Deux soirées concerts @ Jardin Moderne les 11 et 12 juin 2021 : Le retour des zicos-vivants

Cela faisait sept mois et vingt-sept jours que nous n’avions rien écrit dans la partie concert de notre site. Merci infiniment à l’Alambik, Carnival of Sound et le Jardin Moderne d’enfin nous permettre de dépoussiérer cette rubrique. Cet épatant trio vous invite en effet les 11 et 12 juin au Jardin Moderne pour deux soirées de concert qui regrouperont pas moins de huit groupes. Comble du bonheur l’ensemble des formations sélectionnés est de très haute volée. On vous en détaille avec une impatiente gourmandise le menu.

La dernière soirée concert à laquelle nous ayons pu assister date d’octobre 2020. C’était assis, étonnamment satisfaisant et déjà au Jardin Moderne.  On en garde un souvenir aussi ému que bizarrement lointain. Grâce aux efforts conjoints de L’Alambik, Carnival of Sound et de nouveau Le Jardin Moderne vous allez de nouveau pouvoir entendre de la musique live les 11 et 12 juin 2021. Pour cette reprise tant attendue tout à été méchamment soigné, du visuel élégant du toujours impeccable Julien Lemière à la programmation qui s’annonce aussi généreuse que pointue.

C’est enfin la reprise des concerts mais essayons que cela ne nous rende pas trop stupide histoire de se débarrasser vraiment de cette fichue épidémie. Les deux soirée auront donc lieu avec des dispositions élémentaires de prudence sanitaire.  Les concerts auront lieu en jauge réduite et à l’extérieur du Jardin Moderne. Les horaires sont bien évidemment adaptés pour que vous soyez chez vous avant le couvre-feu. Enfin, le public sera assis et masqué. Pour l’avoir déjà vécu, cela ne retire pas grand chose du plaisir qu’on a à écouter de la musique live. Pas de test PCR ou Pass sanitaire demandé mais les organisateurs nous préviennent que « Selon l’évolution des conditions et mesures sanitaires d’ici l’événement, Le Jardin Moderne sera amené à le maintenir, l’adapter, le reporter ou l’annuler. »
On croise très fort les doigts et on prépare nos masques donc.

Le premier temps de cet épatant doiblé démarrera le vendredi 11 juin à partir de 19h. Nous sommes tout particulièrement ravi d’avoir l’occasion d’y entendre de nouveau le Rennais Rouge-Gorge. On suit de puis déjà un moment, les explorations electro-pop entre émotion pure et humour sombre de Robin Poligné. La musique du jeune homme évoque avec une fraicheur pourtant intacte la frange möderne frenchy des eigthies (Daho, Elli & Jacno, Taxi Girl…) comme ses homologues de New York, de Belgique ou d’Allemagne. Ce drôle d’oiseau surfe sur la minimal wave frenchy en cultivant avec talent l’ambiguïté entre désinvolture, légèreté et résonance macabre.
En 2018, une belle saloperie virale a bien failli avoir la peau du volatile. Il y a laissé quelques plumes physiques et vocales mais pas son inspiration. Il a sorti fin 2019,  René chez Poussière d’Epoque et Doki Doki. Cet album de rené-ssance composé et enregistré entre rééducation et reconstruction est une merveille d’équilibre entre douleur et légèreté. Un disque aussi intime qu’universel qui est entré dès la première écoute dans notre liste hautement sélective des albums qui vous chamboulent dedans-dehors en gardant un léger sourire au coin des lèvres.
Nous avons déjà nombre de fois apprécié ses prestations scéniques dépouillées et à fleur de peau et nous vous invitons plus que chaudement à découvrir ce délicat animal dans son habitat naturel.

