La Route du Rock 2017 – Présent radieux et futur à construire [bilan de l’édition 2017]

Alors que cette 27ème édition du festival malouin La Route du Rock s’achève sur un franc succès d’audience et un impeccable bilan artistique, la conférence de presse donnée par Alban Coutoux et François Floret a aussi beaucoup traité des diverses polémiques l’ayant émaillée (files d’attentes du vendredi et les désormais nationalement fameux tas de fumier du 15 août).

C’est juste entre  les prestations de Mac De Marco et d’Interpol que l’on retrouve dimanche soir Alban Coutoux (communication et co-programmateur) et François Floret (président et co-programmateur) pour l’indipensable conférence de presse bilan de l’édition. Celle-ci commence par la distribution d’un communiqué de presse long et détaillé (5 pages) concernant ce qu’il convient d’appeler le « fumiergate ».

Nous y reviendrons cependant plus tard car ce dont nous avons d’abord envie de parler c’est de l’excellence musicale de cette édition 2017. Les organisateurs ont répété à plusieurs reprises que pour cette année, ils ont augmenté leur budget artistique pour « muscler leur programmation », autant au niveau des têtes d’affiches qu’au niveau son, en n’hésitant pas à faire venir plus de groupes maniant le bruit et la fureur qu’à l’accoutumée. Pari tenu haut la main puisque les trois journées auront été des modèles d’équilibre et auront mis à rude épreuve nos petits corps en enchainant sans aucune pitié les concerts de haute volée.

La soirée de ce vendredi 18 août 2017 aura été un modèle du genre. A part un petit bémol sur celles de Froth et Foxygen, les prestations de grande qualité se sont suivies sans faiblir. On retient d’abord la prestation hors-norme de PJ Harvey. On a beau continué de trouver que les deux derniers disques de la dame sont assez peu inspirés, il nous a été impossible de résister à un concert d’un tel niveau. Son, scénographie, arrangements, setlist, musiciens.. tout est tellement à un niveau « autre » que l’on ne peut que s’incliner face à autant de travail et de précision. En plus de tout ça, il y a la voix de Polly Jean Harvey à la fois majestueuse et totalement intime qui nous aura transpercé le cœur d’un bout à l’autre du set.
Derrière ça, la retombée sur terre aurait pu être rude mais le talent nonchalant de Car Seat Headrest, la fureur d’Idles, la folie de Thee Oh Sees, l’élégance d’Helena Hauff et la générosité de DJ Shadow ont réussi l’exploit de prolonger la magie jusqu’au bout d’une soirée qui restera dans les annales.

Retrouvez notre report complet du vendredi.

Comme c’était prévisible, le samedi 19 fut moins flamboyant mais on en garde tout de même un souvenir tout à fait agréable. Le début de soirée nous a particulièrement enchanté avec une ouverture de grande classe par les Cold Pumas suivie d’une prestation savoureusement déglinguée des Parquet Courts et le retour gagnant d’Arab Strap qui aura su muscler sa mélancolie vacharde juste ce qu’il faut pour le plein air. La seconde partie de soirée nous aura moins emballés à l’exception de The Jesus & Mary Chain qu’on a trouvé plutôt honnête, même sans effet madeleine. L’engouement général pour Future Islands reste par contre un mystère insondable à nos yeux (et à nos oreilles) et nous avons loupé la très plébiscitée prestation de Soulwax pour garder des forces pour le dernier round.

Retrouvez notre report complet du samedi.

Après cette redescente (en douceur), la journée du dimanche 20 va réussir l’exploit de (presque) retrouver le niveau de qualité du vendredi. A l’exception de The Proper Ornament dont la pop folk s’est trop égarée dans les soli de guitares soporifiques à notre goût, nous n’avons eu que du très bon. Les finesses de l’americana d’Angel Olsen nous ont ravis. Nous avons eu le plaisir de nous faire cueillir à froid et par surprise par le rock garage fiévreux de Yak. Mac Demarco a laissé poindre le crooner redoutable derrière le branleur débonnaire. Interpol a fait une très belle démonstration d’élégance et de maîtrise (avec cette fois un effet madeleine à son taux maximum pour une partie de l’équipe). The Moonlandingz, même avec un petit manque de folie, aura assuré avec sa déglingue pop. Ty Segall a offert un grand moment de communion rock’n’roll avec une générosité remarquable. Enfin les Italiens de Tale of us ont bouclé la soirée avec classe avec leur techno hyper mélodique aux rythmiques luxuriantes et toute en finesse. Nous nous sommes donc à nouveau totalement régalés.

Retrouvez notre report complet du dimanche.

Nous ressortons donc de ces trois jours de festivités malouines comblés et ravis de constater que cette édition aura trouvé un parfait équilibre entre les découvertes ou groupes rares (qui font tout le sel du festival à nos oreilles) et les groupes plus fédérateurs.

