Tout ça avant de vous étirez tranquillement sur votre serviette de plage au son de lives plus que prometteurs.

Orval Carlos Sibelius Super FormaLe jeudi, Orval Carlos Sibelius, connu par ici aux côtés des excellentissimes Centenaire, devrait accompagner vos pensées vagabondes sur les ondes iodées avec sa pop aussi alambiquée qu’essentielle, tant elle télescope et bouscule ses références (de Syd Barett au rock progressif, des Who à la folk anglaise en passant par des incursions orientales) en prenant des chemins de traverse. Le lendemain vous pourrez piquer une tête en compagnie du dub mutant et rêveur des collages du Montpellierain Cankun, avant d’enchaîner les brasses et les dos crawlés au son de la musique de Trésors qui, selon la légende, aurait mixé son dernier ep (Missionnaires, 2012) dans un entrepôt de Baltimore. Les tours murées des rues de la nouvelle Hamsterdam vous paraîtront pourtant bien lointaines sous les flots de la cité corsaire. Peu importe, l’electro pop narcotique des Trésors s’en accommodera tout aussi bien.

Christophe Brault - photo Caro alter1foSi vous détestez les grains de sable qui grattent entre les orteils, vous aurez tout de même une belle alternative dans les fauteuils moelleux du Théâtre Chateaubriand le vendredi dès 14h30 avec Christophe Brault, qu’on ne présente plus ici (ancien disquaire de l’institution Rennes Musique et chargé de cours à l’université Rennes 2 en musicologie, désormais conférencier bondissant et passionnant et également star de l’émission Music Machine sur nos pages diffusée sur RCR) qui se chargera de retracer en deux heures (ça ne va pas être facile) l’histoire du rock garage. Quand on connaît la passion de notre homme pour les Thee Oh Sees, Ty Segall et autres Wooden Shjips actuels, on se doute qu’il sera l’homme de la situation. Il vous plongera dans la compilation Nuggets et vous fera (re) découvrir Sonics, Seeds et Cramps en passant par Jay Reatard, on en passe et des meilleurs. Une chose est sûre, ça risque fort de décoiffer (vous, pas Christophe !).

Pour les amateurs des concerts au Palais du Grand Large, le festival, contraint de faire des économies, a décidé d’abandonner ces concerts de l’après-midi cette année. On repense avec un pincement aux ventricules, aux découvertes que nous y fîmes autrefois (oui, Grizzly Bear, Animal Collective, Patrick Watson, Owen Palett alors qu’il était encore Final Fantasy, Four Tet, Gravenhurst…).

Le Fort St Père : un bastion pop-rock-électro-indie

Nick Cave & The Bad Seeds - Photo presseAu niveau musical, les soirées du Fort St Père nous offriront des valeurs sûres et (très) attendues avec bien évidemment Nick Cave et ses Bad Seeds. Bon présenter le parcours du bonhomme en quelques lignes relève de la gageure la plus absolue, tant l’Australien a derrière lui une carrière pléthorique que ce soit avec les Bad Seeds donc, Birthday Party ou plus récemment Grinderman et un nombre de sorties discographiques assez pléthorique. Qu’importe : depuis plus de trente ans, Nick Cave (avec ou sans ses acolytes) cultive et façonne un univers particulier, mêlant blues crasseux, mystique biblique, lyrisme ténébreux et rock qui racle. En live, chaque concert peut se transformer en grande messe électrique, dont l’officiant à la voix de crooner profonde et sombre, fascine par son charisme sauvage. Après un très bon Dig !!! Lazarus Dig !!!, en 2007, Nick Cave & The Bad Seeds reviennent qui plus est avec un bel album (même si plus lent et plus calme en apparence), Push The Sky Away (2012), dont on attend de voir se développer les tensions sous-jacentes sur la scène du Fort St Père. D’autant qu’on est pour notre part de grands fans des Dirty Three et que retrouver Warren Ellis au côté du grand monsieur nous ravit d’aise.