Les autres groupes de la soirée nous sont moins familiers mais nous émoustillent tout autant les tympans. On retrouvera ainsi les nantais de Humbros. Composé de Simon Puiroux et de Charles Dubois, ce duo explore avec une jubilation communicative des paysages rythmiques et syncopés laissant la part belle aux matériaux bruts et aux textures bigarrées. Ce joyeux puzzle sonore aux rythmes complexes mais pas arrogants nous propulse dans un univers entre transe et vision cosmique évoquant aussi bien la musique minimaliste que le free jazz. On a hâte de décoller en leur compagnie.

GRAND VEYMONT, l’autre duo de la soirée nous vient lui du Vercors. Béatrice Morel-Journel et Josselin Varengo semblent aussi aventureux que le groupe précédent mais privilégient les trames synthétiques pour broder une pop hallucinée et hallucinante dont la délicatesse et les vertiges sont assez addictifs. Nous évoquant aussi bien Stereolab, White Noise que Broadcast leur musique est un irrésistible appel à la rêverie. Une invitation à laquelle nous serons ravis de bientôt répondre tant la finesse rythmique et sonore de leurs compositions nous ont déjà séduit çà l’écoute.

Concerts de Rouge Gorge, Humbros et Grand Veymont
Vendredi 11 juin 2021 – de 19h à 22h 15– 8€
Préventes par là.

Après cette entame toute en émotions et finesse, la seconde journée du samedi 12 juin risque bien de mettre tous les potards dans le rouge.

Les rennais de BLACK CAMBOUIS n’en sont, semble-t-il, pas à leur coup d’essai. Les cinq titres écoutables sur le bandcamp de ce duo basse/clavier guitare invoquent des univers sombres et dissonants entre fracas soniques et brumes acides. Rythmes concassés, voix noyées dans le cambouis, nappes caustiques, le voyage ne devrait pas être de tout repos.

On a suivi avec plaisir les aventures musicales bien dingo de Grégory Hairon dans son projet/personnage Gregaldur. Il y avait mis un terme à d’un ultime et très touchant concert à l’Antipode en ouverture de la release party des Totorro en novembre 2017, il continue désormais ses aventures musicales sous le nom de Héron Cendré. Il a troqué sa pop délurée pour une electro aux atours multiples, entre esprit bricolo et malicieux, beats punks et débridés à la Cheveu et mélancolie brumeuse inspirée très explicitement des minimalistes comme Steve Reich ou Terry Riley. Nous sommes au moins certains que la réjouissante énergie du bonhomme devrait, comme à chaque fois, tout emporter sur son passage.

La soirée verra également le retour sur Rennes d’une formation dont nous suivons avec attention les aventures : Rien Virgule. Ce quatuor dordognais peut se targuer de nous avoir coller une superbe rouste avec leur album Trente Jours à grande échelle (sorti en octobre 2015 grâce aux efforts conjoints de La République Des Granges, Les Potagers Natures, ‎ Permafrost, micr0lab, Animal Biscuit, Do It Youssef !, Attila Tralala et Phase! Records). Jean-Marc Reilla et Manuel Duval (de France Sauvage, Pousse Mousse et Nouvelles Impressions d’Afrique) y taquinaient sauvagement des synthés bricolés à la maison. Mathias Pontévia jouait de la batterie mais en remplaçant ses baguettes par des micros, donnant à ses rythmiques une dimension assez vertigineuses. Ajoutez à ça le chant possédé, et dans un italien diabolique, d’Anne Careil, et vous obteniez une musique insaisissable et tribale qui vous fait passer par tous vos états.

Suite au décès en juin 2019 de Jean-Marc Reilla, Rien Virgule est désormais un trio. L’orgue bricolé maison du monsieur semble pourtant continuer d’hanter leur musique. L’aventure s’est ainsi prolongée en 2019 avec le tout aussi inspiré Le couronnement des sylex sorti avec l’aide de Permafrost, Zamzam Records, La République des Granges. De la grandiloquence baroque des Bandes Originales de film d’horreur italien en passant par des dingueries synthétiques ou du drone aquatique, leur musique se joue des frontières musicales avec un appétit féroce et une rage réjouissante. Une grosse claque comme on n’en avait pas pris depuis notre première écoute du Cercle des Mallissilimalistes. La bande partage de plus avec ses derniers une intensité scénique hors norme comme ils en avait déjà fait l’impressionnante démonstration en mars 2016 au Terminus. Nous lançons donc un bulletin préventif d’alerte à la grosse baffe scénique de force 10. Préparez vos tympans en conséquence.