A noter que, conséquence probable du décret du 7 août dernier s’appliquant à tous les lieux diffusant des « bruits » ou sons amplifiés qu’ils soient clos ou ouverts, le son était beaucoup moins fort qu’à l’accoutumée. Si le décret n’est pas sans poser problème pour les petits lieux, on vous invite d’ailleurs à lire ce très bon papier d’Agi-son à ce propos, il aura été très agréable de pouvoir causer entre les concerts tout en appréciant les excellentes et malicieuses sélections des toujours aussi impeccables Magnetic Friends à un volume satisfaisant.

Ce fut également une très belle édition en terme de fréquentation. Après le bouillon de l’édition 2016 dont la programmation extrêmement compliquée à mettre en place n’avait attiré que 13 000 entrées payantes, ce sont 26 700 personnes qui ont prix leurs billets pour le Fort cette année. Pour être plus précis, les organisateurs tiennent à ajouter les 950 spectateurs et professionnels de la soirée à la Nouvelle Vague (complète) de Saint-Malo, les 7500 spectateurs des concerts (gratuits) de la plage, les 300 spectateurs de la conférence sur le punk de notre cher Christophe Brault (complète elle aussi) et les 1000 spectateurs et participants des tournois Sports Are Not Dead sur la Plage de l’Eventail. Ce qui donne un total de 36 450 festivaliers et professionnels pour cette édition.
Malgré tous ces points très positifs, la conférence de presse s’est donc ouverte sur la distribution d’un long communiqué apportant de nombreuses précisions sur ce qui a mené au fameux fumier-gate. Rappelons pour ceux qui auraient réussi à louper l’info, que l’incident (ayant affolé les médias juste avant le festival) fut le dépôt par M. Lecoulant (agriculteur propriétaire d’une grande partie des terrains entourant le Fort et adjoint au maire de Saint-Père-Marc-en-poulet) de deux tas de fumier le 15 août aux abords du Fort. Péripétie qui, au final, n’aura guère incommodé les festivaliers mais qui prouve au moins l’attrait irrésistible du pittoresque pour nos médias web (même le site du Figaro a relayé la cruciale information). Ça aura au moins eu le mérite de nous changer un peu des sempiternelles appeaux à click du style « Cinq bonnes raisons de faire des selfies à la Route du Rock ».
Le seul vrai mérite de cet accident c’est de mettre à jour les tensions sous-jacentes existant entre le festival, M. Lecoulant et le maire de Saint-Père-Marc-en-poulet. Le communiqué nous en détaille l’historique et l’on découvre comment il serait passé progressivement du voisin sympa qui met à disposition des bottes de foin et désembourbe les voitures du parking aux menaces du style « Si ton patron ouvre sa gueule, ça aura des conséquences. » Le communiqué décrit également comment la mairie aurait progressivement écarté Rock Tympans des décisions sur les travaux d’aménagement du Fort. L’ambiance semble donc plus que tendue. Ce n’est sans doute pas la réponse du maire qui apaisera les choses. Comme François Floret l’a répété, le texte se termine sur « La Route souhaite et doit rester au Fort ». On suivra l’affaire de près et on espère que le dialogue sera plus constructif une fois les tensions du festival retombées.

La seconde polémique ayant largement été relayée par les réseaux sociaux concerne les queues importantes qu’ont du subir les festivaliers le vendredi. Sur ce coup là, on retrouve la poisse proverbiale du festival qui a de nouveau frappé avec une panne de réseau ayant perturbé le cashless et les saisies des entrées. L’incident est évidemment survenu alors que la foule était inhabituellement en avance pour cause de PJ jouant à 20h30. Alban Coutoux nous explique les raisons des perturbations et ajoute qu’au moins cette année tous les groupes étaient là. Même Mac Demarco qui a failli rester coincé dans un bus navette avec les festivaliers (en référence aux nombreuses annulations de dernière minute auxquelles le festival a du faire face).

En conclusion, on peut dire que ce fut largement une des plus belles éditions de la Route du Rock auxquelles nous ayons assisté. Une programmation d’une grande qualité et d’un remarquable équilibre entre grands noms et découvertes, un public nombreux et expressif (avec une mention spéciale à nos amis grands-bretons), un site désormais vraiment accueillant, une météo au beau fixe… un grand cru donc hélas un peu terni par les incertitudes laissées sur le futur du festival. Wait and see bien sûr et on souhaite ardemment qu’un dialogue plus constructif se reconstruise pour que l’on puisse encore longtemps vivre dans le Fort d’aussi chouettes événements musicaux.

Photos : Mr B

 

Bilan pensé et écrit par Mr B et Isa, en équipe réduite et sur les genoux,
avec mille pensées pour le reste de la team prise par d’heureux événements…

Des bises à ceux qui étaient avec nous mais aussi à ceux qui n’y étaient pas.


La Route du Rock Collection Eté 2017 a eu lieu du jeudi 17 août au dimanche 20 août.

Plus d’1fos : http://www.laroutedurock.com/


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