Instantanés électriques – Jean-noël Levavasseur

Le rock n’est pas que l’apanage des musiciens. Dans l’ombre, œuvrent des milliers de fourmis qui triment sang et eau pour leur amour du riff acéré. Parmi ces pâles travailleurs, certains optent pour la plume. Et parmi ces gratte-papiers compulsifs, nous allons nous intéresser au cas de Jean-Noël Levavasseur. Son (bon) goût pour les lettres et le punk l’ont amené à superviser des ouvrages collectifs de nouvelles noires et rock basées sur des groupes prisés par les amateurs de crachats et d’épingles à nourrice. Citons pour mémoire, The Clash, The Ramones, La Souris Déglinguée, Bérurier Noir et plus récemment The Cramps. Mais Jean-Noël n’a pas qu’une corde à son arc littéraire. Grâce à son métier de journaliste chez Ouest-France, il a acquis une expérience hors pair dans l’art de l’interview. Et quand il trouve enfin le temps de s’ennuyer, il classe et trie ses archives pour notre plus grand bonheur.

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« Instantanés électriques » est donc une collection d’interviews des acteurs musicaux de la scène rock française entre 1991 et 2001. Cette période post-rock alternatif, est l’une des moins connues, et l’ouvrage de 620 pages s’impose déjà comme la référence de cette époque. Certaines interviews ont été publiées dans des fanzines (Abus Dangereux, On A Faim!, Zic Zig, Rock Hardi, Mix, etc. ) ou dans la presse généraliste (Ouest-France). D’autres au contraire étaient complètement inédites à ce jours. En introduction à chaque échange, Jean-Noël, écrit un petit texte qui permet de re-contestualiser le groupe et l’entretien qui en découle. C’est joliment fait et même si une partie des groupes est peu connue, c’est souvent des flots de souvenirs qui remontent tout au long de la lecture. Parmi les groupes présent sur ce 1er opus, on retrouvera les rescapés de la scène alternative, (La souris déglinguée, Les $herrif, Dogs, Les Thugs, Ludwig Von 88, Dirty Hands, etc.) les représentants du Hardcore français (Burning Heads, Mass Murderers, No One Is Innocent) du rock breton (Ev, Red Cardell, Alan Stivell) quelques pointures internationales (Ramones, Hugh Cornwell des Stranglers, New Model Army), et enfin plein d’autres choses toutes aussi appétissantes.

Cette compilation d’interviews est aussi l’occasion de capter un groupe à un instant T, comme disent les scientifiques… Les problématiques sont souvent communes aux groupes, comme la difficulté de trouver ou de garder un label. C’est là aussi que l’on apprend des choses tout à fait surprenantes. Par exemple, le groupe californien « Big Soul » qui connu un vif succès en France était alors complètement inconnu chez lui à un tel point que leurs disques y étaient introuvables. Je me souviens que je les avais vus dans un festival et qu’ils avaient volé la vedette à un Miossec ivre mort et à des « Noir Désir » qui houspillèrent le service d’ordre, agressif avec les 1er rangs. L’histoire montrera effectivement que l’on ne règle rien à coup de poing. Mais ce soir là, c’était l’anniversaire du leader de Big Soul. Le groupe avait « branché les guitares » et le public était en feu. Un grand souvenir.

JN

L’ouvrage n’est pas prévu pour s’avaler d’une traite, sous peine d’overdose, mais il se déguste sur le long terme. L’un des meilleurs moyens de l’aborder, c’est d’essayer de redécouvrir la musique de ces groupes que vous n’avez sans doute pas écoutée depuis. Et c’est aussi l’occasion de faire de sympathiques découvertes, comme ces Greedy Guts de Toulouse qui faisaient un Surf Punk Mélodique dans la lignée des groupes de L.A. Ou ces Naufragés, montés sur les cendres d’OTH, que je n’avais jamais pris le temps d’écouter. Un livre plaisir donc, parfait pour réchauffer les longues soirées d’hiver qui s’amènent. Et le plus jouissif, sera de se dire que pendant que l’on dégustera un bon single malt en écoutant (au hasard) Sloy, les Satellites ou Wroooble Expérience, Jean-Noël continuera lui à fouiller le fond de ses archives pour nos concocter le 2ème volume de ce « Instantanés électriques ».

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