On reste dans la haute intensité scénique avec le duo franco-israélien Winter Family. Né à Jaffa en 2004, de la rencontre de Ruth Rosenthal et Xavier Klaine, le groupe explore sur disque ou au théâtre (dans leur spectacle Jérusalem Plomb Durci) une musique toute en ambiance et en émotion. Leur post-rock minimaliste possède une puissance émotionnelle rare. Les psalmodies bouleversantes de Ruth planent fantomatiquement sur des bruits captés ou le fragile bourdon de l’harmonium et les percussions de Xavier. La beauté douloureuse de leurs chansons en lambeaux, alliée à l’intensité de leur implication dans leur musique font de leur concert un moment magique. Nous les avions découverts en live en 2013 au Jardin Moderne lors d’une mémorable seconde édition du Musiq’Alambik et nous avions pris une énorme claque. Impossible de résister à la charge émotionnelle dégagée par cette musique sur scène. Ils ont depuis sorti en en février 2017 sur le label Ici d’ailleurs, South of here  un superbe et étonnant sixième album sur lequel leur musique se teinte d’un groove froid et fantomatique à la Suicide des plus splendides. Autant dire que l’on défaille d’impatience de les revoir jouer sur scène.

Autre retour qui a toutes les chances d’être gagnant, celui d’Heimat. Quand nous est parvenue la nouvelle qu’allait sortir chez le très excellent label Teenage Menopause (Jessica 93, JC Satàn…) un disque né de la collaboration d’Olivier Demiaux (le clavier de Cheveux) et d’Armellle Bisoubisou (The Dreams, Crack Und Ultra Eczema), il faut bien avouer que nous n’avions strictement aucune idée de ce à quoi nous pouvions nous attendre des deux zigues. Appâté par la splendide pochette entre art naïf et science-fiction guérillera, nous avons donc découvert début 2016 la très prometteuse première démo d’Heimat puis un album sans titre qui nous a passablement retourné. Heimat, dans la langue d’Harald Schumacher, c’est un terme passablement intraduisible entre terre natale, foyer de son enfance et mère patrie, un endroit où l’on se sent bien et qui nous manque quand on s’en éloigne. Si l’univers musical des deux zigotos est un endroit, nous serions bien incapables de le situer sur une carte. Ou alors, guidé par l’aspect fantasmagorique de la pochette, on pourrait imaginer une île tropicale et mystérieuse sur laquelle auraient débarqué Can, un rappeur népalais, Siouxsie Sioux, Nico, Brigitte Fontaine et une fanfare bengalaise Un disque qui n’en finit pas de nous fasciner et qui reste bien placé dans notre liste des disques les plus mémorables de 2016.
Les deux zigues viennent de récidiver avec le fort judicieusement nommé Zwei, sorti en mai 2021 toujours chez Teenage Menopause. Les boucles orientalisantes de Demiaux et le sabir emphatique et germanisant d’Armelle n’ont rien perdu de leur impact. On a déjà pu constater à plusieurs reprises la fougue réjouissante du duo sur scène et on gage que même assis, ils vont eux aussi nous coller une dérouillée mémorable

Concerts de Black Cambouis, Héron Cendré, Rien Virgule, Winter Family et Heimat
Samedi 12 juin 2021 – de 17h30 à 22h 15– 15€
Préventes par là.

Le Jardin Moderne, 11 rue du Manoir de Servigné, Rennes
Bus n°11 (arrêt Jardin Moderne)
Bus n°9 (arrêt Cleunay)
lignes 54, 55, 56 – arrêt Berthault

Plus d’1fos :
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Le site du Jardin Moderne

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