Belle rentrée au Jardin Moderne

Rentrée 2010 @ Jardin ModerneLes trois salles de musiques électriques et amplifiées rennaises ont fait leur rentrée en rafale en cette fin de semaine : soirée à l’Ubu le jeudi, Curiosités en tout genre à l’Antipode le vendredi et concerts au Jardin Moderne ce samedi. On finit donc la semaine dans la zone industrielle de la route de Lorient avec une affiche qui nous a vraiment donné envie de venir.

Éclectique et varié, le programme promettait du rock, de la noise, de la pop, de l’électro, du hip-hop, du folk sur trois scènes différentes, rien que ça. Une façon de rallier un public varié, avec une vraie curiosité. Pari réussi, les spectateurs ont fait le déplacement jusqu’au Jardin Moderne.

Certains viennent pour un artiste : il y a les fans du rock carré de Garbo, les inconditionnels qui viennent fêter Ka Jazz une dernière fois ou les aficionados d’une noise française de qualité (Room 204 ou Fordamage) ainsi que les curieux qui viennent pour découvrir la folk boisée de Ladylike Lily. Mais tous ont les oreilles grandes ouvertes aux découvertes.

The Enchanted Wood

On commence la soirée avec la mélancolie et les ambiances sombres de The Enchanted Wood. Le groupe compte en ses rangs deux des musiciens des excellents La Terre Tremble !!!, Paul Loiseau, l’extraordinaire batteur  et percussionniste et le non moins talentueux Julien Chevalier à la guitare. A sa tête, on retrouve Michel Le Faou, le chanteur-bassiste-guitariste-bidouilleur. Sur scène, ce soir, le groupe sera aussi accompagné de Tim Bewlay au clavier après quelques titres.

Rentrée 2010 @ Jardin Moderne  - The Enchanted woodLes ambiances fantomatiques et brumeuses (dans des lumières vertes et violettes) restent relativement pop (sûrement du fait du clavier) et c’est une bonne entrée en matière pour commencer la soirée. D’autant que sur le dernier morceau, les musiciens sont rejoints par ceux de Fordamage pour un très bon morceau beaucoup plus pêchu et habité.

Garbo

On file ensuite retrouver Garbo qui mettent l’ambiance dans la salle de concert. En tour de chauffe avant les prochaines Transmusicales, les deux Rennais d’adoption, envoient leur rock carré guitare-basse-sampler toutes griffes en avant.

Les morceaux font la part belle à une énergie maîtrisée et réfléchie. C’est millimétré à l’extrême. Pas de place pour les solos ou les impros, Garbo ne jure que par l’efficacité. Et à voir l’ambiance dans le public, on se dit que ça marche. A peine le temps de les voir changer de pied de micro pour un dernier morceau en rappel qu’on file déjà voir la suite.

Rentrée 2010 @ Jardin Moderne - Garbo

C’est à la fois l’avantage et la limite d’avoir des concerts sur trois scènes. On n’a pas le temps de s’ennuyer, si on n’aime pas, on va ailleurs. Mais d’un autre côté, ça favorise aussi le zapping et l’impression de ne pas prendre le temps de rentrer dans les ambiances de chaque artiste. Rentrée 2010 @ Jardin Moderne - Mami ChanEt surtout, il y a des moments où on a très envie de voir deux groupes qui passent en même temps (même si au Jardin Moderne, les horaires ont été bien pensés et légèrement décalés afin de se faufiler sur un début ou dans une fin de concert).

Mami Chan

On reste donc quelques minutes devant Mami Chan et ses comptines bariolées et fantasques. Sur la scène extérieure, la Japonaise installée en France, réchauffe les esprits enfantins et invite les membres du public à monter sur scène pour jouer des petites percussions et danser avec elle.

Décalée Mami Chan, c’est le moins qu’on puisse dire, mais on se promet d’écouter tout ça un peu mieux un de ces jours.