Godspeed you black Emperor photo presseAutre tête d’affiche, les mythiques Godspeed You ! Black Emperor, qui depuis 1994, nous renvoient au tapis avec leur post-rock essentiellement instrumental tout en montées, accalmies incandescentes et tensions. Au travers de plusieurs albums essentiels ( F#A#, Infinity, 1997, Lift Your Skinny Fists Like Antennas to Heaven, 2000 ou Yanqui U.X.O. datant de 2002), les Montréalais ont creusé le sillon d’instrumentaux aux développements souvent épiques. Les membres du groupe se consacrant cependant à leurs autres formations (A Silver Mt Zion, entre autres), le silence discographique des Godspeed (en revanche, une tournée a eu lieu en 2010) durait depuis dix ans. Jusqu’à ce que, peut-être amenés à sortir du silence par les événements du printemps érable (l’engagement politique anticapitaliste du groupe ayant toujours été très fort), Allelujah! Don’t Bend! Ascend! voit le jour en automne 2012 (on y entend d’ailleurs les fameuses casseroles du Printemps Érable à la fin de Mladic). Nul doute que les fans du groupe attendent leur venue au Fort St Père avec une ineffable impatience. Nous en serons.

HOT CHIP Route du Rock Photo presseIl en sera de même pour les essentiels Hot Chip que nous vénérons quasi depuis notre première découverte, lors des TransMusicales 2004. On se souvient qu’on travaillait le lendemain. On se souvient qu’on avait dit qu’on partait. On se souvient surtout qu’on est resté jusqu’au bout du concert, tant les cinq Londoniens, dans leurs improbables tenues (costume d’ours entre autre !), nous avaient mis la tête à l’envers à coup d’hits electro-pop sortis de nulle part, totalement addictifs dès la première écoute. On se souvient qu’on avait acheté l’album Coming on Strong avec sa première pochette, avant sa ressortie chez Kitsuné en 2005. Et qu’on a depuis suivi toutes leurs sorties discographiques avec un plaisir jamais démenti. On se dit souvent que la descendance de la soul music s’incarne en réalité dans ce groupe, qui sous ses airs électroniques, transpire le groove le plus classieux et le plus irrésistible.

EFTERKLANG Route du Rock photo presseOn attendra aussi avec une impatience fébrile un autre de nos chouchous, le groupe danois Efterklang, dont la dernière venue dans nos contrées (à l’Antipode, en novembre 2009) nous a laissé un souvenir magique et ému. Les nouveaux rois du Danemark nous y avaient mis une belle raclée tout en douceur, funambules multi-instrumentistes voltigeant d’harmonies vocales en arrangements à couper le souffle. Son chanteur, Casper Clausen, désespérément classe, nous avait même fait changer d’avis sur les pantalons à pinces (sans âge, pour le sien) et les espadrilles, tant son charisme, sans être ostentatoire pour un sou, nous avait captivés de bout en bout d’un set époustouflant. Des développements rythmiques puissants, organiques s’appuyant parfois sur des bases électroniques, des mélodies tout à la fois novatrices et évidentes, dont la charge émotionnelle pourtant déjà forte sur disque (Tripper -2004-, puis le sublime Parades -2007- repris en live avec l’Orchestre National de Chambre du Danemark sur Performing Parades, puis Magic Chairs -2010-et récemment Piramida -2012) se révèle encore davantage en live, font d’Efterklang l’un des groupes à ne pas manquer de cette édition.

Route du rock 2012 - les remparts alter1fo.comTout aussi pop et bien aussi barrés, les Australiens de Tame Impala sont tout aussi attendus. La faute à un second album (mais le premier, Innerspeak -2010- n’était pas mal non plus !) Lonerism (2012) qui a affolé les radars du public et de la critique, grand moment de bordel farfelu, grouillant d’inventivité débridée, avec huit cent cinquante idées par morceaux, pas une de moins. Le groupe mené par Kevin Parker mêlant dans sa marmite psychédélique mélodies pop, échos tourbillonnants et arrangements multicolores, devrait sans aucun doute ravir les festivaliers du Fort avides de grand raout sonique.

