Littérature (jeunesse ?) : l’autre moitié d’Anne-Laure Bondoux

L'autre moitié de moi-même, Anne-Laure Bondoux, Bayard 2011 - Bertrand Desprez, angence VU

 

Il paraît que cette auteure-née a reçu plein de prix et est déjà traduite dans un certain nombre de pays… Ah ? pardon, mais quand on cherche la petite bête dans les notes d’impression des livres, on ne fait pas toujours attention aux bandeaux, à l’actualité, aux présentoirs… on était donc passé à côté !

 

Enfin, pas tout à fait, La vie comme elle vient nous avait, avec bonheur, sauté sous les yeux au détour d’une bibliothèque municipale.

 

Là, c’est le hasard, drôle de hasard, qui, après nous avoir regardé un moment naviguer à vue dans l’étagère des nouveautés ado, nous fait tendre une main lasse vers celui-là, mis en évidence avec d’autres, donc, pas si évident que ça.

 

La photo de couverture, déjà, ouvre une porte, de nostalgie semble-t-il… et le titre, L’autre moitié de moi-même, invite… qui ? moi ? elle ? nous ? et où ?

 

Allez, tant pis, on plonge, cette nuit, puisque rien ne s’y oppose… à part les heures qui tournent et mangent notre sommeil…

 

Anne-Laure Bondoux, face à une panne totale d’écriture après de grands succès, a un jour l’impression effarante de renverser un enfant sur son vélo. Rien de physique ne prouve l’accident, mais cet instant trouble profondément l’auteure, pour qui la seule écriture possible devient alors un genre d’autobiographie, « d’autopsy » de cet accident irréel, tenants et aboutissants.

 

Il y a la page blanche qui à nouveau se couvre, mais elle est froissée comme une boule de papier alu. Anne-Laure Bondoux va s’appliquer à la remettre à plat, à la faveur de bouleversements de sa vie personnelle et de révélations familiales, et, si rien n’est extraordinaire, tout marque, même et particulièrement ce qui vient de plus loin, d’autres vies que la sienne mais qui l’ont précédée et l’entourent encore.

 

La page ne sera plus lisse et, d’ailleurs, l’a-t-elle jamais été ? Mais elle est riche et dorénavant, on l’espère, un peu apprivoisée. Anne-Laure Bondoux se met en scène en suivant des lignes qui semblent suivre les méandres de son puits. Pourtant ce qu’on pourrait appeler son autofiction reste très construite et nous n’avons jamais l’impression d’être un réceptacle thérapeutique, ni de nous y perdre, mais bien d’accompagner son cheminement, et d’y trouver bien des appuis pour le nôtre.

 

Alors, littérature de jeunesse ?… Il y a fort à parier que de grands adolescents, en quête de leur propre identité dans un labyrinthe où pullulent des indicateurs aussi farceurs que le Cheschire Cat d’Alice, pourraient se sentir également em-portés par le parcours (ré)initiatique d’Anne-Laure Bondoux, et y apprendre qu’il n’y a pas d’âge pour prendre un recul salutaire… si douloureux et amer soit-il ! Et si l’un ou l’autre ose ensuite le prêter à un adulte autour de lui, l’auteure aura l’assurance d’avoir fait œuvre de jeunesse, qui « se passe » littéralement sans s’oublier jamais vraiment !

 

On apprécie grandement les images personnelles sous forme de petit album annoté à la fin du livre qui éclairent et rendent particulièrement palpables les événements relatés. Elles n’enlèvent rien à l’universel de cette « relation ». Et l’on sait gré à Anne-Laure Bondoux d’avoir osé. Vraiment !

 

 

L’autre moitié de moi-même, Anne-Laure Bondoux, Bayard, 13€90.

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