Rentrée 2010 @ Jardin Moderne - Ladylike Lily

Ladylike Lily

On choisit ensuite d’aller retrouver Ladylike Lily à l’intérieur. On la retrouve identique à sa prestation lors du tremplin Mozaïc. Robe en coton, belle voix chaude et guitare en arpèges. On ré-écoute ses compositions feutrées avec intérêt. On attend maintenant de l’entendre sur disque. Va-t-elle rester dans cette formule assez minimale ou choisira-t-elle d’étoffer le son ? On est curieux d’entendre ce que cela donnera.

En attendant, on passe un moment agréable avec la jeune femme et on imagine que les aficionados de Cocoon, Moriarty ou Emily Jane White retrouvent l’une de leur paire. On manque la fin parce que Ka Jazz commence sur une autre scène.

Ka Jazz

Le groupe, l’un des plus talentueux de la scène rennaise, avec un style vraiment bien à lui, donne en effet son dernier concert ce soir. Les fans le savent et la petite salle de concert est bien remplie.

Rentrée 2010 @ Jardin Moderne - Ka JazzTrio beatbox (Chris), guitare-basse-contrebasse (Chris) et chant (Zina), la chanson des Ka Jazz n’a rien de conventionnel. Elle mêle amour des mots, chant rythmé, influences soul, hip-hop, chanson, etc. sans aucun complexe. On peut ne pas apprécier le style musical mais il reste évident que le groupe rennais a été l’un des combos les plus intéressants et inventifs de sa génération.

Ce soir, c’est la dernière, alors Ka Jazz, notamment Zina, se lâche. Elle discute, blague, s’arrête en plein milieu d’un morceau, fait semblant de provoquer les deux musiciens. L’ambiance est à la franche rigolade. D’autant qu’un joueur de pipeau fou s’est glissé devant la scène et complètement étranger à ce qui se passe, continue de jouer de sa flûte à bec. Le rythme, cependant s’accélère quand les trois musiciens se rendent compte qu’ils n’ont plus beaucoup de temps, qu’ils en ont passé beaucoup à blaguer et qu’il leur reste encore plein de morceaux à jouer.

On les abandonne alors pour aller écouter l’un des groupes qu’on avait le plus envie de voir dans l’autre salle :  les Nantais de Room 204. Sur le chemin, on s’arrête quelques secondes dehors pour écouter le hip hop synthétique de Subtitle mais on court vite rejoindre Room 204 qui a déjà commencé.

Room 204

Rentrée 2010 @ Jardin Moderne - Room 204Duo instrumental batterie-guitare baryton, le groupe propose un math-rock enthousiasmant. Dans le public, un gars devant nous râle en disant que ça manque de basse. On a envie de lui expliquer que c’est pour ça que les Room 204 ont choisi une guitare baryton sur leur dernier album (voir interview là), pour avoir plus de basse.

Les morceaux sont courts, racés, serrés, et pour peu qu’on aime le style, on y trouve son compte. Le gars devant nous commente « il paraîtrait que le batteur, c’est le batteur de Papier Tigre », d’un air-de-celui-qui-saurait-une-vérité-qui-échappe-au-commun-des-mortels. Et bien oui, c’est bien le batteur de Papier Tigre et ça s’entend ! Subtil et puissant à la fois, Pierre-Antoine, en bermuda, déroule et cogne avec une belle maestria. Pour une fois, on reste jusqu’à la fin du set et ce n’est qu’après leur dernière structure alambiquée qu’on se faufile de nouveau dans la salle de concert.

Robert Le Magnifique

On est désolé pour le spectacle tiré de l’adaptation du recueil d’Alan Bennett, Talking Heads interprété par la Compagnie Unijambiste, réduite ce soir à Anne Buffet en solo. Il devait y être question d’une actrice consciencieuse qui n’arrive qu’à décrocher des rôles pornos malgré son attachement à être une comédienne sérieuse. On aurait bien aimé le voir mais le temps nous a manqué. On arrive donc de nouveau dans la salle de concert afin d’entendre le début de la prestation de Robert Le Magnifique. Tiens, le joueur de pipeau est encore là…

Rentrée 2010 @ Jardin Moderne - Robert le MagnifiqueHeureusement, le son est couvert dès que Robert le Magnifique commence à jouer. Là encore, on peut ou non apprécier le style musical proposé par le bonhomme, mais force est de constater que l’homme fait montre d’une réelle maîtrise.