Les amateurs de pop devraient tout également ne pas bouder leur plaisir avec les Local Natives. Si vous aimez Alt-J, BRNS, la fougue de Breton ou les sautillements à la Foals, vous devriez pareillement apprécier le quatuor de Los Angeles, dont les harmonies vocales à gorge déployée, les mélodies à l’évidence immédiate et l’énergie communicative sont autant d’invitations à sourire béatement dans un Fort St Père ensoleillé (si,si!). D’autant que les Californiens ont invité le guitariste et claviériste des National, Aaron Dessner à la production de leur second album, Hummingbird (2013), excusez du peu.

Bénévoles @ Route du Rock 2012 - Alter1foSignés chez Bella Union, les Français de Concrete Knives devraient également faire se déhancher le Fort sur leurs hymnes pop directs et décomplexés. Les Normands aiment l’énergie du live, les refrains à reprendre à tue-tête (à retrouver sur Be Your Own King, 2012) et entrainent un bon paquet de fans qui font corps avec leur dynamisme débridé. Moins foutraques mais avec déjà 7 albums au compteur (et aussi un label Woodsist), les ingoolisables Woods de Brooklyn devraient également empoter les festivaliers dans leur univers. Autrement dit, une sacrée tripotée de chansons pop, à mi chemin entre pop folk sixties (de très loin, les Byrds sur Is it Honest) et indie pop, rappelant parfois dans leurs meilleurs moments les essentiels Shins (Cali in a cup). Moins flamboyant, plus en retenue, mais flirtant avec les hauteurs, le trio suédois de Junip devrait renvoyer tout le monde dans ses longueurs à l’ombre des remparts. On avait d’ailleurs écouté, bouche bée, un José Gonzales tricotant ses arpèges alambiqués et enchanteurs lors une précédente Route du Rock (collection Hiver). Avec ses deux potes d’enfance, le Suédois va vers une musique moins boisée et plus électrique (pour ne pas dire électronique). Mais qui devrait d’autant plus s’adapter à un festival en plein air.

Route du Rock 2012 - alter1fo.comPour les amateurs de musique indociles, qui déboulent pied au plancher, il faudra certainement découvrir en live les quatre d’Iceage qui remplacent au pied levé les DIIV, malheureusement forfaits pour cette édition. Les garnements de Copenhague ont sorti deux albums de rage incandescente, New Brigade (2011) et You’re Nothing (2013, et balancent crânement, les doigts collés dans la prise, leur punk rock frontal qui refoule du goulot. Les amateurs de pogo pourront également s’en donner à corps joie sur les morceaux crassoux des Bass Drum of Death bien moins punk, mais carrément garages. Leurs mélodies débraillées fleurent davantage les contrées californiennes (Oui, Ty Segall, Thee oh Sees) que les sombres marécages du Mississipi dont ils sont issus. On devrait transpirer. Et pas qu’un peu.

Pour finir, une dernière constatation : cette année, on risque aussi de se déhancher parfois jusqu’à pas d’heure. Sous les remparts du Fort St Père, l’électro dansante revient en force dans la programmation. On commence le jeudi avec le post-punk (voire l’electro pop) survolté des !!! qu’on ne présente plus. Efficaces, les coups de boutoir du sextet New Yorkais continuent de l’être sur son dernier album en date, Thr!ller, sorti au printemps. Mais c’est surtout en live qu’il faut les voir, tant la formation, menée par Nic Offer, son infatigable chanteur monté sur ressorts, dépense en énergie pour faire danser les foules.

Fuck Buttons - Route du Rock Photo presseLe même soir, leur succédera un autre fleuron de l’électro bien barrée. Le duo Fuck Buttons qui nous avait perforé les oreilles avec une prestation mémorable au Palais du Grand Large, fait son retour à la Route du Rock sur la grande scène cette fois-ci. Et autant dire qu’il faut bien ça, un espace immense face à eux, pour laisser leurs cathédrales soniques faites de bruit, de drones, mêlant murs du sons à la My Bloody Valentine et travail sur les textures électroniques, se développer avec toute l’ampleur qu’elles méritent. Après un premier album à la pochette quasi criarde (Street Horrrsing) et un second Tarrot Sport (2009) qui mit la critique et les auditeurs sur son chemin, le duo a sorti cette année un (nouveau) brillant troisième album, Slow Focus, gemme sonore aussi barré que fascinant. Génial, mais n’oubliez surtout pas vos bouchons.

