Harpon, Baxter Stockman et Silent Front @ Bar’Hic : Fureur, dissonance et classe

Harpon@BarHic-alter1fo (8)Météo France avait bien lancé un bulletin d’alerte pour ce week-end nous prévenant de risques de foudroiement par larsens, mêlé d’un déluge de basse vicelarde et d’un assourdissant tonnerre rythmique. La soirée organisée par Kfuel samedi 12 avril au Bar’Hic avec Harpon, Baxter Stockman et Silent Front, nous réserva bien tout ça et même plus. Retour sur une soirée où chaque groupe donna le meilleur du pire, même dans des conditions délicates.

C’est samedi soir, il y a du monde place des Lices mais aussi à la terrasse du Bar’Hic. On retrouve les habitués des concerts de musiques féroces et indociles. Il y a ceux qui sont venus pour le trio anglais et ceux qui sont venus pour le trio finlandais. Peu semblent être venus pour le quatuor rémois mais ils vont vite nous prouver que nous avions eu bien tort de les sous estimer.
C’est en effet Harpon qui entame les hostilités. Nous ne connaissions du groupe qu’une vidéo malicieusement glissée par Greg, le boss de Rejuvenation Records, qui nous avait certes aguichés mais dont le son perrave nous avait laissés sur notre faim. Le choc n’en fut que plus grand. Les quatre gars sont visiblement là pour en découdre et entament le set bille en tête. Leur noise rock, bien hardcore comme il faut, fait tout de suite mouche. Leur set bref mais intense fait la démonstration d’une maîtrise impeccable de leur sujet. Le chant est furieux à souhait et le duo de guitares est tranchant comme un rasoir. La frappe dévastatrice du batteur, alliée au jeu retors d’un bassiste possédé nous cueille direct au foie. Une bonne grosse claque d’une demi heure diablement intense, dont même une petite cascade de batterie impromptue ne parviendra pas à briser le rythme d’enfer. Le public ravi et reconnaissant leur offre un accueil plus que chaleureux. Démarrage sur les chapeaux de roue donc, avec un groupe dont on va guetter attentivement des nouvelles.

BaxterStockman@BarHic-alter1fo (8)

C’est donc parfaitement en jambe que nous accueillons les très attendus Baxter Stockman. Les Finlandais nous avaient fortement impressionnés avec la noise rêche et acérée de leur formidable album de 2013 : Punter. La transcription sur scène ne va pas nous décevoir. Le trio démarre son set avec une intensité à couper le souffle et une précision chirurgicale. Après une courte mais spectaculaire intro, les gars dégainent un blue balls épileptique et foudroyant qui place d’emblée le concert dans la catégorie Dans ta face !. La frappe métronomique et sèche comme un coup de trique de Max, la batteur à lunettes nous tombe dessus comme la foudre. Le chant rageur et le jeu de guitare sec et tranchant de Markus nous électrisent. Pourtant, celui qui impressionne le plus, c’est Visa le bassiste. Son jeu insidieux et ultra puissant apporte au trio une sonorité singulière et irrésistible. La température qui avait déjà bien pris quelques bons degrés avec Harpon atteint des sommets tropicaux. Le bar tangue voluptueusement au rythme des assauts insidieux du post-punk volcanique de ces gars venus du froid. Le concert est bien parti pour être parfait… sauf que la bande joue fort, très fort, trop fort. Les enceintes relayant les voix nous lâchent avec une inexplicable irrégularité. Les versions semi-instrumentales permettent au moins de juger si les compos tiennent la route. Le test est amplement concluant mais aussi bien frustrant. Etienne qui s’occupe du son, bataille férocement mais rien n’y fait. Il finira par découvrir que les baffles s’éteignent automatiquement si le son est trop fort. Seule solution donc : baisser le niveau, ce qui nous permettra de profiter pleinement des trois derniers titres. Le concert s’achève sur l’implacable Ten Rock suivi du flippant Romance avec pour rappel un vibrionnant labour qui met tout le monde à genou. Petit regret de ne pas avoir pu profiter à plein d’une prestation aussi sublimement féroce mais heureux de voir se confirmer en live tout le bien que l’on pensait de ces trois allumés.

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Après ces sautes d’humeur de la sono, le concert suivant fut joué à un niveau sonore beaucoup plus raisonnable. Ce qui n’est pas plus mal finalement pour apprécier les compos des Londoniens de Silent Front. Les trois Anglais arrivent armés de leur excellent nouvel album Trust. Pour notre grande joie, leur set sera d’ailleurs presqu’intégralement composé de titres de ce dernier. Pour la troisième fois, nous retrouvons une bande alliant compos solides, technique impeccable et puissance scénique. Le bassiste est certes plus placide que ses prédécesseurs mais pas moins redoutable. Le batteur est à nouveau de feu. La palme revient tout de même au chanteur/guitariste : un spectaculaire géant au visage cartoonesque dont la voix agressive peut aussi se faire plus écorchée et mélancolique. Leur noise tortueuse mais toujours très mélodique fait merveille et le Bar’Hic atteint rapidement son point de fusion. Après une poignée de titres rentre-dedans, les gars se permettent un étonnant interlude : le lancinant Confiance. Ce long morceau très répétitif avec sa ligne de basse inamovible peinait un peu à convaincre sur le disque. Pourtant en live, le bourricot prend une toute autre tournure. Les riffs orageux venant exploser brutalement et le chant lugubre et plaintif s’élevant au dessus de la répétition nous filent des frissons. Un grand moment, suivi d’un retour à la fureur qui conclura brillamment un set en tout point splendide.
Merci encore une fois à l’impeccable association Kfuel et au Bar’Hic d’avoir permis la rencontre de trois groupes aux musiques finalement assez différentes, mais ayant en commun une présence scénique fascinante et une puissance de compos et d’interprétations largement au dessus de la masse. Le meilleur étant qu’il ne faudra même pas attendre deux semaines avant de remettre ça avec les monstrueux Hawks au Mondo Bizarro.

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