Sampler et platines pour commencer, avec une électro à la fois dansante et breakée. Mais l’homme jongle avec les styles et très vite des samples de vieux standards de jazz ou de guitares rock viennent rehausser les compositions. L’artiste se saisit alors de sa basse cinq cordes et joue en parallèle de ses samples et platine. Il s’arrête parfois pour scratcher, puis lâche de nouveau la basse.

C’est ce qu’on apprécie avec Robert le Magnifique, l’ouverture à tous les styles ainsi que la maîtrise technique dont il fait preuve. On l’abandonne à un public prêt à remuer les pieds et les jambes et on court voir les autre Nantais de la soirée : Fordamage.

Rentrée 2010 @ Jardin Moderne - Fordamage

Fordamage

Et là encore ça envoie ! Le quatuor (basse-growl, guitare-chant-crié, batterie, encore guitare) réunit 3 gars et une fille qui ont envie d’en découdre.

Explosions punk et noise sont de mise avec Fordamage qui comme ses aînés Fugazi ou Shellac, conjugue énergie brute et compositions racées. Les structures des compos peuvent là encore éclater les formats d’un aller-retour de médiator ou d’un roulement de caisse claire.

Sur scène, qui plus est, les Nantais se donnent. Amélie Grosselin, à la guitare, va d’avant en arrière avec son Hagström (?) avec une énergie impressionnante. A côté, les garçons ne sont pas en reste et donnent eux aussi de leur personne. On prend leurs compos en pleine face et on en redemande.

D’autant que sur les derniers morceaux, ils invitent nos chouchous rennais Fago.Sepia avec eux sur scène. Les titres gagnent encore en puissance sonique jusqu’à ce final explosif avec en plus des Fago.Sepia, les Room 204 et les La Terre Tremble !!! qui s’adjoignent à la formation. On a les oreilles qui sifflent, mais on est complètement revigoré par cette débauche d’énergie. On se dit qu’on va avoir du mal à trouver le sommeil après ça…

En partant, on s’arrête quelques minutes pour écouter le breakcore du berlinois Electric Kettle sur la scène extérieure, puis on quitte la zone industrielle de la route de Lorient en se disant que cette rentrée était fort belle…

Et augure d’une bien bonne saison.

Photos : Caro

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Le site du Jardin Moderne

Pour retrouver les liens sur les artistes, cliquez sur la page de présentation de la soirée.

2 commentaires sur “Belle rentrée au Jardin Moderne

  1. L.Walras

    Vous avez loupé Publicist en partant si tôt… c’était juste énorme : vocoder et synthé, batterie puissante, torse nu et chaîne luisante ! Le batteur de Trans Am en solo a vraiment assuré…
    Et puis la chanteuse de Fordmage joue sur Hagström je crois.
    Quant à la phrase sur Pierre-Antoine Parois je la trouve un peu arrogante, tout le monde ne sait pas dans quel groupe a joué tel ou tel musicien, surtout quand on sait que Papier Tigre a commencé en 2006 alors que justement Room 204 prenait un break tant pour le live que pour les disques… Vous connaissez Seymour vous ?
    Sinon votre webzine est top ! Bien à vous.

  2. isa

    Merci pour cette précision, pour la guitariste de Fordamage… 😉 Je me suis laissée abuser par le manche… Après vérification, on dirait même une Hagstrom III… Je corrige de suite !
    Mais surtout, il ne s’agissait pas du tout d’arrogance… Je me doute bien que tout le monde ne connaît pas Papier Tigre et je n’avais jamais entendu parler du projet solo de Publicist avant cette soirée, de mon côté, alors de là à la ramener… C’était simplement l’air de ce jeune homme « je-sais-tout-sur-tout » vis à vis de son pauvre pote qui m’a quelque peu irrité… Mea culpa.
    Quant à Publicist, tu nous fais encore plus nous mordre les doigts de ne pas être resté ! On sentait bien que ce serait un super set… Merci pour ces impressions…

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