Le lendemain, c’est le duo TNGHT (prononcez Tonight) -déjà vu par ici aux TransMusicales- qui nous amènera jusqu’aux dernières heures de la nuit. Hudson Mohawke et son comparse beatmaker Lunice devraient mettre le feu au Fort avec leurs infrabasses vrillées et malades. Leur son lourd et massif ne fait pas dans le sentiment et écrase le dancefloor sous des coups de massue à la toxicité évidente. Ca va guincher du booty, on vous le dit.

Disclosure - Route du Rock - Photo presseQuant aux plus qu’attendus frangins Disclosure, c’est à eux que reviendra l’honneur d’achever cette nouvelle édition de la Route du Rock. Le duo anglais, acclamé partout (ils ont même détrôné les Daft Punk de la place de leader dans les charts britannique), devrait relever le défi haut la main, tant les deux gamins maîtrisent sur le bout des doigts les lives suintant d’une house à faire se retourner n’importe quel dancefloor. Leur premier album Settle, éclatant les structures club à coup de refrains à la pop évidente et reboostant la pop en lui insufflant ses rythmiques implacables, ils devraient pareillement dynamiter le dancefloor du festival.

L’apéro à la Route du Rock

Et puis comme si ça ne suffisait pas, l’équipe malouine propose une soirée complète autour du label anglais indé Domino en guise d’apéritif à la Nouvelle Vague le mercredi 14 août.

Julia Holter Route du rock photo presseOn y retrouvera l’américaine Julia Holter dont la folk hantée évoque davantage les Wurthering Heights (Kate Bush cherchant Heathcliff) ou le tendre fog londonien d’un Stereolab que la Californie rayonnante d’où elle vient. Avec en plus cette approche expérimentale (Laurie Anderson ou Nico Mulhy, très loin dans le brouillard) et un intérêt pour Euripide revendiqué (!) (Tragedy, 2011 s’inspirait de la pièce Hippolyte, le second Hekstasis, 2012, trouve également son titre dans la langue de Sophocle), la miss n’est pas là pour faire de la figuration.

Route du Rock 2011 - photo Caro Alter1foOn aura également le grand plaisir de retrouver les Clinic de Liverpool, déjà venus à la Route du Rock, cachés derrière leur masque de chirurgien, qui nous assèneront avec la classe qu’on leur connaît leur post-punk aux atours parfois pop et psyché. Quand on sait également qu’ils ont fait appel à Daniel Lopatin (aka Oneohtrix Point Never) pour mixer en partie leur petit dernier (Free of Reign, 2012) et ont ressorti ses remixes sous forme d’une version alternative de l’album à tomber par terre (Free Reign II, 2013), on ne peut qu’adhérer.

Les Canadiens d’Austra, rassemblés autour de Katie Selmanis, permettront de finir la soirée sur une note plus électronique et un chouïa plus dansante. Après un Feel it break (2011), caverneux et sombre, Austra a pris une direction un brin plus lumineuse avec Olympia (2013), non plus seulement composé par la miss Selmanis, mais par le groupe en son ensemble. Bon, on est parfois irrité pour notre part par une tendance à pencher du côté d’Enja ou Dead Can Dance sur certains morceaux. Mais on se dit que la demoiselle, venue du classique et de l’opéra, aimant à mixer sonorités électroniques, voix et parfois textures orchestrales à un show visuel, aura peut-être raison de nos légères réticences en live. A voir, donc.

La dernière question en suspens, finalement, cette année encore, reste celle de la météo…

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Le site de la Route du Rock : http://www.laroutedurock.com/

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